« Mes cheveux poussaient aussi mais ils étaient raides, blondissaient avec l'été et je ressemblais à un joueur tchécoslovaque dégingandé quand j'aurais voulu être un ange vert aux boucles brunes cascadant au ras de mes épaules. ».
J'aurais pu l'expliquer aux hommes,mais convaincre sans chercher à séduire diminue de moitié l'intérêt de la conversation et la portée de la performance.
A la télévision française, deux sortes de héros se voyaient offrir des surnoms : les sportifs et les catcheurs. Le rugbyman Jean-Pierre Rives avec sa chevelure blonde était Casque d'Or. Dominique Rocheteau serait l'Ange Vert.
A cinquante ans, s'ils avaient gagné à la loterie en évitant la silicose, les mineurs de fond pouvaient être supporters des Verts à mi-temps et jardiniers des parcelles ouvrières, alors que les mineurs de jour devaient attendre cinquante-cinq ans pour se reposer un peu.
C'était une feuille à l'entrée du bureau du surveillant général : déplacement en car organisé par le lycée au stade Geoffroy-Guichard pour le match Saint-Etienne-Kiev, 40 francs, place comprise. Il suffisait d'écrire son nom, on rapporterait plus tard le chèque parental.
Grandir dans ma province avec Saint-Etienne juste à côté, en 1976, c'était habiter Naples au pied du Vésuve, c'était savoir que le cœur de l'univers avait soudain été déplacé, qu'il se rapprochait de nous mais sans nous inclure, et c'est pour cela que l'on se levait, pour voyager, franchir la frontière et ressentir l'appartenance au monde.
J'ai rapidement aimé le foot et la presse du foot : à partir du moment où j'avais décidé de ne pas travailler au lycée, il fallait bien que je m'occupe.
A sept ans, il me manquait le recul, la compréhension du second degré. Au mois de juin 1970 - j'ai retrouvé le numéro –, un éditorialiste de Football Magazine avait titré : « Faut-il mettre Saint-Étienne hors concours ? » Il évoquait la supériorité des Verts, champions de France, qui avaient également remporté la Coupe de France. Hors concours, je trouvais cela profondément injuste, quand même, j'ai attendu le numéro suivant pour savoir si la menace était maintenue ou si on leur permettrait de continuer à jouer avec les autres équipes du pays.
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Jusque là, les joueurs professionnels qui voulaient changer de club sans l'accord de leur président s'inscrivaient sur un liste de "réfractaires", c'était l'appellation officielle...