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sur 56 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
•"En cette nuit,
en cet instant de cette nuit,
je crois que même si les dieux incendiaient
le monde,
il en resterait toujours une braise
pour refleurir en rose
dans l'inconnu."

Fragments soulevés par le vent, de Philippe Jaccottet

•L'auteur a choisi la trame de la famille mais tisse un motif bien plus vaste en y insérant des fils variés et parfois très éloignés les uns des autres, et pourtant tous vont être les éléments d'une seule et même composition finale.

Tout s'agence très lentement, l'écriture d'Emmanuelle Dourson est riche, ciselée, ouvragée, pas tant au service de descriptions que de la mise en abyme des personnages : chacun existe bien sûr individuellement mais s'insère aussi dans une distorsion plus vaste. Chaque personnage s'intègre à un plan horizontal, en lien avec ses proches ou des personnes plus lointaines, parfois de parfaits étrangers. Mais chacun fait aussi partie d'un plus vaste plan, vertical, inséré dans l'histoire de l'Humanité, dans l'histoire même du temps.

Emmanuelle Dourson, grâce à une très fine perception, ne nous raconte pas seulement l'histoire troublée et douloureuse d'une famille. Elle pose au centre de sa grande trame un évènement qui fera éclater cette famille. Elle l'utilise comme un noeud central duquel elle va ensuite entrelacer tous les fils, allant des membres de la famille aux personnages de l'Odyssée d'Homère.

•Mona et Jean ont deux filles, Clélia et Albane. A partir de cette structure familiale simple, l'auteur investit chaque recoin de leur relations, nous invite à des retours dans le passé. Et puis survient "l'événement" qui brisera cette unité de façade, déjà ébréchée.
Sur un rythme très lent, Emmanuelle Dourson nous conte cette histoire familiale en la reliant au monde de la musique, à l'écologie, à la mythologie, en se focalisant sur la transmission de femmes en femmes, et en l'insérant dans un ensemble bien plus vaste.
Si le roman est tout d'abord construit lentement, dans un style alangui, voire apathique, Emmanuelle Dourson pousse chaque description jusqu'à l'infime, prenant son temps, pour aboutir à un rythme de plus en plus soutenu, presque oppressant ou haletant, comme une ascension s'achevant dans un dénouement comme une grande explosion.

•C'est un premier roman. Il n'y paraît pas. On sent bien la maîtrise de l'écriture, un style très travaillé. Mais pas uniquement. L'auteur touche à quelque chose de très profond.

Et c'est là que c'est difficilement explicable : je tombe en plein paradoxe, comme dans un piège. Cette lecture est ardue, exigeante. Elle m'a été souvent pénible, j'ai lutté pour la poursuivre, à la façon là encore d'une ascension. La lutte à rentrer dans ce roman qui s'imposait à moi comme un mur qui me repoussait sans cesse, l'impatience à recueillir enfin un fruit, l'agacement souvent face à des disgressions qui me perdaient, la persévérance à poursuivre tout de même... Et puis la mise en place progressive des protagonistes, leurs liens enfin dévoilés, leur place respective dans cette grande toile. Enfin je n'avançais plus à l'aveuglette, à tâtons, enfin un peu de clarté jusqu'à l'éclatement final, atteindre enfin le point culminant de la randonnée, comme un Ulysse égaré qui rentre enfin en son foyer, comme la dernière note d'une symphonie haletante qui vous laisse essoufflé mais contemplatif.
Je reste face à un grand mystère : Emmanuelle Dourson dans certains passages m'a totalement percutée, comme si je ne comprenais pas totalement, comme si je ne pouvais pas intégralement m'approprier ses mots, et pourtant je suis touchée, je sens presque le sacré dans ses lignes, l'inévitable, l'incontournable...
Ce roman mérite une seconde relecture, plus tard, le temps pour les mots de murir. N'est-ce pas là après tout l'enseignement de ce roman ?
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Pour cette rentrée littéraire d'hiver, Emmanuelle Dourson propose son premier roman en racontant la réunion d'une famille déchirée avec un langage poétique étonnant et une construction particulière.
Albane Almafi revient en Europe, et plus particulièrement à Barcelone, pour donner une Sonate de Beethoven au Palau de la Musica . Quinze ans qu'elle a fugué en criant à ses parents « J'irai danser sur vos tombes ».
Ainsi, cette famille bruxelloise va tout faire pour s'organiser et la retrouver, enfin. Tout d'abord, son père usé et vieilli, s'est éteint à force d'attendre. Sa soeur aînée, Clélia, est celle qui a consolé la famille de la souffrance de l'absence. Son mari Yvan est l'ancien ex d'Albane qui n'a jamais oublié. Une de leurs filles, Katia, souhaite ressembler à la fois à sa mère et à sa tante absente.
Mais, Emmanuelle Dourson utilise une narratrice dont on découvrira au cours de la lecture son identité, qui raconte en six jours l'organisation des retrouvailles autour de ce concert devenu si particulier. Elle décrit, pour chacun en un long chapitre, un événement particulièrement important. du coup, les relations entre chacun se dessinent dans toute leur complexité.
De ce vers du poème de Philippe Jaccottet qui forme le titre, Emmanuel Dourson propose un voyage au coeur des secrets et des sentiments qui comme à l'image d'un monde qui s'éteint et renait sans fin sont révélés pour dissiper leurs amertumes et retrouver le miel de leur douceur. Une écrivaine à suivre, assurément !
https://vagabondageautourdesoi.com/2021/02/09/emmanuelle-dourson-si-les-dieux-incendiaient-le-monde/
Lien : https://vagabondageautourdes..
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Et si Emmanuelle Dourson était une Domenech i Montaner de la littérature ? « Si les dieux incendiaient le monde » vers emprunté à Phlippe Jaccottet car aucun vent ne peut être séparé de notre souffle, est une narration scripturale mêlant art gothique et modernité dans le reflet de la mosaïque des notes sur les vitraux des belles lettres. Ce roman, c'est le Palau de la Musica Catalana, lieu de la scène finale d'une histoire banale qui prend toutes sa substance dans l'architecture des chapitres, la structure métallique des sentiments et le foisonnement coloré d'une plume aux multiples teintes et demi-teintes.

