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Citations sur Le peu de monde (suivi de) Je te salue jamais (57)

JUNGLE


Matin et toutes choses au monde
posées
à la distance idéale du duel.
On a choisi les armes,
toujours les mêmes,
tes besoins, mes besoins.
Celui qui devait compter un, deux, trois, feu
était en retard,
en attendant qu'il vienne
assis sur le même bonjour
nous avons regardé la nature.

La campagne en pleine puberté,
la verdure se dévergondait.
Loin des villes Juin poussait des cris
de sauvagerie triomphante.
Il sautait s'accrochant
de branche d'arbre et de sensations
en branche d'arbre et de sensations,
Tarzan de court métrage
pourchassant des fauves invisibles
dans la petite jungle d'une histoire.
La forêt promettait des oiseaux
et des serpents.

Abondance venimeuse de contraires.
La lumière tombait catapulte
sur tout ce qui n'était pas lumière,
et la splendeur érotomane dans sa fureur
embrassait même ce qui n'était pas l'amour,
et jusqu'à ton air morose.

Dans la petite église personne
à part son nom pompeux, Libératrice.
Un Christ affairé comptait
avec une passion d'avare
ses richesses :
clous et épines.
Normal qu'il n'ait pas entendu
les coups de feu.

p.34-35
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… Ce que j’ai oublié de vivre
je l’offre à la négligence d’autres.
Je ne peux tout soulever d’une main.
L’autre tu l’as gardée en souvenir.
De l’instant où tu l’as éternellement lâchée.
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Je saisis l’occasion
pour me hausser sur la pointe des étés
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Choses nouées



Excursion
extrait 3

À Nauplie encore un bateau blanc.
Pas tout à fait bateau et pas tout à fait blanc.
Mettons que tu existes.

Laissant les équivoques
nous sommes entrés dans les roseaux
les citronniers les cyprès.
Image fruitière – je t’arrose.
Mettons que tu existes.

Au loin dans la montée
halète un petit train noir.
Come une délivrance à bout de forces.
Mettons que tu existes.
Comme l’eau coulant dans des régions désertes,
comme une balle dans le cœur d’un oiseau empaillé.
Superflus.


/ Traduit du grec par Michel Volkovitch
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CALCHAS


Je ne dors pas, je ne dors pas,
j'aide la nuit à s'agrandir,
à s'élargir,
à effacer les petites lumières, parasites.

Je ne dors pas, je ne dors pas,
j'exerce de noirs c'est exclu
je lance des c'est exclu exercés
qui déchirent quelques dernières étoiles.

Je ne dors pas, je ne dors pas,
je change de sexe, deviens minuit.
Où me mèneras-tu, abattement,
je te retrouverai quelque part
puisque j'ai prêté serment d'insomnie.
Mes doses de somnifères
dorment comme des anges
et mon cerveau qui veille
les berce tout doucement.

Je ne dors pas, je ne dors pas,
j'aide la nuit à s'agrandir,
j'écris des slogans aux murs des rêves :
à bas les levers du jour des élevages de poules,
à bas les magouilles des espérances
« et on vous construira des maisons
et on vous fera des routes
et on vous apportera la pluie
et du vent, et du vent ».

Je ne dors pas, je ne dors pas
j'attends un dernier vieux fond d'obscurité
pour entrer chez le devin Calchas.
Je vais le tuer.
Il m'a plongée dans tout un sacrifice
pour que tu respires.
Mais toi, insomnie, tu te niches
sur chaque prophétie
en prenant bien ton temps.

p.79
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JE TE SALUE JAMAIS

INESPÉRANCES


Mon Dieu, qu'est-ce qui ne va pas
nous arriver encore.

Je reste là je reste.
Il pleut sans pleuvoir
comme quand de l'ombre
nous renvoie corps.

Je reste là je reste.
Moi là, en face mon cœur
et plus loin
ma relation fatiguée avec lui.
Comme ça, histoire de faire nombre
chaque fois que le vide nous compte.

Chambre vide venteuse.
Je m'accroche bien fort
à ma façon d'être balayée.

Pas de nouvelles de toi.
Ta photo, stationnaire.
Ton regard comme si tu arrivais,
ton sourire, non.
Des fleurs sèches à côté
te répètent sans cesse
leur vrai nom immortelles
immortelles — pour si jamais tu oubliais
ce que tu n'es pas.

Le temps me demande
où je voudrais qu'il passe
et si j'ai pour nom Hélas ou Est lasse.
Laissez-moi rire.
Aucune fin ne connaît l'orthographe....

p.109-110
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JE TE SALUE JAMAIS


Derniers Saluts ce soir
ceux que je t'envoie n'ont pas de fin
pas plus que mes salut salut à Pas question
que les transmette la divine diligence.

Tournant de l'œil s'effondrent les violettes
que le temps tiède a trop étreintes
c'est légitime il est resté
sans les voir depuis l'an dernier.

Salut assiduité des fleurs
assurant votre retour périodique
salut assiduité du sans retour
tu as suivi à la lettre les morts.
Salut étreinte des ténèbres
qui accueilles le légitime, elles sont restées
sans te voir dès avant ta naissance.
Salut refus d'ouverture de tes yeux
salut Inespéré promesse pleine de grâce
qu'à nouveau ton regard trouvera l'audace un jour
de s'ouvrir vers le mien terrifié.
Salut refus d'ouverture de tes yeux
— laissez-passer de la mémoire
pour que vienne les voir quand elle veut
l'aube d'une journée perdue.

Quant à toi monde
qui condescends à vivre
tant qu'a besoin de toi le hasard
dont les maux sont le fruit
de ta fertile résistance,
qui t'avilis à vivre
pour que te paie d'un bonsoir tout au plus
pendant sa traversée
une pleine lune ventriloque
que dire
salut à toi aussi.

p.135-136
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éblouissement par le moindre moucheron de lumière.
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Les souffrances de la pluie


En pleins raisonnements et déraisonnements
la pluie s’est mise à faire fondre minuit
avec toujours ce bruit de défaite
tu, tu, tu.
Bruit sourd, tout plein de solitude,
bruit normal d’une pluie normale.

Mais la déraison
m’a enseigné une autre écriture,
une autre lecture des sons.
Et toute la nuit j’écoute et lis la pluie,
t près d’un u, u près d’un t,
caractères de cristal entrechoqués
qui chuchotent leurs tu, tu, tu.

Toutes ces gouttes qui te tutoient,
toute la nuit
bruit toujours identique et ses malentendus,
bruit nocturne,
nécessité nocturne du tu,
pluie bégayante,
comme l’intention ratée
de raconter une longue histoire
tout ça pour ne dire que tu, tu, tu,

nostalgie monosyllabique
tension d’un mot unique,
un tu comme mémoire,
un autre comme critique,
fataliste,
tant de pluie pour une absence
tant d’insomnie pour un mot unique,
elle m’a soûlée cette nuit la pluie
avec sa partialité
tu, tu, tu, rien d’autre
comme si tout le reste ne comptait plus
et que tu sois partout.


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Choses nouées


Excursion
extrait 1

La mer à Skaramangas est nouée,
compacte. Les pétroliers dégagent
une fumée noire d’immobilité.
Mettons que tu existes.

Le parcours se dilate suspendu au regard.
Un nuage sale tache les routes là-haut,
en bas l’âme pure est reportée encore.
Mettons que tu existes.

La bride du cheval restera nouée à l’arbre.
Dans ma cervelle, beaucoup de pareils nœuds,
beaucoup de pareils liens.
Mettons que tu existes.



/ Traduit du grec par Michel Volkovitch
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