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Citations sur Espace fumeur (73)

À peine la cigarette allumée, voici qu’on crache, tousse, suffoque. Un sursaut surprend l’esprit et bloque les mouvements. L’aventure tourne court. Dans une poche discrète de son sac, on cache le paquet. Pendant un temps, on tourne autour, repoussant sa découverte au lendemain, puis à la semaine suivante.
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Le filtre, supposé absorber tout ce que la fumée comporte de dangereux, paraît plus dangereux encore que le tabac enroulé : c’est lui, le caoutchouteux ; c’est lui, dont semble suinter le poison ; c’est lui, surtout, qui aura raison de l’oblongue tête blanche.
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On ne devient pas, à proprement parler, fumeur, au moment de sa première cigarette, mais du premier sermon. Le rite d’initiation est de sentences davantage que de pétun ; c’est un mécanisme de phrases et non de bouffées nicotiniques. Sous la confidence d’un buisson, dans l’intimité d’une venelle, entre les deux poubelles d’un local, dans l’obscurité d’un square, la découverte du tabac est toujours balbutiante.
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Il ne se reconnaît pas dans le miroir que lui tend la science. Il ne peut s’empêcher, surtout, de se sentir lui-même exclu des systèmes de discours qui portent sur sa propre situation. Son silence lui paraît n’être rien d’autre que la condition de possibilité de ce qu’on pourra dire de lui, si bien qu’il se verra condamné à dériver, comme ballotté par un arsenal de mots, d’un langage à un autre (incitations d’un camarade fumeur dans une cour de lycée, remontrances parentales, exhibition cinématographique de la beauté du tabac, experts interviewés à la télévision pour faire de la prévention, législations, campagnes publiques, conseils d’un ami sevré, récits sur un grand-oncle mort d’un cancer du poumon…).
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Morale de l’histoire, selon Pierre Louÿs : le nec plus ultra de notre civilisation ne réside ni dans la philosophie, ni dans l’architecture ou la littérature – mais dans la cigarette, trésor de la modernité.
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Le fumeur invétéré ne cherche pas à défier la science : il n’y a, dans son attachement à la cigarette, aucune forme de scepticisme à l’égard des recherches quant aux dangers du tabac. S’il le pouvait, il se conformerait pleinement aux injonctions des médecins, et renoncerait à son vice4. S’il le pouvait, dis-je, car il ne le peut pas5. L’époque et ses discours le convainquent sans le plier. Il dit avoir tort et refuse d’entendre raison.
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" Ce n’est pas Descartes, c’est Parménide qui a dit que la pensée était identique à l’être. Ce n’est pas Kant, c’est encore Parménide, qui a dit que la pensée était identique à son objet. "La découverte de l’Amérique ? Fumisterie ! C’est Aristote qui eut l’idée, en premier, de regagner les Indes par l’ouest. Et Callistô de soutenir : « La gloire d’une découverte revient au cerveau qui conçoit et non à l’ouvrier qui exécute. » M
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Les femmes continuent de composer leur vêtement à partir de la laine, du fil et de la soie ; leurs bijoux sont toujours d’or et d’argent ; et la volupté, quels progrès a-t-elle accomplis depuis son invention ? Aucun. Car Callistô ne croit pas à la défaite des valeurs, ni à la dévastation de la société, mais à la perte de la création. Les innovations ne l’impressionnent pas. Si le futur se contente de remodeler les reliques que le passé lui a léguées, à quoi bon laisser le temps s’écouler ? À quoi bon laisser l’histoire s’écrire, elle dont on pressent les aventures dès le premier chapitre ?
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Qui est le fumeur invétéré ? Quand on l’interroge sur son addiction, s’il ne fuit pas le sujet, il répond généralement en se faisant le ventriloque d’une mauvaise conscience désespérée : « je sais bien que je ne devrais pas, que ce n’est pas raisonnable », « il faudrait que j’arrête, c’est idiot ». Le plus souvent, il prononce ces phrases avec un détachement de la voix qui ne peut que laisser perplexe : ce n’est pas qu’il ne croit pas à ses propres paroles, ce n’est pas non plus qu’il y adhère.
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Certains l’affectionnent, d’autres la supportent avec résignation, comme si c’était elle qui se glissait entre leurs doigts, s’allumait spontanément et se faufilait parmi leurs bronches en décomposition. Mais tous ont entendu quels étaient ses dangers. Tous entretiennent un mal dont ils connaissent, par cœur, chacune des conséquences. Ils discernent leur servitude et non seulement ne s’en évadent pas, mais honorent, mais maintiennent, mais solidifient leur joug.
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