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Critique de oiseaulire


Excellent roman se présentant comme une autobiographie extraite d'un journal fictif de Dora Maar.

Sous la plume de Slavenka Drakulic, auteure croate, le personnage Dora Maar y décrit la relation sous emprise qu'elle entretint pendant 7 ans avec Picasso.

Elle y perdit son art, la photographie, sa santé mentale et finit ses jours volontairement isolée, dans la piété et une relative pauvreté, peignant des toiles qui la sauvèrent de la folie.

L'emprise de Picasso ne s'exerçait pas uniquement à l'égard de ses maîtresses, mais à l'égard de tous ceux qui faisaient partie de son cercle : son épouse de laquelle il ne divorça jamais, ses enfants, surtout son fils, Paul, qui resta toute sa vie son homme à tout faire, autant dire un esclave. Il envoûtait son large cercle d'amis, dont étaient Roland Penrose, son épouse, la photographe américaine Lee Miller, l'écrivain-ethnologue Michel Leiris, Man Ray, Max Ernst et surtout Paul Eluard qui lui était inféodé jusqu'à lui prêter son épouse-poupée Nusch.

Comment y échapper ? Eh bien on n'y échappait pas, tant l'homme était magnétique, d'un magnétisme animal tel qu'il était presqu'impossible de ne pas tomber sous son orbite quand on le côtoyait.

L'unique personne qu'il ait respecté fut Gertrude Stein, à qui il devait sa renommée et qui lui assura à ses débuts de quoi peindre et ses premières ventes.

Les autres souffrirent, devinrent fous, se suicidèrent. Beaucoup d'entre eux. Picasso le vampire, Picasso-Chronos, Picasso-le Minotaure.

La responsabilité en est-elle au seul Picasso, homme incapable de sentiment mais artiste jusqu'au bout des doigts, de l'âme ? Certainement pas : Picasso était un monde, une mouvance, une galaxie, il ne s'arrêtait pas à sa personne. Il était la proie aussi bien que le chasseur car tout était magique en lui : sa parole était celle du Dieu vivant ; il transformait tout en art : il chinait des matières informes aux puces et les transformait en sculptures ; ses mains ne restaient jamais inoccupées : avec une capsule de vin, un bouchon, un quelconque objet il fabriquait sans relâche au restaurant et partout où il se rendait des petits objets qu'il distribuait ; dessinait des croquis qui, lorsqu'il daignait les signer, enrichissaient instantanément ceux à qui il les offrait.

Ce roman est passionnant car il restitue l'ambiance du surréalisme, sa créativité, sa liberté de moeurs ; un accent particulier est mis sur les étapes de la réalisation enfiévrée du célèbre tableau "Guernica", (dont Dora Maar assura le reportage photographique).

Ce roman très bien documenté. La traduction a été assurée par Chloé Billon.

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