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EAN : 9782369148791
Libretto (04/04/2024)
3.98/5   31 notes
Résumé :
« Personne ne soupçonne l’existence des Murs Blancs. Pourtant cette propriété a marqué l'histoire intellectuelle du XXème siècle. Elle a été aussi le lieu, où enfants, nous passions nos dimanche après-midi : la maison de nos grands-parents…
Après la guerre, ce magnifique parc aux arbres centenaires niché dans le vieux Châtenay-Malabry, est choisi par le philosophe Emmanuel Mounier, pour y vivre en communauté avec les collaborateurs de la revue qu'il a f... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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***« La mémoire, l'histoire, l'oubli…. »

Un immense coup de Coeur que cet ouvrage épatant, vivant, bienveillant, intelligent, et riche de moult informations, nous offrant le récit mouvementé de l'intérieur d'une singulière aventure intellectuelle et communautaire…des Murs Blancs !

Je reprends, en guise d'introduction, mot pour mot le texte très explicite du contenu de ce travail de mémoire, de la bande-annonce « Dans ce parc méconnu s'est joué une partie de l'histoire du XXe siècle. Six familles d'intellectuels y ont vécu, dans un idéal d'engagement et de vie commune, autour d'une revue légendaire : ESPRIT. Aujourd'hui, de la Résistance à la guerre d'Algérie, d'Emmanuel Mounier à Paul Ricoeur, les enfants des Murs Blancs racontent »….

Travail de longue haleine », selon leurs deux auteurs (petits-enfants, de Jean-Marie Domenach), débuté à l'été 2009, ayant demandé 10 années de travail, de recherches,et fruit de 100 rencontres …et pas des moindres, puisqu'en plus de toutes les sommités ; historiens, philosophes, scientifiques, chercheurs pluridisciplinaires ayant vécu ou croisé les « habitants historiques » des Murs Blancs, ce récit s'achève sur l'entrevue avec Emmanuel Macron, ce dernier ayant été l'assistant du philosophe, Paul Ricoeur, pendant deux années dans ce même lieu…Le président actuel explique l'impact et l'importance de cette rencontre !

Une lecture incroyable…qui curieusement, réveille par des chemins détournés, de nombreux souvenirs lointains, très chers à mon coeur, tous ,évidemment reliés au Livre, au métier de Libraire…à l'écriture… Furetant comme à mon habitude chez mes bons camarades-libraires de ma ville… je tombe sur cet ouvrage ; intriguée par son titre, je lis le 4e de couverture.. . et découvrant les noms d'Emmanuel Mounier, et de la Revue Esprit… je me revois, toute jeune libraire dans les années 80, recevant en « office » (« nouveauté ») Cette revue prestigieuse, que je rangeais, fort « intimidée », dans le secteur Sciences Humaines, et plus spécifiquement au rayon « Philosophie », qui faisait figure dans cette librairie généraliste même conséquente [Librairie de Paris, Place de Clichy, aujourd'hui propriété des éditions Gallimard ] de « parent pauvre » !...

Parallèlement, je poursuivais des cours de librairie à l'ASFODELP [rue Saint-Dominique], où entre autres nous, nous plongions dans l'histoire des maisons d'édition, je me souviens précisément de celle du seuil , creuset dynamique de « ces « Chrétiens de gauche, très actifs dans la vie politique et culturelle ; ainsi de nombreux noms de cette Histoire de la revue Esprit me sont restés familiers…

Autres images et pas des moindres : Châtenay-Malabry où se trouve cette légendaire maison des « Murs Blancs »… ville où je me suis rendue pendant un certain temps, à mes heures de liberté, pour travailler, en vue de travaux de recherche, à la Vallée aux loups, le domaine De Chateaubriand, au sein de la très belle bibliothèque du lieu…jusqu'à l'espace où étaient logés les « chercheurs étrangers »… Ces parcours à pied pour rejoindre ce magnifique endroit reste parmi de très intenses souvenirs, tant par le plaisir de l'étude [que je faisais sur la duchesse Claire de Duras, « soeur de coeur « De Chateaubriand ] que par la beauté du parc… de cet autre parc…

