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sur 1191 notes
Autant l'annoncer tout de suite : ce roman ne vous laissera pas indemne. Il est révoltant, surtout dans une société qui prône l'égalité des sexes et la liberté sexuelle. Ainsi, Jean, mère de famille de quatre enfants, vit aux Etats-Unis. Or, suite à la montée du "Mouvement Pur", le pays s'est transformé en un régime totalitaire contrôlé par une politique profondément misogyne. Dans ce patriarcat, l'autorité masculine est toute puissante et les femmes sont réduites au silence grâce à des compteurs, qui les limitent à 100 mots par jour. Toute forme de communication est proscrite : les livres et les jeux de société ont disparu, remplacés par des textes religieux enseignant que Dieu est supérieur à l'homme et que la femme se situe tout en bas de cette hiérarchie, les écoles pour filles organisent des concours récompensant celle qui prononcera le moins de mots au cours de la journée… Non seulement on les prive de leurs libertés, les vouant à être des mères au foyer dépendantes de leur mari, mais aussi de leurs droits fondamentaux. Par exemple, lors d'une arrestation, les droits énoncés ont été remplacés par des devoirs imposés et, souvent, elles sont publiquement humiliées sur la chaîne nationale pour servir de modèle. En outre, le "Mouvement Pur" ne s'attaque pas qu'au rôle de la femme mais aussi à la sexualité en général : interdiction d'avoir des rapports sexuels hors mariage, interdiction d'avoir une relation homosexuelle au risque de finir dans une camp de conversion, interdiction de pratiquer l'adultère… En fait, cette idéologie se propage jusque dans la sphère privée. D'ailleurs, Jean fait ce constat glaçant : même sa famille adhère à certains principes. Alors que Steven considère l'homosexualité comme anormale et méprise sa mère qu'il relègue au rang de ménagère, Patrick a tendance à appeler "bracelets" les compteurs de mots, comme s'ils n'étaient que de vulgaires bijoux. Pour témoigner de l'aberration de ces idées, je voulais inclure des extrait du "Manifeste Pur", qui faisait état des croyances bien ancrées dans cette société misogyne. Or, je n'ai pu me résoudre à écrire que l'homme était supérieur à la femme et qu'elle lui devait glorification, soumission et obéissance.

Dans son pays devenu sa prison, Jean étouffe et se sent démunie. Indépendante et fière, elle ne peut que se taire et observer sa fille suivre le même chemin qu'elle. du haut de ses six ans, Sonia ne comprend pas à quel point ce "bracelet" est dangereux, capable de l'électrocuter une fois le quota dépassé, même si cela se produit durant un cauchemar. Et c'est cela qui brise son coeur de mère, savoir qu'elle n'a pas les mots pour consoler sa fille quand elle va mal. Ou plutôt qu'elle n'est pas autorisée à les prononcer. Alors Jean va se battre, travailler pour le gouvernement et mettre son cerveau au profit de la science pour obtenir la liberté de Sonia. J'admire sa ténacité, son courage et sa volonté de faire évoluer la situation, quitte à tuer pour y parvenir. Se sachant enceinte, elle aurait pu s'enfuir avec Lorenzo, son amant qu'elle a toujours désiré. Abandonner les siens, renier cette famille qui se complait dans cette servitude volontaire… c'était tentant. Mais c'est mal la connaître. Elle a beau détester son mari et son fils pour encourager cette idéologie, elle ne leur tournera jamais le dos. Face à l'adversité, elle se souviendra des femmes qui ont milité pour le féminisme, notamment de l'extravagante et inspirante Jackie. A bien des égards, je pense que ces deux personnalités incarnent parfaitement les propos de Simone de Beauvoir : "On ne nait pas femme, mais on le devient." Tandis que les hommes tentent de les réduire à ce "sexe faible" qui définirait leur condition, Jean et Jackie s'affirment et revendiquent leur indépendance. Là est tout le génie de ce roman : partir de l'oppression de la femme pour arriver progressivement à son émancipation. C'est le résultat d'une bataille de longue haleine, à l'image de notre société actuelle.

D'ailleurs, si l'idéologie prône la tout puissance de l'autorité masculine, le livre la rend complètement infondée et illégitime. Il suffit de considérer les personnages de ce "sexe fort" et les inepties qu'ils profèrent : entre le Révérend Carl qui clame "que l'homme n'a pas été fait à partir de la femme, mais que la femme a été faite à partir de l'homme", Morgan qui est une tête à claque incompétente et machiste, Steven qui applique à la lettre ce qu'on lui a enseigné sans aucun recul critique, Patrick qui baisse la tête et suit docilement le troupeau… disons que les hommes ne sont pas vraiment présentés à leur avantage. Heureusement qu'il y a Lorenzo, seul "héros" digne de ce nom parmi tous ces lâches. Sauf que non, là encore, on se trompe. Les véritables héroïnes sont les femmes. Jackie la politicienne homosexuelle engagée, Lin à la fois neurolinguiste et chirurgienne de renom, Julia l'adolescente rebelle et sacrifiée, Sharon la résistante noire, Olivia la mère éplorée qui choisit une mort insoutenable plutôt que l'idée de vivre sans sa fille… et surtout Jean, docteure et traîtresse, enceinte de son amant, planifiant la mort des dirigeants. Leur plus grande erreur était de la sous-estimer ; ils voulaient l'empêcher de s'exprimer, alors elle a crié pour se faire entendre.

