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L'appel du cacatoès noir à été écrit en 2009 par John Danalis. Il vient d'être édité et traduit en français par une petite maison d'édition Marchialy.
John Danalis est un auteur et illustrateur australien.
C'est son premier récit traduit en français.
Nous sommes dans le récit, dans un récit de restitution.
Depuis 40 ans John Danalis a grandi avec un crâne posé sur une étagère dans le salon de ces parents. La famille a même donné un nom à se crâne Mary.
C'est seulement à 40 ans que John Danalis comprend l'horreur de la situation.
Ce crâne appartient à un aborigène. Son père, vétérinaire, a longtemps parcouru le bush pour soigner les troupeaux.
Lors de l'une de ses visites , à Swanhill, le père de John Danalis avait découvert les fours de campement ou coquilliers de plus de deux kilomètres de long. Ces coquilliers fournissaient un matériau bon marché, à drainage rapide, pour confectionner des revêtements de route. Des coquilliers entiers, qui souvent comprenaient des sites funéraires, furent excavés et convertis en route de campagne.
Le crâne de Mary vient de là.
Sa prise de conscience faite, John Danalis n'à plus qu'une obsession : rendre Mary à son peuple.
Ce récit va nous permettre de suivre John Danalis dans sa recherche de l'histoire ancienne de l'Australie.
Cela ressemble à une quête avec des rencontres, des certitudes qui vacillent et de profonds changements dans la vie de l'auteur.
Pour nous lecteurs c'est la découverte du monde aborigène, de leur cosmogonie désigné sous le nom de Temps du Rêve. C'est le rappel que ce peuple indigène à été spolié de ces terres et de la mémoire des anciens.
Que penser des musées qui dans leurs réserves conservent des centaines de milliers d'ossements ainsi que des milliers de lancés aborigènes.
De jeunes aborigènes ont repris le flambeau et partout où ils le peuvent, ils mettent en place des cérémonies de réenterrement des ossements de leurs ancêtres. Sans haine, sans vengeance mais avec des remerciements pour les personnes qui permettent ce retour en Terre aborigène.
Le crâne de Mary est retourné en terre aborigène après des cérémonies d'une grande émotion.

Yangurr waletya waletya ati
Werreka aty lar
Kayi kuthup
Yangurr waletya waletya ati
Ngaliyuk wawimpa kutnyuk
Werraka aty lar kumba
Nguteyuk kurruk pa yemin yemin
Kayi kuthup kayi kuthup kayi kuthup

Nous venons à toi, nous nous présentons à toi
Pour te ramener au pays
Je suis désolé
Nous venons à toi, nous nous présentons à toi
Notre frère, notre soeur
Pour te ramener au pays, reposer et dormir
Ton pays et lieu de ta sépulture
Je suis désolé, je suis désolé, je suis désolé

WARPA WOY
Chant de réenterrement
Jida Gulpilil.

Un récit qui m'à touché par sa simplicité, sa sincérité.
Un récit qui nous parle d'ouverture, de recherche de la différence.
Un récit qui nous parle de nos racines à chacun.

"Je me sentais juste bien. Comme si j'étais à ma place. Comme si j'étais rentré au pays"

Cette plume de cacatoès noire, animal totem pour les aborigènes Wemba Wemba est venu jusqu'à nous.
Si vous la rencontrer dans une libeairie ou une médiathièque, faites lui une petite place.

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Direction la terre rouge Australe avec une aventure originale estampillée Marchialy.

Comme toujours Marchialy dégote et édite avec soin des témoignages précieux. Ici la tentative de rédemption d'un auteur qui cache un secret familial édifiant.

Une histoire d'accumulation de babioles opérée par le paternel, véto de campagne amoureux de d'objets en tout genre, il ramène un peu de tout à la maison, antiquités, curiosités, matériel agricole d'un autre temps, parmi cette collection hétéroclite se trouve un objet un peu moins conventionnel : un trophée colonial humain.