Car dans ces « Murs blancs » lieu communautaire, habité par le philosophe, Emmanuel Mounier et ses familles d'amis-collaborateurs, il y a aussi la magie du lieu… de cet autre parc, enchantant tous ses habitants, enflammant les énergies, les imaginations des petits et des grands….Creuset intellectuel à nul autre pareil…

Voilà, la longue parenthèse introductive est passée…Je reste toujours « captivée » par les raisons, les élans spontanés qui se font, plus ou moins consciemment, pour parvenir parfois au choix de tel livre…et pas un autre.
Cet ouvrage est écrit par les petits-enfants Domenach… dont le grand-père a été un proche ,ami et collaborateur d'Emmanuel Mounier, fondateur , initiateur de cette « idéal » communautaire et intellectuel des Murs Blancs…Ce grand-père mal connu, qu'ils ont découvert véritablement à travers leurs recherches pour l'écriture de ce récit…. à qui ils rendent un hommage vibrant et lucide. Car cette communauté intellectuelle et amicale des Murs blancs ne fut pas un long fleuve tranquille… loin de là ! Une histoire tout en contrastes, drames et joies mêlés…

« Dans le bureau de notre grand-père nous avons aussi retrouvé, entre autres trésors, son exemplaire original de la "Constitution murblanquiste", conservé avec soin. Ce document témoigne de l'état d'esprit de ses habitants qui se prenaient certes très au sérieux, mais formaient aussi une bande de copains complices, avec leurs blagues, leurs moqueries et leur autodérision.
Ces quatre pages comportent sept articles qui imitent la forme juridique des textes de loi mais que Mounier a teintés d'humour absurde, de calembours et de clins d'oeil. (...)
L'article I (...)
"il n'y a aux murs blancs, ni propriétaires, ni locataires, ni oppresseurs, ni opprimés. Les Murs Blancs ne sont pas une propriété. Cette impropriété est collective." s'il y a une chose que la guerre n'a pas ébranlée, c'est le fait que leur ennemi commun reste le capitalisme. Pas question de se considérer comme des propriétaires. (...)
"Chaque année, sera fixé le montant par ménage des attributions d'anarchie, de fantaisie ou d'humour noir. Les chaires en Sorbonne ne donnent pas droit à un supplément d'attribution, non plus que les distractions philosophiques ou le goût lyonnais bien connu pour la folichonnerie". Puis, dans une formule empruntée au -Contrat social- de Rousseau, qui mêle force et douceur, Mounier conclut par : " si l'harmonie générale est libre", elle est "obligatoire". (p. 85)

En plus du récit de la vie communautaire de ces intellectuels brillantissimes, leurs recherches, leurs travaux éditoriaux, la réalisation exigeante de leur revue , Esprit, il y a aussi les aléas du quotidien, les rivalités, les frictions entre fortes personnalités aux égos surdimensionnés… nous avons ainsi le plaisir très vif de revisiter « autrement » la vie politique, intellectuelle du XXe siècle…en passant, en quelque sorte, dans les coulisses du « monde des idées »…

Je ne détaillerai pas toutes les personnalités, « têtes pensantes » ayant vécu, travaillé, comme celles qui n'ont fait que passer, car cette chronique en deviendrait des plus fastidieuses, par sa longueur.

Léa et Hugo Domenach nous emporte dans un récit dynamique, aussi objectif qu'il peut l'être, tentant de rendre justice à chacun, au vu des incontournables dysfonctionnements humains entre des personnalités aussi brillantissimes qu' écrasantes… Les petits-enfants, Hugo et Léa expriment sans réserve leur affection et admiration pour ce grand-père , tout en pointant également les points discutables du comportement au quotidien de ces « cerveaux » comme un machisme plus que confirmé de la part de la gent masculine, alors que les uns et les autres avaient des épouses , brillantes , intellectuelles, et autonomes [ d'où l'ironie lorsqu'on lit l'une des thématiques de la Revue Esprit de juin 1936, intitulée « La Femme est aussi une personne » ]…de même, leurs difficultés à parler de « sexualité », sujet tabou, par excellence, comme beaucoup de mal pour ces professeurs d'université, penseurs, philosophes, chercheurs, écrivains avec l'affectif envers les enfants… plutôt livrés à eux-mêmes… Pas toujours aisé d'accorder l'intellect et la mise en pratique, en action !!

