Le Peintre graveur illustré, tome 29 : Honoré Daumier (10)

ÉPILOGUE (9 novembre 1929)
Aujourd'hui même où, pour commémorer ce deuxième anniversaire, des amis fidèles se sont réunis, de corps ou de pensée, autour de la tombe de Loys Delteil, la dernière feuille de son Daumier sort de la presse. C'est une tristesse que l'auteur n'ait pas eu cette récompense de voir son oeuvre ainsi offerte au public telle qu'il l'avait édifiée. Mais c'est aussi un réconfort que ces derniers fruits de son labeur écrasant aient été pieusement recueillis et que le bon ouvrier soit désormais assuré de se survivre tout entier.

Les titres attestent l'évolution du goût de l'auteur, en même temps que sa liberté d'action enfin conquise. Ce n'est pas seulement la gravure originale qui a pris définitivement le pas sur l'estampe de reproduction : parmi les peintres-graveurs,il va non pas vers les virtuoses et les purs techniciens, mais vers les véritables artistes, et, pour tout dire, vers les maîtres.

Daumier n 'est pas seulement le plus puissant des comiques et le plus vigoureux des pamphlétaires. On ne trouve pas seulement, dans son oeuvre, quarante ans de l'histoire politique et quarante ans de l'histoire des mœurs, mais aussi la source où se sont abreuvés tout l'art et toute la littérature réalistes.

Rien n'est moins livresque que son savoir. Bien avant que d'écrire, il a manifesté le besoin de manier la pointe du graveur ou le crayon du lithographe et il a acquis par là une connaissance intime de l'oeuvre graphique qu'aucune autre discipline ne saurait remplacer.