Des préceptes du bonheur en trois étapes aux outrances d'une psychologie vulgarisée jusqu'à l'ineptie, en passant par les grandes vérités monolithiques des religions, Louise avait le prêt-à-penser en horreur. La nuance, le détail, la dissonance, le lapsus, la couleur d'une émotion, l'écho d'un mot, la vibration d'un silence, l'éclat d'un regard... toutes ces choses, mises bout à bout, voilà ce qui faisait une vérité : unique, non duplicable, relative.
La magistrate avait tenu à faire le déplacement, mais semblait aussi à l'aise dans cet environnement qu'un pingouin juché sur des patins à glace.
Flaubert opina. Après plus de quinze ans d’investigation, son équipe était enfin parvenue à identifier le tueur. Lorsqu’ils avaient donné l’assaut chez lui, les enquêteurs avaient découvert le cadavre décomposé du Thanatopracteur. Ultime pied de nez à la justice, l’homme était mort d’une crise cardiaque à son domicile.
ce constat était terriblement déprimant, leur rappelant que le mal répercute son écho bien longtemps après le premier coup porté…
Elle avait pressenti que, derrière la façade proprette des Bellegarde, se jouait la partition dysharmonique d’un drame intra-familial.
le mal répercute son écho bien longtemps après le premier coup porté...
Louise sentit un frisson la parcourir : cette femme n’était ni plus ni moins que la vingt-deuxième et dernière victime du tristement célèbre tueur en série nommé par les médias le Thanatopracteur.
– Oui. Quarante-trois ans, mère de six enfants, infirmière-chef, retrouvée au cœur des Baronnies, à deux pas d’ici, répondit Louise. La SR de Toulouse a récupéré l’enquête puisqu’elle était en charge du dossier du Thanatopracteur. Et elle a récemment bouclé l’affaire, comme le titrent les journaux depuis deux semaines.
Louise sentit un frisson la parcourir : cette femme n’était ni plus ni moins que la vingt-deuxième et dernière victime du tristement célèbre tueur en série nommé par les médias le Thanatopracteur.
La main descend lentement vers l’entrejambe. D’autorité, elle effleure l’intimité encore glabre, elle palpe délicatement, elle touche, elle caresse. C’est une main qui sait.
– Tu dis que tu aimes le Christ…
La main glisse, va et vient, douce et ferme à la fois.
– Cependant… tu mens, sale môme. Je sens d’ici l’odeur du vice.
Le souffle est dans l’oreille, lui aussi caressant, mais pourtant glaçant.
– Ton corps n’est pas le temple du Christ…
Une lame grince, proche, et le souffle se pose sur la nuque. Après lui, un temps suspendu que ne rompt même plus le tic-tac de l’horloge, parce que les oreilles bourdonnent de terreur.
– … Je… je préfère… le Christ…
Tac. Tac. Tac. Tac. Tac.
– La tête raisonne bien… mais que dit le corps ?
La grande main surgit dans le champ de vision et se pose sur le ventre qui se pétrifie. Les muscles qui se tendent, la peau qui se rétracte, l’abdomen qui se rentre comme pour s’échapper, tout cela ne l’arrête pas. Non. Au contraire, la main n’hésite pas. Elle tire d’un coup sec sur la chemise et se faufile dessous. Quand elle rencontre la peau, elle est étrangement chaude et douce.
– Tu préfères le Christ, vraiment ?… Vérifions ça.