Notre narrateur a donc vécu en compagnie d'un crane d'aborigène dans son salon depuis sa plus tendre enfance. Et lâche un jour l'odieux secret lors d'un cours universitaire auquel il participe en tant qu'étudiant, choqué ses congénères lui font réaliser l'énormité de la chose. Va s'en suivre une prise de conscience subite et une quête de restitution.

A la manière du Cacatoès rouge, animal totem de l'auteur, le récit évolue. Ailes noires fermées et rapprochées comme l'oiseau, l'auteur garde son secret. On voirait presque cette crête crâneuse qu'hérissent souvent les volatiles.
Vient ensuite la prise de conscience de l'aspect sordide de la possession de ce triste trophée, c'est le rouge vif sur les plumes de l'oiseau, rappelant l'origine violente associée à ce reste humain, intimement lié au massacre systématique, voire systémique de la population aborigène, Exterminer un peuple, détruire sa culture et briser ses liens pour mieux lui voler sa terre. Phénomène tristement récurrent quelle que soit l'époque coloniale.
Puis il y a l'envol du cacatoès, après avoir pris suffisamment d'élan, de recul sur la situation, on a toute la superbe d'un oiseau aux ailes déployées, l'écriture du passage intermédiaire luit d'une belle intensité grâce a une expression de haut vol avec des passages aisés et tout à fait pertinents et d'autres un peu allumés.
Et puis il y a la phase descendante, une fois après avoir plané en altitude, le retour peut être difficile. Réaliser l'horreur de l'histoire et la culpabilité du peuple blanc dans l'extermination d'un peuple indigène plusieurs fois millénaire. J'ai moins apprécié car trouvé un peu gros la rédemption d'une famille et la guérison de l'auteur faite au travers de cérémonies et de pratiques culturelles aborigènes. Comme si la dernière partie du récit avait été trempée dans une saumure spéciale bouquin de développement personnel.

Cet ouvrage m'a rappelé l'incontournable quête de trophée dans le voleur de plumes, aussi tragique pour les espèces qui côtoient l'homme et Les Fossoyeuses, oeuvre plus sombre sur le devoir de mémoire et l'importance de restitution des restes humains.

Une trame solide d'intensité de témoignage et d'exotisme dans le choix de provenance des publications rassemble en tout cas l'intégralité des publications de cet éditeur que j'ai pu lire et que je prends beaucoup de plaisir à collectionner.





