Le monde est tout, l'individu rien. Est-ce que nous comprenons bien ça, tous ? (p107)
Tout l’enjeu des vacances c’est de les vivre sur le mode de l’exception. C’est toi qui me l’as dit. De garder en tête les temps forts, les moments et les heures mémorables.
- Mais tu es bien content avec cet écran. Tu l’aimes, ton écran.
- Il m’aide à m’abriter du bruit.
Diane se rendit compte alors que Martin était en train de parler, mais pas forcément à elle.
"Je regarde dans le miroir, et je ne sais pas qui je regarde, disait-il. On dirait que le visage qui me regarde n'est pas le mien. Et pourquoi devrait-il l'être, d'ailleurs ? Est-ce que le miroir est une surface réfléchissante sincère ? et est-ce que c'est le visage que les autres voient ? Ou s'agit-il de quelque chose ou de quelqu'un que j'invente ? est-ce que c'est le médicament que je prends qui libère ce second moi ? Je regarde ce visage avec intérêt. avec intérêt et un certain désarroi. est-ce qu'il arrive à d'autres gens de faire ce genre d'expérience ? Nos visages. Et que voient les gens qui marchent dans les rues quand ils se regardent ? Est-ce la même chose que ce que je vois moi ? Toutes nos existences, tous ces regards. Ces gens qui regardent. mais qui voient quoi ?"
(p.50)
Comment s’appelle le stade ? Il tire son nom de quelle entreprise ou de quel produit ?
"Personne ne veut l'appeler Troisième Guerre mondiale mais c'est bien de ça qu'il s'agit", déclare Martin.
Apparemment tous les écrans sont devenus noirs, partout. Que nous reste-t-il à voir, à entendre, à ressentir ? Un petit nombre de gens choisis dispose-t-il d'une espèce de téléphone implanté dans le corps ? Grave question, dit le jeune homme. En guise de protection contre le silence planétaire qui appose son sceau sur nos heures, nos minutes et secondes ?
"La seule chose à faire c'est de prendre la mesure de la situation, dit-il. Quoiqu'il y ait dehors, nous sommes toujours des personnes, les fragments humains d'une civilisation".
Il laisse l'expression planer. Les fragments humains.
Puis l' écran devint noir. Max appuya sur le bouton marche. Marche, arrêt, marche. Lui et Diane vérifièrent leurs téléphones. Morts. Elle se dirigea vers celui de la maison, la ligne fixe, une relique sentimentale. Pas de tonalité. L"ordinateur portable: inerte. Elle s'approcha de l'ordinateur dans la pièce d'à côté, actionna deux ou trois commandes au hasard mais l'écran resta gris.
"Oui, je me tais bientôt, mais avant, je citerai une phrase perdue dans "Finnegans Wake", ce livre que je lis par intermittence, ici où là, depuis toujours j'ai l'impression. La phrase est restée bien à l'abri dans le coin de cerveau adéquat, "en conserve", l'expression irait bien. "Avant que le sacristain ferme la porte". Une dernière chose à dire. A mon adresse, cette fois : "Ferme-la, Diane.""