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Critique de Presence


Ce tome contient les 6 épisodes parus en 2005/2006 qui forment une histoire complète et indépendante de toute autre. le scénario est Warren Ellis, et les dessins de JH Williams III.

Michael Jones vit à Los Angeles. Il est le rescapé d'une mystérieuse expérience à base de substances psycho-actives à laquelle il s'est soumis de son plein gré pour se faire oublier après avoir dérapé dans son précédent métier d'espion. Comme tous les espions à la retraite, il est assigné à résidence à Los Angeles. Il est détective privé pour toutes les enquêtes qui touchent à ces retraités d'un genre particulier. Néanmoins il se retrouve contraint d'accepter un boulot de commande : retrouver un film à caractère pornographique d'une valeur inestimable pour les collectionneurs, pour le compte d'un ancien colonel à qui on l'a dérobé. L'enquête de Jones l'amène à rencontrer de bien étranges individus : une femme ayant survécu à des injections mystérieuses et émettant des phéromones angoissant ceux qui les perçoivent, la patronne d'un réseau d'activités pornographiques, une hardeuse confirmée de 27 ans, les 3 filles du colonel, une autre hardeuse (débutante celle-là) et quelques hommes de main pas commodes.

À la lecture de ce court résumé, il est évident que Warren (le scénariste) a décidé d'évoquer des comportements que la morale réprouve. Il utilise la trame d'une enquête pour aborder les questions de l'industrie du film pornographique avec un zeste d'espionnage et d'expériences médicales. le moment le plus fort de cette histoire est certainement la discussion entre Michael Jones et la hardeuse d'expérience. Warren Ellis expose sans sourciller les conditions de travail de ces femmes et la durée de leur carrière (moins d'un an) dans un milieu où le gonzo domine. Pour le reste, l'impression avec laquelle le lecteur du récit ressort est qu'Ellis n'a pas pris la peine e développer grand-chose. Il parsème son récit d'éléments intrigants qui ne sont jamais développés. L'enquête aurait été menée par une personne n'ayant pas joué le cobaye, la trame du récit n'aurait pas été sensiblement différente. Les exactions commises par le colonel restent un point très secondaire du récit, alors qu'elles auraient mérité à elles toutes seules plusieurs épisodes (ce tome regroupe les 6 épisodes de la minisérie correspondante parue en 2005). de la même manière, Ellis s'amuse à évoquer un film pornographique tourné par Adolf Hitler, sans en approfondir la teneur ou la véracité historique. Chaque élément n'est là que pour faire genre, à savoir bizarre, étrange ou choquant. Mais il ne s'agit que d'éléments de décors sans épaisseur et sans réelle importance dans l'histoire.

Malheureusement les illustrations de J.H. Williams III sont également là pour faire style, tout en étant très superficielles (au sens de dépourvues de substance). Cet illustrateur est l'un des plus doués de sa génération. Pour vous rendre compte de ce dont il est capable, je vous conseille les 5 tomes de la série des Promethea d'Alan Moore (à commencer par Promethea, tome 1) ou l'épisode qu'il a illustré dans la série des Seven Soldiers de Grant Morrison (dans Tome 4 : A jamais dans nos mémoires). Pour cette histoire, Williams III marie des pages avec des traits très fins, des cases fortement encrées et quelques pages peintes. Il crée à merveille une ambiance urbaine très ensoleillée parsemée d'îlots de pénombre des plus inquiétants. Chaque individu a les traits marqués d'une manière ou d'une autre et tous ont une apparence très visuelle. Ainsi Michael Jones se promène avec un masque à gaz autour du cou tout du long du récit. de la même manière qu'Ellis parsème son récit d'e bizarreries sans conséquence, Williams III parsème ses illustrations de bizarreries sans explication rationnelle, ni fonctionnalité.

Cette lecture est d'autant plus frustrante qu'elle est le fruit de 2 créateurs exceptionnels qui auraient dû réussir à faire beaucoup mieux que ça. Dans le même style, je vous conseille plutôt Fell, tome 1 : Snowtown qui tient plus ses promesses. Pour autant "Desolation Jones" n'est pas non plus à jeter. L'enquête policière tient ses promesses. Les personnages sont hauts en couleur. La ville de Los Angeles n'a jamais paru aussi surnaturelle et artificielle. Et cette histoire constitue un très bon divertissement. Les remontées de substances chimiques provoquent des hallucinations intéressantes. La mise en page reste inventive et la mise en couleurs de Jose Villarrubia est aussi splendide qu'inventive et maîtrisée. Et cette équipe a le bon goût de dénoncer la condition féminine dans la pornographie sans se vautrer dans un voyeurisme nauséabond : ils ne montrent pas ce qu'ils dénoncent comme pratiques immondes chez les autres.
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