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Je remercie énormément Babélio et les éditions Marchialy pour l'envoi, dans le cadre d'une masse critique privilégié, du roman : L'appel du cacatoès noir de John Danalis.
John Danalis a grandi avec un crâne aborigène dans son salon. C'est seulement à 40 ans, alors qu'il suit un cours de littérature indigène, qu'il comprend l'horreur de la situation.
Emporté par l'élan de sa prise de conscience, John décide de tout mettre en oeuvre pour restituer Mary - puisque c'est ainsi que le crâne a été affectueusement renommé - à son peuple.
Pour cela, il va devoir déconstruire ses préjugés d'homme blanc sur la culture aborigène et se plonger dans l'histoire ancienne de l'Australie.
Commence alors une quête qui va entraîner des rencontres extraordinaires et une profonde révolution dans la manière dont John et sa famille envisagent la vie et leur rapport aux autres.
J'étais très curieuse de lire L'appel du cacatoès noir. Je ne savais pas trop à quoi m'attendre, et au début ce fût une très bonne surprise. John, le narrateur, reprend ses études à l'âge de 40 ans. Il décide de suivre un cours sur la littérature indigène et se vante d'avoir eu un crâne humain dans son salon, quand il était enfant ! Ce qui était censé être drôle ne l'est évidemment pas et choque certains étudiants ! Alors John, mal à l'aise, se rend compte que posséder un crâne humain aborigène a toujours été normal pour lui.. alors que cela ne l'est pas vraiment ! Mary (c'est ainsi que se nomme le crâne de cet homme) fait partie de son quotidien. Mais il est temps que le crâne retourne parmi les siens, John en a conscience et décide d'affronter son père pour récupérer Mary.
Commence alors tout un périple pour rendre le crâne.
Au début, donc, j'ai trouvé ça captivant. J'ai pris plaisir à suivre le raisonnement de l'auteur, sa prise de conscience, son envie de faire bouger les choses, de les remettre à leur place.
Et puis soudain, allez savoir pourquoi, j'ai décroché. Les pages se tournent et en fait c'est un peu plat, il ne se passe pas grand chose.
John m'a laissé assez indifférente, par contre il y a de très bons personnages secondaires qui apportent un peu de piquant.
J'ai été surprise que les australiens connaissent si mal l'histoire du peuple aborigène. J'avoue que je n'y connais pas grand chose, mais je n'habite pas en Australie ! Si j'y habitais, je m'intéresserais à ce qui s'y passe et à l'histoire de ce pays.
L'appel du cacatoès noir est un roman intéressant qui permet de découvrir la culture aborigène, leurs us et coutumes. Mais il aurait pu un peu plus creusé, et surtout par moment j'ai trouvé le raisonnement de l'auteur un peu simpliste.
Ce n'est pas désagréable à lire, loin de là, mais je ne suis pas certaine d'en garder un immense souvenir.
Vous l'aurez compris, mon avis est assez mitigé, d'où le trois étoiles et demie.
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Le récit commence lorsque John Danalis, éternel étudiant australien, à quarante ans, décide que sa voie est l'enseignement, et va suivre un cours sur la littérature indigène, cours qui comprend entre autre une partie sur les Aborigènes d'Australie. C'est lors de ce cours qu'il déclare, effarant tous ses camarades de classe, qu'un crâne aborigène surnommé « Mary » trône sur une étagère dans la maison de ses parents.
Vivant depuis son enfance dans un milieu blanc qui distille des propos à tendance raciste et méprise ceux qui aiment les Aborigènes, cela ne l'avait jusqu'alors pas choqué, ce crâne, pas plus que les outils ou objets anciens que son père collectionnait. Une prise de conscience s'ensuit, elle l'amène à vouloir rendre ce reste humain à sa communauté d'origine.

Attention, voici un livre très prenant ! Il représente exactement tout ce que j'attends d'un récit nourri de faits réels. Tout d'abord, un sujet original et un angle très personnel pour l'aborder. Ensuite, une attention portée aux personnes et aux détails de leur existence qui permet de bien s'imprégner du sujet. Enfin, une légère dose d'humour ou d'autodérision, ingrédient non négligeable. J'avoue aussi que l'objet-livre en lui-même m'a attiré comme un aimant dès que j'en ai vu la couverture !
Ce texte est très éclairant au sujet du racisme et des épisodes historiques de génocides d'Aborigènes en Australie. Tout Australien blanc les méconnaît forcément, tant cette partie de leur histoire est occultée. L'auteur, rencontrant des Aborigènes très concernés, apporte aussi beaucoup de précisions sur les cérémonies de rapatriement des restes humains, détenus auparavant par des particuliers comme dans le cas de John, ou par des musées étrangers.
Le plus passionnant reste la prise de conscience de John Danalis de tous les clichés sur les Aborigènes trimballés depuis son enfance comme des bagages peu encombrants, et qui lui font honte tout à coup. Passionnantes aussi sont ses rencontres avec des membres de la communauté Wamba Wamba. Je ne vous raconte pas tout, notamment le rôle du cacatoès, ou pourquoi le narrateur sombre dans la dépression, et finit par en sortir.
L'ensemble, avec son style direct et fluide, se lit comme un roman, presque d'une traite !


