Difficile de faire une critique différente pour le Ramayana et pour le Mahabharata, dont j'ai lu l'édition de
Serge Demetrian, qui permet au profane que je suis en histoire hindoue d'entrer dans cette culture/religion pour la comprendre de l'intérieur. Voici néanmoins quelques éléments spécifiques au Mahabharata, en complément de ma critique du Ramayana.
Dans ce tome l'histoire tourne autour de l'aversion extraordinaire que porte Duryodana (ainé des Kaurava) pour ses cousins, les 5 frères Pandava. La jalousie, qui atteint rapidement tout le clan des Kaurava (sauf leurs parents : le roi Dhritarashtra et sa femme), est née du fait que les Pandava accomplissent des exploits et sont vertueux à tout point de vue, pourtant sans s'en glorifier.
Tous ces cousins sont pourtant issus de la lignée de Bharata, mais malgré la sagesse et la vertu dont font preuve les Pandava, cette situation conduit à une guerre entre les Kaurava et les Pandava. Leurs alliés communs, y compris parmi leurs proches, devront faire un choix dans ce conflit, forcés par la nécessité de participer à cette guerre.
Menés par Arjuna, l'un des frères Pandava, et aidés par Krishna, incarnation de l'être suprême Vishnu, les Pandava gagnent cette guerre qui aura éliminé une grande partie des membres de la famille.
On rapproche souvent l'oeuvre d'
Homère (l'Illiade et l'Odyssée) de ces 2 oeuvres. En effet le Ramayana oppose les hommes et les démons dans une quête des hommes pour récupérer la femme de Rama, tout comme l'Illiade qui met en scène une guerre liée à l'enlèvement de Hélène, la femme d'Agamemnon. le Mahabharata est le récit d'une grande guerre entre 2 clans d'hommes, tout comme l'Illiade qui oppose Troyens et Grecs. Dans les 4 épopées, les héros (parfois des demi-dieux, enfants de dieux et de mortels), sont aidés par les dieux, durant la guerre. Ces épopées sont à l'origine des mythes fondateurs de la culture latine d'un côté et indienne de l'autre.
Mais le rapprochement s'arrête là. Tout comme dans le Ramayana, il est question dans le Mahabharata de la recherche de la vertu, de la sagesse dénuée de toute passion. Il s'agit de libérer son âme de toute pulsion comme la vengeance (alors que c'est au coeur de l'oeuvre d'
Homère) pour que l'âme puisse réintégrer le Vishnu (symbole du Brahman ≈ l'Absolu) et arrêter son cycle de réincarnation sur terre (il n'en ait pas du tout question dans les oeuvres d'
Homère).
La morale du Mahabharata est profondément ancrée dans l'hindouisme et le bouddhisme. Les plus vertueux rejoindront les dieux, dans les cieux, voire atteindront l'Absolu, quand les âmes des moins vertueux se retrouveront à errer en enfer et/ou être réincarnées à l'infini sur terre. Cette sentence est illustrée à la fin du récit, on pourrait même parler d'épilogue, quand Yudisthira (l'ainé des 5 frères Pandava et le plus sage) se retrouve à monter aux cieux, et à rendre une petite visite aux âmes errantes dans les enfers (ce passage m'a d'ailleurs rappelé «
La divine comédie » de
Dante Alighieri).