Seul gros bémol dans cette intrigue passionnante : la fin expéditive et bâclée. On s'attend à ce que Jean fasse un véritable coup d'état, que la parole des femmes soit libérée en fanfare… Sauf qu'il n'en est rien. Dans une vaine tentative de se racheter, Steven part en mission suicide pour sauver sa copine arrêtée par sa faute et Patrick se sacrifie pour éliminer le fléau du "Mouvement Pur" pendant que sa femme s'enfuit en Italie avec l'homme de sa vie. Ironie du sort, c'est l'individu le plus passif qui a sauvé les américains et le plus charismatique qui met les voiles… Franchement, pour ce retournement de situation, j'applaudis (je suis aussi crédible que la qualité de ce dénouement).

Finalement, cette dystopie est-elle réellement une fiction ? Ou simplement une réalité possible, voire masquée ? Je ne connais pas les motivations de l'auteur quant à la rédaction de son roman, mais il est clair qu'on peut l'interpréter comme une satire des Etats-Unis. En effet, la couverture rappelle les couleurs du drapeau et cette politique sexiste s'applique uniquement aux américains. La "Manifest Destiny", croyance selon laquelle la nation avait pour mission divine l'expansion de la civilisation et la conquête territoriale, a été ici remplacée par le texte prônant la suprématie de Dieu et de l'homme créé à son image : le "Manifeste Pur". Enfin, le roman aborde la corruption du gouvernement, avec pour but initial la création d'un remède contre l'aphasie, dissimulant une volonté de provoquer ce trouble de la parole. le Président n'est en fait qu'un incapable nécessitant l'intervention de son bras droit, le Révérend Carl, pour remplir ses fonctions. Alors, "l'American Dream" fait-il toujours autant rêver ?


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L'idée de base est très bonne, on revient un peu sur la mise en place du principe via des flashs backs, mais trop peu à mon goût.

L'histoire finit pas tourner sur du classique, avec de l'amour, du policier, de l'action.

Et la fin est baclée, elle arrive trop vite.

Dommage !
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Ayant eu un vrai coup de coeur pour "La servante écarlate" de Margaret Atwood l'année dernière, c'est avec une grande curiosité que j'ai lu "Vox", une dystopie - j'adore les dystopies - antiféministe dont le postulat de départ est plus qu'intéressant, mais tremblant tout de même à l'idée que ce roman ne soit qu'une pâle copie de celui de l'autrice canadienne.

Jean McClellan est une brillante neuroscientifique lorsque le révérend Carl Corbin prend la direction du pays. Fondamentaliste chrétien, il souhaite remettre le pays en ordre. Les résistants sont envoyés dans des camps de travaux forcés muselés, par des compteurs de mots. Les femmes sont également dotées de compteurs de mots, elles ne peuvent dépasser 100 mots par jour sous peine de recevoir une décharge électrique très puissante. Jean, comme toutes les autres femmes, n'a plus le droit d'exercer son métier, et se retrouve cantonnée dans sa cuisine. Jusqu'au jour où le révérend vient lui demander un service en échange de sa libération pour elle, et sa fille Sonia...

La narration de "Vox" est intérieure. le lecteur entre dans l'esprit de Jean Mc Clellan, condamnée à ne pouvoir prononcer qu'une centaine de mots par jour, en est quasiment réduite au mutisme, et bien loin de pouvoir exprimer ses pensées. C'est une manoeuvre intelligente de la part de Christina Dalcher, car ainsi elle peut partager son opinion implicitement avec le lecteur.

Cette dystopie totalitaire plonge le lecteur dans un monde rigoriste et moyenâgeux effrayant. Limite inquisition. L'histoire fait des retours dans le passé pour expliquer comment cette dictature c'est mise en place rendant les femmes soumises et écrasant les hommes sous le travail. Christina Dalcher, à travers ce récit, aborde des thématiques fortes comme le sexisme et la misogynie, la liberté, la puissance de la parole mais aussi les effets désastreux du laisser-faire et de la passivité, entre autres propos intelligents. (...)
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Je ne suis pas fan des romans d'anticipation mais je me suis laissée tentée par le sujet. Dommage le récit est mal construit : trop de retours en arrière qui nous font perdre le fil.
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Effroyablement génial !
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Lecture termine !! Que dire de vox de @cvdalcher !! Epoustouflant , ce livre ce lis assez facilement bien qu il est des partie un peu compliqué et technique . C est un livre dérangeant qui ne nous laisse pas sans un avis !! Pour ma part ça me laisse un arrière goût de et si..... sans être féministe au plus haut point ce livre m a fais prendre conscience qu une société peut être vite fais manipulé et vendu à une idéologie plus que douteuse !!! Alors mesdames agissaient pour que jamais vox ne soit une réalité !!!
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En voilà une histoire qui fait froid dans le dos !

Amis de l'obscurantisme bonjour ! Ça rappelle un peu La servante écarlate ou aussi 1984 de Orwell.

Dans une société occidentale (on se refuse à croire qu'il s'agit des États-Unis, et pourtant...) un parti religieux accède au pouvoir et les femmes se retrouvent muselées avec seulement 100 mots autorisés par jour, et en cas de dépassement une punition terrible.
L'histoire est extrêmement oppressante et on se rend compte à quel point cet interdit est comme un lourd handicap, parce qu'on parle naturellement comme on respire et que ne pas parler c'est comme être en apnée... et cet interdit terrible atteint finalement les hommes qui partagent la vie de ces femmes écrasées, humiliées.

Roman captivant, riches en émotions qui vont crescendo jusqu'à l'épilogue.
Des livres d'une telle intensité, j'en voudrais tout le temps !!!
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