Gauguin : L'Autre Monde

Gauguin est mort. L'esprit, celui qu'il a peint dans son tableau "Manao Tupapau" (l'esprit des morts veille), dans le fond, derrière le corps de sa compagne Teura, vient le chercher pour remonter le temps, visionner ce qu'a été sa vie. C'est ce parcours que nous conte Fabrizio Dori.
Rien n'y manque depuis la naissance, le passage au Pérou, Paris et la bourse, Mette sa femme, les enfants, la peinture, Copenhague, Paris et les expos, la Bretagne et, bien entendu, la Polynésie.
C'est, pour moi une réussite poétique d'une grande simplicité avec un rien de spiritualité polynésienne où l'on peut mesurer la distance entre la sagesse de là-bas et celle de notre monde occidental. L'intérêt n'est jamais tombé, au contraire il m'a semblé que plus j'avançais dans ma lecture, plus le niveau augmentait. J'ai été captivé d'abord par cette biographie et par, bien sûr, l'originalité de la façon de conter cette histoire mais aussi par l'énorme qualité picturale des dessins. le lecteur regarde du Gauguin, les roses du sable comme seul il savait les réussir, la transparence de l'eau, le bleu de la mer, l'émeraude omni présente et l'indigo des ciels. La richesse des tons vifs des vêtements des tahitiens sont rendus, ici, avec un grand bonheur. La couverture de ce roman graphique, de par sa qualité, donne un aperçu de la qualité des pages qui vont suivre. J'apprécie Gauguin et je remercie F. Dori de m'avoir fait me souvenir à quel point sa peinture est riche et parlante à qui regarde. Un tableau de Gauguin dans une salle de musée met en valeur le reste des oeuvres et donne un éclat tout particulier, ne serait-ce que par ces jaunes (que j'avais oublié ci-dessus) qui 'ont rien à envier à Van Gogh. Un bon moment de lecture et de rêverie. Il faut prendre le temps de savourer cet ouvrage.
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Très bel album de Fabrizio Dori autour de la vie et de l'oeuvre de Paul Gauguin. Artiste "maudit" recherchant la sauvagerie, consacrant sa vie à son oeuvre et à ses désirs, Paul Gauguin est une figure humaine assez antipathique qui a abandonné sa femme et ses enfants pour partir à la recherche de nouvelles formes d'art. D'abord en Bretagne, puis dans les îles, il consacre son temps à rédiger et peindre une nouvelle forme de réalité, de perception.
L'approche de Fabrizio Dori, entre inscription des peintures, représentations de scénettes quotidiennes et émergence d'un ésotérisme (apparition de fétiches et communication) est vraiment très bien et très juste vis à vis de cet artiste et de son rapport au monde. On sent le glissement du paradis originel de Gauguin vers une colonisation, une européanisation progressive de pages en pages. C'est un véritable hommage à l'artiste et à une époque que constitue cet album.

Gauguin se meurt. Un esprit lui rend visite pour faire le point sur son existence. Nous suivons alors Gauguin dans le fil de ses souvenirs, nous entrainant loin de l'Europe, à Tahiti, où il a fait le choix de s'exiler.
Les légendes et croyances des archipels polynésiennes nous sont contées et s'entremêlent avec le récit biographique.

D'un point de vue graphique, l'auteur nous plonge dans l'univers visuel de Gauguin à chaque page.

Sarbacane nous offre avec cette BD un très très bel objet d'art. L'auteur a dessiné et coloré les cases en s'inspirant de l'univers de Gauguin. J'étais sur Tahiti avec l'artiste !
Gauguin fait l'objet de polémique en raison de son goût pour les très jeunes filles. La BD l'aborde en mentionnant la différence d'âge de Gauguin avec sa jeune épouse qui a 20 ans de moins que lui. L'auteur a fait le choix de ne pas raconter la vie intime de l'artiste. Ca tombe bien, je n'en avais pas envie.

Je retiens surtout cette phrase de Gauguin " L'absolu se trouve sur la surface de la toile, pas dans la réalité."