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"......quelqu'un -  mon oncle, en fait - l'a offert à mon père quand j'étais bébé. J'ai grandi avec, il a toujours été là."
"Il", c'est ...un crâne d'aborigène trouvé dans un chantier, et conservé depuis sur les étagères de la maison. Macabre pour vous et moi...mais ce n'était pas un  problème moral pour les parents de John Danalis.
Non ce n'est pas un roman, mais une histoire personnelle que John Danalis va partager avec ses lecteurs. Une histoire racontée au jour le jour entre septembre 2005 et avril 2006, et replacée dans le contexte culturel de l'Australie.Rares sont les livres qui évoquent cette culture australienne.
Beau cadeau offert par Babelio
Vous l'ouvrez, quelques lignes...trop tard, je ne pouvais plus reculer, j'ai été ferré ! Diable d'homme! Oui John vous m'avez pris à l'hameçon...je n'avais pas envie de me débattre, j'étais si bien à vous suivre!
Mary fait partie, depuis bien longtemps de la vie de la famille de John
L'oncle,  comme le père travaillaient dans les grandes fermes du bush  australien. Tous deux  étaient vétérinaires-associés et soignaient le batail. Dans ces fermes ils recevaient des cadeaux, dont ils ne percevaient pas toujours, toute l'importance, et collectionnaient tout ce que les fermiers pouvaient trouver sur leurs terres en creusant une tranchée, en arasant un tumulus....des déchets. Dehors comme à l'intérieur, la maison familiale regorge de ces restes aborigènes.
S'approprier  ce passé aborigène fait partie de la culture de conquête de ces fermiers.
Le père de famille a protégé  le crâne en le peignant avec du vernis, ce qui lui donne, depuis, une teinte jaunâtre presque fluo, il a collé le crâne avec de l'Arladite sur un morceau de bois afin qu'il ne bascule pas en arrière. Mary de temps en temps faisait rigoler la famille quand on lui calait une cigarette à l'emplacement de la dent cassée rituellement alors que Mary courait la brousse. Les gamins mettaient des lampes à l'intérieur "....la suprême lanterne d'Halloween", mais à part ça il "n'a jamais été raillé ou ridiculisé" . Et Mary a été abandonnée au fond d'un placard.
Mary est l'un ces nombreux restes trouvés sur les sites rituels.
Pour la famille de John, ce crâne s'est toujours appelé Mary, et ils ont continué à l'appeler ainsi, même quand ils ont su que c'était un homme. Un homme dont le cerveau avait été détruit par la syphilis apportée par les conquérants.
John vivait très bien avec Mary. En 2005, il  étudiait afin de  devenir enseignant. Il avait choisit l'option "Littérature indigène", bien que dans sa famille ils ne connaissent pas d'aborigène.
Comme tous les descendants des colons, la famille riait des blagues racistes faites sur les aborigènes...les Noirs, ces "Cons de Noirs inutiles !" comme on disait souvent.
Aussi, c'est tout naturellement qu'il déclara devant ses copains de promotion : "Eh bien....moi j'ai grandi avec un crâne aborigène sur les étagères du salon"  Ce qui causa des réactions horrifiées.
Ces réactions de camarades déclenchèrent un déclic dans l'esprit de John et dans celui de sa famille : Mary n'avait rien à faire sur les étagères du salon familial.
Il commence à se renseigner, à se documenter,  rencontre des membres de la communauté aborigène...qui loin de le blâmer, lui font progressivement découvrir leur culture, leurs rites, lui apprennent que si sa famille a conservé une dépouille, nombreux sont les musées qui, dans le monde, sans aucun état d'âme conservent dans des caves des trésors aborigènes.  Des centaines de milliers de restes sont disséminés dans des collections privées ou publiques....que personne ne veut rendre ! A lui seul le British Museum possède 1570 restes!
Tous, musées comme particuliers les exposent dans des collections ou les conservent dans des coffres ou dans des caves, sans aucun respect du passé ou de ces restes humains.
Ainsi, au contact d'hommes de culture aborigène, John découvre jour après jour une culture dont il ignorait tout ou presque...John apprend...nous aussi nous découvrons cette Australie, si éloignée, ses rites, ses tribus...les conditions de sa conquête, de sa déforestation, de son pillage, les meurtres, les difficiles conditions de vie de ces aborigènes, dont les territoires rétrécissaient.
Les lecteurs ayant lu de nombreux ouvrages sur ce continent, et son histoire sont dans doute rares. Nous connaissons sans doute bien mieux les auteurs africains, ou des États-Unis, voire chinois.
Redonner une sépulture décente, dans le respect des rites traditionnels permet à John de mieux comprendre, d'échanger avec ces Noirs que lui et bien d'autres ne voyaient pas, de faire sauter ses préjugés.
Lui, comme nous lecteurs,  découvrons cette culture originelle, ces hommes de paix, chassés depuis la conquête de l'Australie de leurs terres ancestrales par des groupes miniers, par des agriculteurs, persécutés ...
Même l'Etat australien  contemporain en prend pour son grade !
Avec un peu de bonne volonté, avec un minimum d'ouverture d'esprit, de part et d'autre, il est possible de rapprocher des cultures, de vivre en respectant l'Autre.
Un beau message d'humanité .
Merci à Babelio, qui dans le cadre d'une opération Masse critique privilégiée, m'a permis la découverte de cette culture, de cet humanisme et de cette ouverture d'esprit .Une lecture qui m'a également incité à en apprendre un peu plus sur un autre auteur mentionné par John, un auteur dont je n'arrive pas à trouver un livre, il s'agit de Bruce Elder.
. Il  a écrit "Du sang sur les acacias" ....un livre horrible selon John qui l'a lu. Ce livre qui raconte par le détail les conditions de cette conquête par les européens les crimes et horreurs commis envers les aborigènes.
Oui, John Danalis m'a transmis son besoin d'en apprendre un peu plus sur cette culture aborigène.
John devenu " juste un Blanc qui a appris à écouter, c'est tout."
Un Blanc un peu moins con, un peu moins orgueilleux ! Une leçon à retenir !

