Citations sur Les héritières, tome 4 : A cause d'un rendez-vous galant (16)
Ils se contemplèrent, haletants.
— Je n’ai pas oublié votre identité, chuchota-t-elle en continuant à passer les doigts dans ses cheveux. Ni la mienne. Elle le vit déglutir. Il resserra les mains autour de ses hanches.
— Vous êtes Piers Brandon, marquis de Granville, diplomate et agent secret au service de Sa Majesté. Elle passa un doigt sur l’inclinaison de son nez patricien.
— Et je suis Charl… Elle poussa un petit cri. Avec la vitesse et la force d’un coup de fouet, il l’avait retournée sur le dos et allongée sur la banquette capitonnée de la voiture.
— Vous allez devenir lady Charlotte Brandon, marquise de Granville, femme de diplomate et mère de mon héritier.
— Comment se fait-il que vous sachiez reconnaître un pistolet Finch ? Elle abaissa l’arme et l’examina.
— La fille de sir Lewis Finch est une de mes très bonnes amies. J’ai passé plusieurs années à Spindle Cove. Spindle Cove. Il se rappela le bref rapport de Ridley. Le lundi, promenade dans la campagne. Le mardi, bains de mer. Le mercredi, c’est jardinage. Le jeudi…
— Le jeudi, c’est tir au pistolet, dit-il.
— Je vois que vous connaissez.
— Je ne vois guère ce que des grognements et des couinements pourraient nous apprendre.
— Eh bien, cela nous procure la certitude raisonnable que les amants étaient une femme et un homme. Et non pas deux femmes ou deux hommes. Il resta bouche bée.
— Ne suis-je pas censée savoir que ce genre de couples existe ? demanda-t-elle. J’ai beau m’être fourvoyée dans l’assemblage du chérubin, je vous rappelle que je suis innocente, mais pas ignorante. Il l’invita d’un geste à poursuivre.
— Je suis tout ouïe. Cette fille lui réservait surprise sur surprise. Il avait hâte d’entendre la suite.
— Je vous en prie, ne m’adressez pas ce regard réprobateur. Je sais que j’ai eu tort, mais j’essaie de me rendre utile. Notre avenir est en jeu.
Ce n’était pas un regard réprobateur. Piers était impressionné. Il savait qu’elle était intelligente, mais il ne lui avait pas prêté des capacités de déduction aussi affûtées.
— En attendant, si vous me parliez de votre chien ?
— Je n’ai pas de chien.
— Je sais que vous n’en avez pas ici. Mais vous devez bien en avoir un quelque part. Tous les gentlemen ont un chien.
— J’ai eu un bouledogue appelé Ellingworth. Je l’ai eu âgé d’à peine deux mois, quand j’étais à l’université. Durant les années que j’ai passées à l’étranger, il a vécu avec mon père ou mon frère. À mon retour de Vienne, c’était un très vieux monsieur ; il m’a reconnu, cependant. Nous avons bien profité l’un de l’autre, mais il est mort l’année dernière. Elle discerna dans son regard une certaine réserve, mais son instinct lui souffla de ne pas insister.
- Je vous demande pardon, s’excusa-t-elle. Je ne voulais pas paraître aussi insensible. Vous n'êtes tout de même pas le dernier homme que je choisirais d'épouser. Je ne suis pas assez idiote pour affirmer une chose pareille. J'ai toujours trouvé ridicules les demoiselles qui prononcent ce genre de phrases. "Le dernier homme sur Terre"? Franchement, avec tous les criminels et les imbéciles qui pullulent sur cette planète... Et même après les avoir éliminés, il doit en rester des millions dont l'hygiène laisse fortement à désirer.