Citations sur Le rêve de ma mère (25)
Le clown blanc, qui nous paraît si étrangement féminin avec son teint blanc, son rouge à lèvres, ses fines ballerines aux pieds et son costume pailleté à larges hanches, c'est la mère ! Elle va sortir le soir, elle est maquillée, habillée richement, elle a des bas blancs et son sévère sourcil de mère qui réprimande. Et celui qu'elle gronde, c'est un enfant de sept ans, Auguste. Il a mis les vêtements de son père, trop grands pour lui. Son pantalon tombe et tire-bouchonne sur les chaussures, trop grandes elles aussi, et il ne fait que des bêtises. Quand on connaît ce postulat originel, les personnages deviennent absolument clairs.
Puis je m'adonnai à un "journal intime" d'adolescence, et je découvris que le geste d'écrire était consolateur (lorsqu'on écrit à la main, bien sûr). La position quasi fœtale qu'il requiert, courbée sur la feuille, me gardait en contact avec une sorte de "fil rouge" intérieur. Écrire me permettait de renouer, en silence, avec ce que j'étais profondément. Je pratiquait longtemps cette salutaire "écriture pour soi", tout en continuant mon parcours de funambule, apparemment légère et détachée. Sans l'écriture, peut-être me serais-je perdue ?
Le "lac noir", c'est la dépression, dont furent victimes nombre de personnes ayant elles aussi mal cicatrisé une blessure d'enfance. Les ombres qu'on a cru apprivoiser, ou ignorer, voire dominer, vous rattrapent, vous aspirent, parfois à un âge avancé, quels que soient les accomplissements, les succès. Comment être certain d'échapper à ce danger, de déjouer les pièges d'un inconscient qui peut devenir dévastateur ?
Les professeurs qui m’ordonnaient parfois, en représailles de ma mauvaise conduite, de copier 150 fois « Je ne serai plus jamais distraite en classe » (ce genre de chose se faisait encore à l’époque !) ne savaient pas que ce n’était pas pour moi une punition ! Je traçais les mots soigneusement, avec une certaine volupté à bien les dessiner, et le caractère répétitif de ce pensum, loin de me rebuter, avait sur moi un « effet yoga » bienfaisant, entraînait une forme de méditation.
Par contre,je tombai carrément amoureuse de la peinture à l'huile,de la sensualité de la matière,des enduits,de l'odeur de médiums,de la térébenthine....
Je changeai. J’acceptai de m’alourdir d’amitiés plus pérennes, d’un chat à soigner, petite vie dont j’étais responsable, d’un lieu à moi, où commencer une vie de femme – en somme, j’envisageai enfin la possibilité de m’attacher, de construire, avec le risque inhérent qu’il comporte : la peur de perdre…
En outre, à défaut d’avoir de l’ambition, j’avais de la moralité. Quitte à faire quelque chose, il fallait le faire, sincèrement, et avec de la joie. Tout rapport de force ou d’agressivité me mettait plongeait dans un profond malaise. Si difficulté il y avait à résoudre, il fallait m’en sortir au mieux et le plus pacifiquement possible. Car j’étais « bonne fille ». Je ne voulais pas qu’on me fasse du mal, et je ne voulais en faire à personne. En général, je ne voulais que du bien aux gens.
Car il est un autre formidable avantage du manque d’ambition, c’est l’absence totale de jalousie envers autrui ! Évidemment, ne convoitant aucune position sociale, matérielle – ou vedettariat quelconque – que j’aurais rêvé d’atteindre, je n’enviais personne. Je dois dire que c’est moralement plutôt confortable…
C'était clair, Nous, petits Français Idéalistes et enthousiastes, étions les dindons de la farce hollywoodienne qui nous échappait. Et, le grand soir venu, elle eut lieu, cette farce, dans des proportions cauchemardesques...
Il y avait là de très mondains invités parisiens triés sur le volet, amenés à grands frais en avion et logés au luxueux Beverley Hills (tandis que nous autres, modestes tâcherons qui exécutions des numéros, l'étions dans un petit hôtel près de la salle de répétition, à Santa Monica).
Car il faut, pour parvenir à découvrir sa vraie nature de peintre, l'expression de sa personnalité particulière, son langage pictural à soi, qui fait que l'on reconnaît immédiatement la main de tel ou tel artiste – comme on doit trouver sa voix
Ta mère adorait cet endroit,elle y était sans arrêt fourrée,à faire l'ouvreuse,à l 'occasion,ou en remplacement d'assistante pour un magicien...Elle exécutait même parfois un petit numéro de danse à l’entracte!Quand elle pouvait faire quelque choses là,elle était folle de joie.