Lien : https://mesbelleslectures.co..
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Ce récit m'a passionnée. L'auteur nous raconte comment, en plein cours de littérature aborigène, il annonce qu'il a grandi avec un crâne aborigène dans son salon. Devant les regards horrifiés ou consternés de la classe, il réalise 1. qu'il a gaffé, 2. que ce n'est pas anodin d'avoir un crâne dans son salon. A partir de là, il décide de rendre Mary (le crâne) à sa famille. Et c'est le début d'une lente prise de conscience sur le racisme d'état en Australie, l'image toujours négative véhiculée sur les "noirs", le combat des aborigènes pour se voir restituer les dépouilles de leurs proches étiquetées dans des musées ou utilisées comme cendrier chez des particuliers. L'histoire autour de Mary est très émouvante. L'auteur décrit la situation avec beaucoup de candeur sans omettre ses horribles gaffes. Il se positionne comme l'Australien lambda qui ouvre enfin les yeux sur l'histoire de son pays. Il n'essaye pas non plus de s'approprier la culture aborigène en nous faisant un cours. Il se limite donc à nous décrire son expérience, son histoire et son lien avec Mary. Une super lecture !
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Par où commencer ?
D'un côté, Babélio et les éditeurs, en l'occurrence les éditions Marchialy, font un travail remarquable. de l'autre côté, à l'autre bout du processus, les lecteurs sans lesquels la Grande Machine de l'Édition n'existerait pas sont nourris de ce labeur. Les « masses critiques » de Babélio nous permettent de découvrir des trésors par le plus grand des hasards, mais pour John Danalis le hasard n'existe plus.

Blanc, Australien, John Danalis a fort peu côtoyé les Aborigènes pendant une quarantaine d'années sans connaître à leur sujet autre chose que des clichés. C'est presque par hasard, ce hasard auquel il ne croira plus, à force, qu'il décide de restituer aux siens un crâne que son collectionneur de père avait exposé dans le salon familial et que John a toujours connu.