Merci aux auteurs de cet excellent récit, à l'impressionnante documentation, tout en nous offrant un récit vivant , très instructif , empreint d'une lucidité, dénué de jugements tranchés ! Même dans leur rencontre avec BHL [Bernard-Henri Lévy ] qui avait été véhément envers ce groupe d'intellectuels dans l'un de ses premiers textes, « L'Idéologie française » (ayant d'ailleurs provoqué scandale et polémiques surabondantes, à sa sortie),…
Cette démarche de présentation des faits et de l'histoire complexe d'un groupe d'hommes voulue aussi objective, équitable que possible nous rend l'ensemble de ce récit aussi crédible, fiable qu'attachant !

Un grand plaisir de lecture m'ayant appris de multiples choses dont la naissance et le contenu de ce mouvement « philosophique » créé par Emmanuel Mounier : « le personnalisme »…Une publication vraiment enrichissante et très éclairante sur l'évolution des mentalités et du rôle des « intellectuels » au sein de la « Cité »…et de la sphère politique


***Titre d'un ouvrage de Paul Ricoeur [qui peut être aussi repris pour l'ensemble de ce récit]

[**Ouvrage clos par une bibliographie précieuse…]
***************************************************
Liens :
https://www.franceinter.fr/emissions/le-vif-de-l-histoire/le-vif-de-l-histoire-12-fevrier-2021

https://respublicalitteraria.wordpress.com/2013/09/03/les-murs-blancs-un-phalanstere-dintellectuels/


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Léa et Hugo pénètrent dans le parc du domaine des Murs Blancs à Chatenay-Malabry, en banlieue parisienne , puis ils entrent dans l'appartement qu'occupaient leurs grands-parents Nicole - Mamita et Jean-Marie Domenach - Jim. Là, ils vont retrouver leurs souvenirs d'enfants, d'adolescents, vont s'approprier l'histoire de leur famille et vont aller à la rencontre de personnages, des intellectuels chrétiens qui s'étaient donné pour mission de changer le monde et qui vécurent avec leur famille, en ces lieux en communauté régie par un règlement rédigé par Emmanuel Mounier, comme dans un « monastère culturel »
Ils nous présentent, tour à tour, chacun d'eux  :
l'historien de l'Antiquité Henri-Irénée Marrou (1904-1977)
le philosophe Emmanuel Mounier 1905-1950), fondateur de la revue Esprit,
Paul Fraisse (1911- 1996) ,  connu pour ses travaux sur la perception du temps.
Jean-Marie Domenach, ( 1922 - 1997) leur grand-père,   l'un des représentants du courant personnaliste.
Jean Baboulène, Polytechnicien. - Secrétaire général de la J. E. C.. - Résistant. - Membre de la rédaction de "Témoignage chrétien"
Albert Béguin(1901 1957)écrivain et critique littéraire.
le philosophe Paul Ricoeur, ( 1913 -2005) ...
Tous ces intellectuels collaborèrent de près ou d'un peu plus loin à la revue Esprit.
Un pan d'histoire de la littérature ravivé par ce livre qui est un peu plus qu'un" très chouette livre".
A noter page 24 une petite erreur " Sartre, Nizan, Aron ou Camus sont nés en 1905, la même année que lui : "Une génération sérieuse, grave, occupée de problèmes, inquiète d'avenir".

Si les trois premiers sont effectivement nés en 1905, Albert Camus est né huit ans plus tard en 1913 !

