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Critique de Tricape


"Les Murs blancs" est le nom d'une propriété de Chatenay-Malabry dans laquelle se sont installés en 1939 des intellectuels autour d'Emmanuel Mounier, philosophe catholique fondateur en 1932 la revue "Esprit". Dans cette propriété cohabiteront des personnalités (Paul Fraisse, Jean-Marie Domenach, Paul Ricoeur, etc.) et où bien des célébrités passeront (notamment Jacques Julliard, Ivan Illich, Pierre Vidal-Naquet, Jacques Delors et jusqu'à Emmanuel Macron).

On imagine un phalanstère plein d'enfants sages ou une abbaye bouillonnante d'émulations réciproques. Mais non, les deux petits-enfants de Jean-Marie Domenach nous décrivent l'écart entre le rêve et la réalité. Les difficultés de la vie partagée, les mesquineries et drames nous sont rapportés comme autant de tâches sombres derrière des murs blancs. Les contraintes de la réalité matérielle et des caractères des participants entravent gravement l'utopie d'une vie communautaire.

La recherche d'informations auprès des survivants a duré une dizaine d'années ; le résultat est un ouvrage très sérieusement documenté qui laisse entrevoir l'influence qu'ont eue les intellectuels dans la société française des années cinquante à quatre-vingt. La guerre d'Algérie et mai 1968 donnent lieu à des prises de position fortement affirmées ; l'évolution des moeurs de la fin du XXe siècle met en évidence le décalage parfois considérable entre deux générations successives, celle de la Résistance et celle de mai… On constate la place encore trop discrète de la femme dans la vie intellectuelle publique. On réalise également qu'on peut être un philosophe mondialement reconnu sans réussir à assumer sa paternité.

Bien que l'objet du livre ne soit pas la description du personnalisme de Mounier, on peut regretter qu'il ne contienne pas un chapitre dans lequel la pensée du philosophe aurait été présentée afin de mieux comprendre la force d'attraction qu'a exercée Mounier sur ses contemporains.

Ce livre est d'une lecture agréable. Il démystifie l'image de ceux qui y sont présentés mais, paradoxalement, nous les rend attachants. Il aide à comprendre la société intellectuelle française de la seconde moitié du XXe siècle.
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