Avant la prise de conscience que va faire John Danalis, le crâne exposé chez ses parents ne lui faisait ni chaud ni froid.

Cette restitution du crâne, l'imposante cérémonie qu'elle va générer, de nouvelles amitiés avec les Aborigènes vont modifier en profondeur l'existence de John. Il prend conscience de la richesse de leur culture et se met à l'étudier avec passion.

Cela change sa vision du monde aborigène.

Il nous suggère de définir ce qu'est l'Europe en quelques paragraphes : la culture aborigène est tout autant riche et complexe, et elle permet [p 215] « de cohabiter simultanément dans les monde rationnel et spirituel. »

Ce beau récit autobiographique se lit comme un roman, bien écrit, bien structuré, à l'issue duquel on n'est plus la même personne : ce qui est vrai pour John Danalis, au terme d'une véritable quête initiatique, peut le devenir pour vous ou moi.

Pour moi, ce livre est bien plus qu'une occasion de se distraire, ou même de se cultiver. C'est un ouvrage d'une grande importance, il pousse à une prise de conscience et il doit nous ouvrir l'esprit, suivant en cela la démarche de John Danalis. Tous les lecteurs de ce livre ne vont pas nécessairement émigrer en Australie, ni même étudier à fond la culture aborigène, mais peut-être allons-nous manifester plus d'attention bienveillante à l'égard de l'Autre, l'étranger, l'inconnu.

Car nous avons tant à apprendre des Aborigènes. Mais, au contraire, les Européens, imbus de leur soi-disant supériorité, n'ont pas cherché à connaître les « sauvages » quand ils ont exploré l'Australie ; ils ont décidé que leur niveau d'intelligence était fort bas, que le leur était largement supérieur. Aussi valait-il mieux élever les enfants aborigènes en les coupant de leur milieu d'origine.

Je me permets une parenthèse : le vol légal d'enfants s'est pratiqué dans d'innombrables pays, sans oublier la France, où plus de 1 600 enfants réunionnais ont été placés dans des familles de la métropole alors que certains avaient leurs parents vivants entre 1963 et 1982. Ce ne serait pas surprenant de découvrir que cette pratique existe encore ici ou là.

Pour l'auteur, le fait d'enlever de force les enfants à leur famille est un [p118] « génocide culturel et spirituel. »

La suffisance, l'arrogance du Blanc, John ne manque pas de la rencontrer. Alors que les Aborigènes occupent un lieu sacré qu'on veut leur confisquer, une chaîne de télévision privée s'installe en espérant avoir du « bien saignant » à filmer. Les militants gardent difficilement leur sang-froid alors que les journalistes les couvrent d'insultes et de moqueries afin de filmer une séquence sensationnelle.

L'auteur compare ses nouveaux amis et le comportement de ces citadins stressés dont l'existence se poursuit entre nourriture industrielle, embouteillages, course permanente contre la montre.

Internet a changé ma façon de lire : c'est pourquoi je peux vous suggérer de faire les recherches que j'ai faites : en cherchant Gary Murray Australie (d'autres personnes portent ce nom ailleurs sur la planète), vous trouverez la photo de cet aîné du groupe des Wamba Wamba, vêtu de la famuse cape en peau d'oppossum largement décrite par John.

Vous pourrez aussi trouver le portrait fait par Craig Ruddy de David Gulpili, chanteur et danseur, en tapant leur deux noms : ce portrait a tenu compagnie à John, figurant en bonne place dans la chambre d'ami lors de son séjour à Melbourne.