Le fond n'a aucune réelle originalité, une histoire de famille déchirée, un veuf, Jean, qui se lamente sur la fuite du temps vers la vieillesse et regrette de n'avoir pu revoir sa cadette, Albane, qui a quitté le domicile quinze auparavant après que sa soeur, Clélia, lui ait volé son soupirant, Yvan. le couple a quatre enfants, tous sachant qu'ils ont une tante fantôme. Jusqu'au jour où Jean apprend qu'Albane arrive en Europe et va donner un récital à Barcelone.

C'est la forme qui fait tout basculer, le conteur est un ectoplasme, celui de Mona, l'épouse de Jean, la morte noyée. Son esprit plane et ce livre est sa psyché. Elle semble guider les êtres qu'elle a connus sans qu'eux-mêmes le réalisent sauf peut-être l'une de ses petites-filles en admiration devant l'odyssée d'Homère, les ruses d'Ulysse et la mystérieuse Pénélope. Progressivement Barcelone peut devenir un Ithaque pour la famille surtout quand les dieux de l'Empyrée viennent envahir l'Europe au moment où Albane entre en scène dans la capitale catalane. S'ensuivent moult partitions jouant sur les cordes de la vie et les touches de l'existence, parfois à en perdre la clé tant la puissance et l'imaginaire poétique vont crescendo dans la tonalité livresque.

Un livre pour tous les amoureux de la langue française et du ruissellement des choses.

Roman faisant partie des 21 sélectionnés pour le Prix Orange du Livre 2021 en remerciant lecteurs.com pour cette lecture.
Lien : https://squirelito.blogspot...
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Ma fille, ma bataille

Avec son premier roman, Emmanuelle Dourson signe une entrée remarquée en littérature. Autour d'une famille déchirée, elle nous propose un drame en six temps construit de façon très originale.

