Le fleuve nous parle des rapports que nous entretenons avec lui.
De ce que nous lui devons. De ce qu’il fait de nous. De ce que nous lui faisons subir.
De ce qu’il est. Pas seulement un lieu. Bien mieux qu’un décor. Bien plus qu’un paysage. Avec la faune, la flore, l’eau, le sable, le vent et la lumière.
Est-ce qu’un fleuve, en nous parlant de lui, peut nous parler de nous ? De nos façons de le considérer ? De nos façons de vivre ?
Tu vois, ce que nous a laissé Agathe, c’est peut-être ça. Un des plus beaux moments de notre existence. Et des questions nouvelles.
Lutter ne sert à rien. Essayer de se détendre. Laisser faire. Flotter.
En fait, même après des années, ce que garde une maison, c'est son odeur. Dans celle d'Agathe, c'est vieux bois, cendre froide et herbe coupée, sur un petit fond de salpêtre, comme presque toutes celles de la vallée.
Je voudrais penser comme un fleuve.
Alors voilà.
Nous sommes là.
Sa maison est là, avec ses odeurs et ses souvenirs.
Avec le vent d'ouest sur les prés, avec la lumière sur les bancs de sable et sur l'eau qui file.
Nous sommes là.
Pas elle.
- Vous avez été longtemps ensemble ?
- Je sais pas exactement. Je dirais trois ans.
- Tu "sais pas exactement " ?
- Je sais quand on a commencé... mais j'ai jamais vraiment compris quand et comment on a fini.
- Votre chère Agathe ne m'a jamais dit qui était mon père.
C'est peut être l'un d'entre vous, ou un autre.
D'après ce que je sais de cette période, elle ne s'est privée de rien,
ni de personne.
Sa vie sentimentale et sexuelle était .... Comment dire ?
Eparpillée ?
Disséminée ?
Diluée ?
Mais ils ont raison sur un point, les jeunes : il faut écouter, il faut comprendre. Et pour comprendre, il faut sentir les choses.
L'avion ..
nous aurons vu ce mode de transport
comme un fantasme, puis comme une banalité.
Maintenant, c'est une honte.
Ton problème, c'est peut-être que tu opposes sans arrêt tes émotions et ta raison.