John a cessé de croire au hasard et il le précise tout au long de son texte. Je ne sais pas s'il faut croire au hasard au sujet du cheminement qui a fait tomber son livre dans ma boîte aux lettres. Hasrad ou pas, je vous invite vivement à découvrir cet ouvrage et à le faire connaître autour de vous – et je remercie encore les éditions Marchialy et Babélio.
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«Pourquoi tant d'histoires ? », « Pourquoi toute cette histoire ? », ces phrases si souvent entendues, qui n'ont que l'apparence du questionnement, qui parlent d'indifférence, de désintérêt, voire de mépris, ces phrases qui portent le choix d'ignorer tant de choses importantes, qui ont longtemps requalifié d'anodines les traces laissées par des actes abjects.
C'est une de ces histoires là dont John Danalis nous fait toute une histoire, nous livre tous les détails. Passionnante, réparatrice.
« Le diable est caché dans les détails » dit-on, il s'y niche aussi de belles occasions de prises de conscience, de celles qui travaillent au corps, contaminent le quotidien jusqu'à transformer le cours d'une vie. Cela commence comme de rien, mais c'est toute une histoire.
Je n'en dis pas plus, répondez à l'appel du cacatoès noir pour suivre les pas de ce roman si rafraîchissant en ces temps de braises et de sang.
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Merci à Babelio et aux éditions Marchialy pour ce partenariat.

"De quelle justification as-tu besoin ? Il n'est pas à vous. Ce que ta famille a fait est mal" [...] "Tu pourrais parler de la dignité des morts - regarde la quantité d'efforts que vous autres blancs déployez pour retrouver et rapatrier les soldats tombés sur les différents champs de bataille. C'est pareil".
J'ai voulu commencer ma chronique en présentant cet état d'esprit : on fait tout ce qui est possible pour rapatrier dans son pays d'origine les restes des soldats morts au combat loin de chez eux. On laisse les restes des aborigènes dans des caisses, dans des musées. Au mieux. Je vous laisse imaginer le pire.
Le pire, il est peut-être ici, finalement. John Danalis a grandi avec un crâne aborigène sur l'une des étagères du salon familial sans que cela ne dérange un seul des membres de sa famille. Pourquoi cela les auraient-ils questionné ? C'était un souvenir, un parmi d'autres, ramené par le père, vétérinaire, lors d'une de ses tournées dans le bush. Il a fallu attendre ce que je qualifierai de "crise de la quarantaine", de "remise en question" pour qu'un jour, John formule à haute voix, pendant un cours (il a repris ses études pour devenir enseignant) ce fait et, tout en parlant, tout en se confrontant au regard des autres, prenne enfin conscience de l'énormité de ce fait. le récit autobiographique qui commence alors nous montrera comment il va restituer le crâne à son peuple.
Ce n'est bien sûr pas si simple. John Danalis découvre alors ce que lui et des milliers (des millions ?) d'australiens ignorent : l'existence de nombreuses tribus aborigènes, leur organisation, leurs différents territoires, ou plutôt, territoires qu'ils devraient avoir si les terres leur appartenaient. C'est tout un ensemble de préjugés que John doit combattre en lui-même, et les clichés ont la vie dure. John doit se battre contre l'administration, aussi : à quoi bon rendre un crâne à son peuple ? "Pourquoi s'en soucier ?" comme le demande un journaliste. Il doit également, avant toute chose, demander à son père son accord pour rendre ce crâne - et ce n'était pas forcément pour ce quadragénaire la partie la plus facile.
L'écriture de ce livre apparaît alors comme un moyen de partager, de faire voyager Mary (nom que les Danalis avaient donné au crâne, et tant pis s'il s'est avéré que c'était celui d'un homme) grâce aux mots.
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N° 1533 – Mars 2021

L'appel du cacatoès noir – John Danalys – Éditions Marchialy.
Traduit de l'anglais (Australie) par Nadine Gassie.

