C'est si vaste, c'est une telle aventure, on y voyage à travers tant de choses, qu'on en est changé pour toujours.
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L'enquêteur en chef était à la besogne, il interrogeait. Il avait des suspects, des témoins, c’est tout comme : mêmes méthodes. Il faisait cela comme le chat joue avec la souris. Cela commence par des impertinences vis-à-vis du prévenu ; ensuite ce sont des insolences. Tutoiement, affirmations péremptoires, sous-entendus insultants, tout peut y passer. Il y a des insolences que les titres permettent et qui ne sont jamais sanctionnées dans ces sortes d’Etats qui couvrent aveuglément le droit du fonctionnaire à mépriser les citoyens, spécialement là où la Constitution place – très théoriquement – le citoyen au-dessus de tout. Cet enquêteur moscovite avait appris son métier avec l’impudence des gens qui se placent sous la férule mystique de la puissance publique dont ils font leur religion pour assouvir leurs frustrations et leur besoin d’arriver. C’est une sorte d’agents qui voient la raison d’Etat comme le patronage d’une toute-puissance, pour qui la loi et les règlements sont des boussoles infaillibles pointant vers une direction à atteindre sans considération de ce qu’ils écrasent en chemin. Peu importe par où cela passe, il faut que ça passe. S’il faut cinquante-mille agents, on recrutera cinquante-mille agents, même si le peuple doit s’entailler les veines des poignets. Pour ces gens, l’Etat surpasse l’Homme et “nul n’est au-dessus de la loi”, formule fausse s’il en est, puisque l’Homme passe tout et que la loi est à son service.
"L’ami est celui qui partage le poids, qui se trouve dans un espace où sont deux êtres qui vivent dans une vérité et une liberté absolues, dans un rejet des croyances générales, et qui vivent l’un par l’autre. Tout est sujet à une complicité, tout est communion. Ils sont intimement d’accord sur le monde visible et se cherchent intimement dans le monde invisible."
Il était assez rare qu’on entendît aussi bien que ce jour-là le bruit du vent dans les arbres éloignés, sous la déclivité de la montagne. Au-dessus du puits, auquel Reinhardt demeurait le plus souvent adossé, il y avait, à quelques dizaines de mètres, de l’eau stagnante, un gros étang dont l’eau s’écoulait à part, vers la droite. Le puits, lui, recevait de l’eau pure, souterraine, provenant d’une veine sans aucune relation. C’était sans doute pour la protéger que les ancêtres des villageois avaient songé à fabriquer cette cloche. L’eau saumâtre n’était pas loin de l’eau pure.