Jean vit désormais dans son lit, perclus de douleurs. En attendant les visites de sa fille Clélia, qui vient quelquefois avec sa propre fille cadette, Jeanne. Ses autres enfants, Katia, Petra et Alice, ont renoncé à ces visites chez le grand-père. Albane ne viendra pas non plus. La seconde fille de Jean ne lui donne plus signe de vie que par carte postale. Une carte qu'elle lui adresse tous les ans depuis un autre continent où elle a choisi de s'installer. Il en a désormais quinze. Alors il essaie de revivre des moments heureux passés en famille, comme les vacances à Lisbonne, s'imagine à Saint-Pétersbourg ou encore à Madrid.
Tout à l'heure, il demandera à Maria, son aide-domestique, de lui ramener le dernier disque d'Albane, mais surtout de le conduire à l'aéroport de Bruxelles pour prendre la direction de l'Espagne. Malgré ses douleurs, il sent que c'est une chance qu'il ne faut pas laisser passer. Il a en effet appris qu'Albane, concertiste réputée, va donner un récital à Barcelone pour marquer son retour en Europe.
Clélia n'apprendra qu'incidemment cette escapade, frustrée de n'avoir pas été prévenue par ce père dont elle s'occupe pourtant bien, malgré un agenda chargé. Entre son amant parisien ou ses voyages en Éthiopie, où elle qui s'est engagée pour la reforestation du pays. Car Yvan, le père de ses enfants, ne lui suffit plus. Elle l'avait pourtant «volé» à Albane, provoquant une onde de choc dont les échos vibrent encore dans l'air. Aussi est-ce avec un sentiment mêlé et une forte curiosité qu'elle part elle aussi pour la capitale catalane.
C'est Mona, la femme décédée de Jean, qui est la narratrice de ce premier roman et qui ordonnance l'ordre d'entrée en scène des personnages. Une belle idée d'Emmanuelle Dourson qui, comme sur une scène de théâtre, place tour à tour les acteurs sous la lumière. C'est maintenant au tour d'Yvan d'être analysé par Mona. S'il a l'air serein, il lui faut bien admettre que sa situation n'est pas très envieuse. À la confrontation, il préfère la fuite, il préfère son concentrer sur son art, la photographie. C'est ainsi qu'il entend imprimer sa vision du monde.
Voici ensuite Katia, la fille aînée de Clélia et d'Yvan, qui a envie de grandir vite, de porter les belles robes de sa mère et de s'émanciper, de laisser derrière elle sa famille déchirée, sa grand-mère décédée.
Puis, du côté de Barcelone, c'est à Albane d'entrer en scène pour un concert mémorable. Mais nous n'en dirons rien, de peur de vous gâcher le plaisir de lire ce formidable moment, tout en tension, tout en vibration.
Avec ce premier roman, Emmanuelle Dourson signe une entrée remarquée en littérature et rend hommage au poète suisse Philippe Jaccottet en lui empruntant le titre de son livre, tiré de son recueil Fragments soulevés par le vent: «En cette nuit, en cet instant de cette nuit, je crois que même si les dieux incendiaient le monde, il en resterait toujours une braise pour refleurir en rose dans l'inconnu.»


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Un premier roman réussi et très bien écrit qui met le lecteur sous-tension dès la première page.
Emmanuelle Dourson nous offre une histoire simple, celle d'une famille que le temps a chahutée puis déchirée, qu'elle traite avec beaucoup de profondeur et de finesse.
Six chapitres composent son roman, comme six portes ouvertes vers l'intimité des membres de ce clan que nous découvrons tour à tour.
Il y a Jean, le père, dont la vieillesse traitresse m'a fissuré le coeur au premier chapitre.
Il porte une absence sourde en lui : celle de sa fille Albane qu'il n'a pas revu depuis 15 ans après une dispute familiale.
"J'irai danser sur vos tombes" a vociféré cette dernière avant de s'en aller parcourir le monde, toucher d'autres pianos qu'elle a toujours fait chanter comme personne.
Clélia, la soeur d'Albane, est celle qui est restée près de son père mais qui n'a jamais réussi à combler le manque laissé par l'aînée; l'enfant prodige.
Il y a Yvan, le mari de Clélia, ancien amoureux d'Albane, et Katia leur fille.
Tous sont fissurés et ressentent la frustration et les non-dits à leur manière.
La plume d'Emmanuelle Dourson est musicale, mélancolique, précise. le texte est comme une flèche qu'on s'apprête à décocher, tout est extrêmement sous tension. C'est un morceau de musique classique dont le rythme magistal vous emporte avec fougue tout en vous précipitant vers sa chute certaine : celles des retrouvailles.
C'est simple et percutant.
C'est un livre que j'ai lu sur deux semaines, de manière morcelée dans les transports en commun. Ce n'est pas forcément très agréable de le lire comme ça car les chapitres sont assez longs et requièrent d'être lus à mon sens sans trop d'espace afin de ne pas se perdre.
Les histoires de famille ne sont pas spécialement ma tasse de thé mais la qualité littéraire du texte ici est indéniable.
Je referme ce livre assez impressionnée! N'hésitez pas à venir m'en parler
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Albane a disparu quand sa soeur, Clelia, lui a volé les faveurs de son fiancé.

Depuis, quinze ans se sont écoulés. Albane est devenue une célèbre pianiste. Clélia est mère de famille et préoccupée par ses amants. Jean, leur père, vieillit et perd la maitrise de son corps. Mona, leur mère, s'est noyée.

Albane n'est jamais revenue.

Quand Jean apprend que sa fille se produira en Europe pour la première fois, il part à Barcelone pour renouer avec elle.

Un roman charnel à la poésie mélancolique.

A lire en écoutant l'Opus 111 de Beethoven.
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J'ai ete emportée par le récit, il se développe de façon inhabituelle. Point de vue d'une personne, mêlée à celle de la narratrice.
Vocabulaire intense, références aux classiques, histoire dense, on attend le dénouement, on se tend comme lorsque l'on écoute une musique et qu'on laisse les notes, les mots ici, nous emporter
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