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La vie intellectuelle française du XXe siècle a pu s'épanouir notamment à travers les nombreuses revues qui ont vu le jour, l'une des plus connues reste peut-être celle des Temps Modernes, fondée par Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir, éditée par Gallimard. Certaines n'ont pas réussies à passer l'épreuve du temps, d'autres ont perduré et l‘Esprit est l'une d'entre elle. Deux des petits-enfants de Jean-Marie Domenach, écrivain, intellectuel, qui fut le secrétaire puis le directeur de la revue pendant des années, ont effectué à l'aide de leur cousine, Elise Domenach, un véritable travail de reconstruction et de reconstitution de l'histoire de cette demeure qui a abrité pendant longtemps les familles de certaines têtes pensantes et fondatrices de l‘Esprit, nommée Les Murs Blancs, sise au 19, rue Henri-Irénée-Marrou à Châtenay-Malabry : les Mounier, Fraisse, Domenach, Baboulène, Marrou et Ricoeur. L'Esprit, fondé en 1932, parait encore mensuellement, et d'ailleurs son comité de rédaction inclut quelques-uns des héritiers tels qu'Elise Domenach, peut-être d'autres encore.

Dès lors que je me suis plongée tête la première dans le récit, qui tient à la fois d'un hommage et d'un devoir de mémoire, empreint de composantes historique, philosophique, littéraire, qu'ont reconstitué avec succès Léa et Hugo Domenach, je suis restée totalement absorbée par l'histoire de cette revue, et de cette propriété, composée d'individualités aussi exceptionnelles que disparues. En cela, les journalistes ont fait un travail de reconstruction assez extraordinaire, et surtout de mis en forme minutieuse les esprits des différentes personnalités, du Père Fondateur qui a donné l'impulsion du départ le philosophe ‘Emmanuel Mounier, l'élément fédérateur de cette communauté de familles. Ils ont montré à quel point l'existence de la revue a toujours été étroitement mêlé à celle de ces hommes sous l'égide d'une pensée, celle d'Emmanuelle Mounier au départ, dite personnaliste, puis celle de Jean-Marie Domenach, qui a su évoluer en fonctions des débats, des discussions, des dissensions de chacun. le site internet de l'Esprit est doté d'un document pdf relativement clair, qui reprend l'histoire de la revue.

On réalise bien vite que depuis 2009, l'année ou ils ont entrepris leurs recherches, Hugo et Léa Domenach ont effectué une tâche d'une ampleur colossale, interrogeant enfants, petits-enfants, habitants actuels de la demeure, voisins, amis, connaissances, jusqu'à l'entretien inespéré avec Emmanuel Macron, qui a fréquenté pendant deux ans Paul Ricoeur aux Murs Blancs, et qui s'est réparti d'un splendide « C'est chouette » à la lecture de leur récit. Redonner vie à l'esprit qui a vu éclore cette nouvelle revue, qui matérialise l'envie et les tentatives d'une génération d'avoir prises sur le monde, qui va fêter son siècle d'existence dans une dizaine d'années, n'a sans doute pas été une mince affaire. Ils s'y sont attachés consciencieusement et religieusement, revenant même sur certaines attaques peu reluisantes envers les résistants qu'ont été leurs aïeux de la part de certaines personnalités médiatiques, tout comme ils expliquent avec clarté la pensée fondatrice de cet Esprit. Ils dressent d'ailleurs un parallèle assez pertinent, que je nuancerais cependant dans la mesure ou YouTube monétise ses vidéos, entre certains You Tubeurs actuels et ces hommes d'esprit, qui ont en commun de vouloir marquer le monde de leur empreinte. Je suis un peu vieux-jeu, j'aime l'idée de ces revues, que le frère et la soeur font revivre le temps de leur retour dans le passé, je suis très attachée à l'idée de l'écrit, de la presse, de la lecture, de l'objet magazine par lui-même. C'est aussi pour cela que j'ai aimé ce récit, cela m'a ramené dans cette époque ou la revue était le media essentiel pour faire connaître et transmettre ses idées.