Je remercie les éditions Marchialy et Babelio qui m'ont permis de découvrir ce roman.
John Danalis est Australien, blanc, écrivain, et a passé sa jeunesse avec Mary, un crâne aborigène, dans le salon de ses parents. Pour eux ce n'était qu'un élément de décoration et pour lui un jouet original. Un peu par hasard, à quarante ans, en 2005, après un parcours professionnel hésitant, il le retrouve, prend conscience que sa place est au sein de son peuple et fait voeu de l'y rapporter. Ce choix va changer sa vie et celle de ses proches. Jusqu'à présent, pour lui l'Australie c'était le folklore des kangourous et les Aborigènes un mystère, un peuple jamais croisé, tout juste aperçu de loin et dont les membres vivaient parqués dans des communautés. C'est aussi, depuis toujours, un pays d'immigration et de conquête intérieure avec confiscations de leurs terres aux indigènes. Pire, il y a un thème récurent, celui de « la génération volée »qui, à partir de 1814, a consisté à voler les bébés des autochtones pour les placer dans des institutions ou les confier à des familles blanches ; pour nous européens cela rappelle le nazisme de la Seconde guerre mondiale mais cela correspondait à une volonté de perpétrer un génocide culturel et spirituel en même temps que d'en effacer les traces. Pourtant, auprès des Aborigènes locaux et même au sein de la famille de John, son projet de restitution de ce crâne, avec rituels religieux, protocole culturel et autorisations des clans, emporte l'accord enthousiaste de tous. Ce qui n'était au départ qu'une simple intention devient rapidement un événement local avec la présence d'un couvre-chef traditionnel en plumes de cacatoès noir, totem emblématique de la tribu à laquelle appartenait Mary.
Au départ, quand j'ai ouvert ce livre, je me suis dit que j'allais devoir le parcourir par obligation et qu'il allait sûrement me tomber des mains. Pourtant, au fil de l'histoire de John, apparemment un récit autobiographique plus qu'un roman, on découvre petit à petit une foule de centres d'intérêt et ce d'autant plus que le texte est bien écrit et devient passionnant. le lecteur l'accompagne dans un mal-être puis dans une profonde dépression avec de « folles » intentions suicidaires à cause de la prise en compte progressive de faits avérés à connotation xénophobe qui se sont succédé au cours de l'histoire de l'Australie, un peu comme s'il en faisait une affaire personnelle avec l'inévitable culpabilisation judéo-chrétienne qui gangrène nos sociétés et nos consciences. Il nous la présente comme la conséquence directe de cette « rencontre » avec Mary et surtout son histoire et celle de ce peuple opprimé par les colons anglais, arrivés sur cette terre avec l'intention précise d'en expulser les occupants en les massacrants, de prendre leur place et d'y prospérer. C'est le geste ancestral de tous les colonisateurs qui révèle encore une fois le côté sombre de l'espèce humaine, avec en prime un discours moralisateur, altruiste, hypocrite et bien-pensant avec une volonté de civiliser et d'humaniser ces peuples. J'ai cependant du mal à imaginer qu'il ait dû attendre l'âge de quarante ans pour prendre réellement conscience de ce racisme, que ce crâne n'ait été pendant ses années d'enfance qu'un jouet sans qu'il ne pose aucune question à ses parents d'un niveau culturel élevé et que ces autochtones n'ai été qu'un décor lointain. Qu'il dénonce la réponse psychiatrique qui consiste en l'administration de médicaments toxiques, je veux bien le croire, qu'il ne trouve sa guérison qu'en mettant des mots sur ses maux, pourquoi pas si cela fonctionne, encore que j'ai toujours un petit doute sur l'aspect libératoire à long terme de la parole.
Je ne suis pas spécialiste de ce pays mais il me semble que les Aborigènes sont pour lui un problème récurrent, qu'une véritable réconciliation n'est pas possible et que ce qu'à fait John, pour être remarquable, n'en restera pas moins lettre morte. On maintiendra les autochtones dans un état d'infériorité en méprisant leur philosophie et leur culture ravalées au rang de folklore en maintenant leurs restes dans des musées.

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