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Critique de fabienne2909


Sexe, drogue, mais pas trop rockn'roll, le nouveau roman de Mélissa Da Costa est considéré par les Babéliotes comme une réussite ou un ratage. Dans mon cas, j'ai gardé en refermant ce roman comme un arrière-goût d'arnaque, et ce n'est pas forcément un compliment (ça aurait pu).
Evie Perraud est une jeune femme de vingt-trois ans, très naïve, trop confiante. C'est d'ailleurs ce qui lui a fait perdre cinq années de sa vie, après avoir attendu son compagnon marin qui lui a annoncé un jour ne plus jamais revenir. Et c'est comme ça aussi qu'elle se retrouve embauchée par Pierre Manan, un riche homme d'affaires, pour servir d'assistante à sa femme Clara, artiste peintre en pleine ascension, connue sous le nom de Calypso Montant. Ce qui au départ ne devait être qu'un poste de relations presse et d'organisation de cocktails devient rapidement autre chose puisque Clara et Pierre lui demandent de se faire passer pour Calypso Montant dès la première exposition de l'artiste, Clara souhaitant se concentrer uniquement sur sa peinture. Evie se prendra au jeu, attirée par les Manan comme un papillon de nuit par la lumière, devenant rapidement le jouet de ce couple aux intentions troubles. A moins que…
Manipulations, mensonges, dépravation, tout est mis dans le shaker par Mélissa Da Costa pour nous servir un roman vénéneux comme un datura : Clara Montant est une artiste qui s'inspire du romantisme noir pour ses tableaux, a un caractère assez spécial, et est portée avec son mari sur l'échangisme (et d'autres pratiques dont on nous rebattra les oreilles pendant tout le roman sans jamais lever le mystère) et très sûrement sur la domination, dont elle use et abuse sur son petit monde, en premier lieu son mari. L'autrice nous sert les références du genre pour rendre une atmosphère délétère : les tableaux de Goya, Füssli ou Collier pour l'art, Baudelaire, Ann Radcliffe, Matthew Gregory Lewis et le marquis de Sade pour la littérature, et surtout le mythe de l'opposition entre Lilith et Eve pour la religion. Ce thème sera d'ailleurs central dans l'histoire.
J'ai pris plaisir à lire la première grosse partie du roman, Mélissa Da Costa réussissant à installer une ambiance vraiment très particulière, très sombre, vicieuse, très directement sexuelle, qui plaira ou qui choquera selon le lecteur. C'est en gros la partie où Evie découvre son rôle de doublure et se prêtera de plus en plus à ce petit manège qui devient, comme on le devine assez vite, dangereux pour tout le monde. Cette partie est maîtrisée pour moi car l'autrice met en place une intrigue qui peut se déployer de différentes manières (Evie sera-t-elle une victime ou l'inverse ? Les Manan sont-ils des manipulateurs finis ou simplement des libertins ?) avant de se refermer pour se rouvrir dans d'autres directions. C'est assez plaisant de se sentir soi-même manipulé dans la lecture.
Mais arrivée à la seconde partie du roman, alors là c'est le retournement complet et c'est la catastrophe. Les éléments qui faisaient jusque-là la qualité du roman deviennent la cause du naufrage : une histoire à la dérive, qui devient ridiculement manichéenne (la victime est très victime tandis que la méchante est très méchante, alors que franchement, le personnage en question se défend avec ses moyens, on ne pourra pas le lui reprocher et en tout cas moi je le comprends), avec des dialogues dont la qualité baisse franchement, et des rebondissements rocambolesques. J'avais deviné le pénultième rebondissement, plus motivé par une faiblesse de caractère de la part du personnage que par un réel vice, dommage de ne pas être allée jusqu'au bout, avant une fin qui relève un peu le niveau. Bref je me suis sentie en colère contre Mélissa Da Costa d'avoir réussi une moitié de roman avant de saborder la suivante avec la même facilité. J'ai très peu aimé le personnage d'Evie, que j'ai trouvé agaçant de bout en bout, et dont les souffrances m'auront servi d'exutoire face au délitement du roman. C'est excessivement dommage car « La doublure » reste un roman marquant, qui aurait pu être un véritable chef d'oeuvre.
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