Plutôt que d'être une école de pensée, qui n'a jamais été identifiée comme telle, dans un courant unique, les Domenach retracent une page de l'histoire, faisant le portrait de ces hommes et femmes qui ont tous fait partie activement de la résistance. Des individus engagés, qui ont fait de leur militantisme une philosophie de vie, ou est-ce plutôt le contraire, et qui ont porté le poids de cet engagement antimilitariste, décolonialiste, tout au long de leur vie publique. Les deux journalistes dressent des portraits des uns et des autres passionnants, les défauts de chacun sont passés au vitriol, et ceux de leur grand-père, Jean-Marie Domenach, n'est pas le dernier sur la liste. Ils prennent soin de dessiner l'admiration presque amoureuse de Paul Fraisse pour son mentor, le caractère autoritaire, presque tyrannique, de ce premier, la sympathie innée de ce dernier, l'évitement de toute forme de conflit de Paul Ricoeur. Ils recréent avec nuances les tensions, dissensions ou amitiés qui ont émaillé cette vie communautaire aussi bien que les confrontations, prises de becs, les oppositions de sensibilités qui ont contribué à faire de l'Esprit ce qu'elle était.

Je suis admirative de ce lien que ces pères fondateurs ont réussi à créer, à travers échanges spirituels ou d'ordre pratique, à travers cette vie en commune qui ont fait de leurs enfants des cousins, sinon de sang, du moins de vie. Qui font que malgré toutes les dissensions, les désaccords, les distances prises, il leur reste des souvenirs précieux en commun, ceux de leur fameux aïeux, ceux de leur enfance en commun, un lien unique indéfectible et invisible, matérialisé par le souvenir de ces murs blanc à l'origine, devenus jaunes ensuite. le travail de recherche effectué s'appuie sur un recueil du maximum de témoignages des enfants et petits-enfants, les héritiers de cet Esprit révolu. On ne peut pas leur reprocher un manque d'objectivité, même si forcément la tendresse, le respect, l'admiration ressortent quelquefois. le chapitre sur la place laissée aux épouses complètement occultées par la place géante de leurs hommes est assez parlant. Je suis assez admirative, également, de l'idéalisme dont ils font tous preuves, à commencer par Emmanuel Mounier, alors même que la première guerre n'était pas si loin. Idéalisme qui frôle l'utopie qui est à l'origine de cette communauté des Murs Blancs, dont le vivre ensemble va bientôt démontrer les limites de la mise en pratique de ses idées.

Les murs blancs n'existent plus en tant que tels aujourd'hui. Les enfants et petits-enfants ont implanté leurs racines autre part, chacun a tracé sa route. La revue a elle aussi bien évolué mais aujourd'hui ils revendiquent un retour aux sources. Voici ce que la rédaction version 2021 en dit « Elle s'efforce d'illustrer une approche généraliste de notre présent, entre la culture médiatique et les études savantes. Généraliste et soucieuse de l'intérêt général, elle se consacre à décrypter les évolutions de la politique, de la société et de culture, en France et dans le monde. »
Lien : https://tempsdelectureblog.w..
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Les murs blancs est un lieu à part, où vivait une communauté de philosophes intellectuelles à partir de la fin de la 2nde guerre mondiale. Créée par Mounier, entouré de Fraisse, Domenach, et d'autres .. et pour finir Ricoeur qui était au centre de cette propriété.

Ces personnages, ce lieu m'étaient complètement inconnu.. à présent que j'y fais plus attention, effectivement j'entends parler de Ricoeur autour du président Macron et le auteurs terminent leur livre par un interview de celui-ci mais il ne faudrait que cet entretien occulte le reste du livre qui est complet, instructif, et lucide sur cette communauté.

On y découvrira qu'au delà de la communauté rassemblée d'autour de mêmes idéologies, les caractères de chacun sont omniprésents et les auteurs, bien qu'ils louent les qualités humaines, philosophiques de ces hommes, mettent en avant les piètres parents qu'ils étaient.

Je salue le travail incommensurable que cela a du être pour nous faire vivre ces instants, ces relations, leurs envies propres mais aussi celle de la communauté.

