Les grands-parents maternels de
Sonia Devillers sont des Juifs de Roumanie qui ont quitté leur pays en 1961 pour venir s'installer à Paris. L'ouverture des archives roumaines après la chute des régimes communistes d'Europe de l'est a permis à l'historien
Radu Ioanid de révéler dans quelles conditions s'est faite l'exil des Juifs de Roumanie. Une révélation choquante qui a incité l'autrice à écrire l'histoire de ses grands-parents, des gens qui firent partie de la bourgeoisie intellectuelle de Bucarest et qui n'attachaient aucune importance au fait d'être Juifs.
Les lectures entreprises par
Sonia Devillers pour rédiger ce récit l'ont amenée à découvrir le sort fait par l'État roumain aux Juifs pendant la seconde guerre mondiale. Juifs roumains mais aussi ukrainiens sous l'occupation de l'armée roumaine en 1941. Il est question de massacres d'une violence inouïe. Pourtant, de ses grands-parents, témoins et survivants, l'autrice n'a jamais entendu sur cette période que des anecdotes sans émotion. Elle interroge cette volonté de silence et d'oubli.
Après la guerre Gabriela et Harry Greenberg deviennent Gabriela et Harry Deleanu adhèrent au PC mais ils en sont exclus en 1959. Bientôt la situation de la famille devient intenable, il faut émigrer. C'est alors que la petite histoire des Deleanu croise à nouveau l'histoire plus large des Juifs de Roumanie. Entre 1958 et 1989, le pays a en effet « vendu » ses Juifs. Un marchand de bestiaux britannique, Henry Jacober, Juif lui-même, échange des visas contre vaches, brebis, cochons et machines agricoles. Les candidats à l'exil, qui sont majoritairement Juifs, paient très cher au passeur ces autorisations de sortie. Ce trafic, organisé secrètement au sommet de l'État, a pour objectifs de permettre le développement de l'agriculture roumaine, sinistrée par la collectivisation des terres, et de débarrasser le pays des Juifs, considérés comme des éléments cosmopolites.
J'ai apprécié la lecture de cet ouvrage que j'ai trouvé facile d'accès.
Sonia Devillers a fait là, il me semble, un bon travail de vulgarisation. Sur la shoah en Roumanie j'ai retrouvé ce que j'avais déjà lu dans Les Oxenberg et les Bernstein et surtout dans
Eugenia. Comme
Lionel Duroy,
Sonia Devillers s'est appuyée sur le journal de
Mihail Sebastian. Par contre j'ignorais totalement cette histoire fantastique de l'exportation des Juifs par le régime communiste qui a achevé, dit l'autrice, l'oeuvre des fascistes : la Roumanie est devenue un pays sans Juif.
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