Mon seul regret est de ne pas m'y connaître plus que cela alors qu'il semblerait que ces hommes ont marqué par leur intelligence, leur culot et leurs idées. Mais en aucun cas, cela n'empêche d'apprécier ce livre écrit à 2 mains par les petits-enfants de l'un de ces locataires de Chatenay-Malabry.
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"Les Murs blancs" est le nom d'une propriété de Chatenay-Malabry dans laquelle se sont installés en 1939 des intellectuels autour d'Emmanuel Mounier, philosophe catholique fondateur en 1932 la revue "Esprit". Dans cette propriété cohabiteront des personnalités (Paul Fraisse, Jean-Marie Domenach, Paul Ricoeur, etc.) et où bien des célébrités passeront (notamment Jacques Julliard, Ivan Illich, Pierre Vidal-Naquet, Jacques Delors et jusqu'à Emmanuel Macron).

On imagine un phalanstère plein d'enfants sages ou une abbaye bouillonnante d'émulations réciproques. Mais non, les deux petits-enfants de Jean-Marie Domenach nous décrivent l'écart entre le rêve et la réalité. Les difficultés de la vie partagée, les mesquineries et drames nous sont rapportés comme autant de tâches sombres derrière des murs blancs. Les contraintes de la réalité matérielle et des caractères des participants entravent gravement l'utopie d'une vie communautaire.

La recherche d'informations auprès des survivants a duré une dizaine d'années ; le résultat est un ouvrage très sérieusement documenté qui laisse entrevoir l'influence qu'ont eue les intellectuels dans la société française des années cinquante à quatre-vingt. La guerre d'Algérie et mai 1968 donnent lieu à des prises de position fortement affirmées ; l'évolution des moeurs de la fin du XXe siècle met en évidence le décalage parfois considérable entre deux générations successives, celle de la Résistance et celle de mai… On constate la place encore trop discrète de la femme dans la vie intellectuelle publique. On réalise également qu'on peut être un philosophe mondialement reconnu sans réussir à assumer sa paternité.

Bien que l'objet du livre ne soit pas la description du personnalisme de Mounier, on peut regretter qu'il ne contienne pas un chapitre dans lequel la pensée du philosophe aurait été présentée afin de mieux comprendre la force d'attraction qu'a exercée Mounier sur ses contemporains.

Ce livre est d'une lecture agréable. Il démystifie l'image de ceux qui y sont présentés mais, paradoxalement, nous les rend attachants. Il aide à comprendre la société intellectuelle française de la seconde moitié du XXe siècle.
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critiques presse (3)
Bibliobs
23 février 2021
Dans « les Murs Blancs », Léa et Hugo Domenach retracent l’histoire de la propriété de Châtenay-Malabry choisie par le philosophe Emmanuel Mounier pour y vivre en communauté avec les collaborateurs de la revue « Esprit », dont Paul Ricœur.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
LeFigaro
11 février 2021
Les seconds font le tableau nostalgique d’une singulière aventure intellectuelle et communautaire.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
LaCroix
11 février 2021
Retraçant l’histoire de la communauté autour d’Emmanuel Mounier et d’« Esprit », les petits-enfants de l’un d’entre eux font revivre une belle page de l’après-guerre.
Lire la critique sur le site : LaCroix
Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
Dans le bureau de notre grand-père nous avons aussi retrouvé, entre autres trésors, son exemplaire original de la "Constitution murblanquiste", conservé avec soin. Ce document témoigne de l'état d'esprit de ses habitants qui se prenaient certes très au sérieux, mais formaient aussi une bande de copains complices, avec leurs blagues, leurs moqueries et leur autodérision.
Ces quatre pages comportent sept articles qui imitent la forme juridique des textes de loi mais que Mounier a teintés d'humour absurde, de calembours et de clins d'oeil. (...)
L'article I (...)
"il n'y a aux murs blancs, ni propriétaires, ni locataires, ni oppresseurs, ni opprimés. Les Murs Blancs ne sont pas une propriété. Cette impropriété est collective." s'il y a une chose que la guerre n'a pas ébranlée, c'est le fait que leur ennemi commun reste le capitalisme. Pas question de se considérer comme des propriétaires. (...)
"Chaque année, sera fixé le montant par ménage des attributions d'anarchie, de fantaisie ou d'humour noir. Les chaires en Sorbonne ne donnent pas droit à un supplément d'attribution, non plus que les distractions philosophiques ou le goût lyonnais bien connu pour la folichonnerie". Puis, dans une formule empruntée au -Contrat social- de Rousseau, qui mêle force et douceur, Mounier conclut par : " si l'harmonie générale est libre", elle est "obligatoire". (p. 85)
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Avant d'écrire ce livre, nous connaissions peu notre grand-père [Jean-Marie Domenach ]. Nous avions cette image d'un vieil homme gueulard, chanteur et farceur qui aimait mettre des chardons dans nos lits, ou accrocher des casseroles aux pots d'échappement de ses invités avant leur départ. Nous le regardions un peu intimidés. Plus tard, après sa mort en 1997, nous l'avons découvert à travers l'admiration des autres: journalistes, professeurs, étudiants, membres de notre famille...Ensuite, lors de notre enquête, nous l'avons rencontré jeune homme, puis dans la force de l'âge, à travers ses écrits et les témoignages de son entourage. C'est grâce à ce livre que nous avons fait vraiment sa connaissance. (p. 77)
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La mémoire, l'histoire, l'oubli.

"Que meure le personnalisme et que vive la personne." - Paul Ricoeur

(...)Toute une génération d'intellectuels revendique une filiation directe ou indirecte avec eux, une place, au détriment de leurs propres enfants qui, eux, ont souvent eu du mal à trouver la leur. Aucun des "héritiers" des habitants historiques n'a d'ailleurs voulu revenir habiter dans ce lieu: " C'est normal que personne n'ait voulu reprendre les Murs Blancs et que le contact ait été perdu entre nous. Cela montre la difficulté de faire son trou dans ce nid fondateur dont l'exigence avait quelque chose d'inatteignable", nous explique Jean fraisse. (p. 294)
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Les Débuts

(...) Malgré toutes ses tentatives, Mounier ne réussit pas à nouer de véritables liens entre les habitants. Il a face à lui des ego surdimensionnés et difficiles à gérer, mais surtout des hommes et des femmes éprouvés par la guerre. La plupart ont baigné dans des milieux catholiques peu généreux en effusions. Résultat, son projet de poser ici les bases d'une nouvelle civilisation fondée sur la personne et son lien avec les autres ne peut pas fonctionner. (...)
Pourtant ce dysfonctionnement humain ne pèse pas sur le rayonnement intellectuel des Murs Blancs, de la revue Esprit et de leurs combats communs. Les habitants ont toujours pour projet de reconstruire leur pays et se montrent capables d'échanger des idées de travailler, de faire vivre ce mouvement Esprit, en France et à l'étranger, comme Mounier en a toujours rêvé. (p. 97)
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Du poids sur les épaules

(...) Pourtant Ricoeur semblait ne pas avoir conscience du poids qui pesait sur les épaules de sa progéniture. "Je regrette que mes enfants n'aient jamais lu mon oeuvre", a-t-il confié à sa petite-fille Nathalie. Ce à quoi elle a répondu : "tes enfants ont peut-être besoin d'un père, pas d'un philosophe." (p. 194)
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Videos de Léa Domenach (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Léa Domenach
Le Chemin des estives : récit Charles Wright Éditions Flammarion Collection Littérature française
Ce monde est tellement beau Sébastien Lapaque Éditions Actes Sud Collection Domaine français
Les Murs Blancs Léa Domenach Hugo Domenach Éditions Grasset Collection Littérature française
Être père avec saint Joseph : petit guide de l'aventurier des temps postmodernes Fabrice Hadjadj Éditions Magnificat
Le Courage de la nuance Jean Birnbaum Éditions du Seuil
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