FIN 2 (25.06.99)
les yeux fermés
une sorte de fuite de langue
sans contrôle assez lente
mais continue
sur le même ton
parole seule qui file dévide
on ne sait quel passé
encore sensible
mais sans personne en face
qui puisse saisir
ce qui passe
dans cette bousculade du temps
incapable de rejoindre
on écoute
ce qui ne s’adresse pas
mais doit sans doute être dit
si on pouvait là dans les mots
changer
ce qui est à voir
non
changer non c’est toujours devant
les mots
alors l’oeil
si on pouvait bouger l’oeil
non
de longs visages gris continuent
de revenir et de passer
très lents
si on tentait de se replier
sans mots
il n’y aurait peut-être plus
rien
*
ciel clair soir impeccable
calme
au creux du talon
une veine bat
dans le repos de l’air
c’est tout
"cette glycine
un bonheur"
SEUL 3 (1.12.99)
tout le corps rentré
serré nez cherchant l’air
cage trop courte
tête sur l’évier
à n’en plus vouloir de soi
ou bien boxer les mots
et comme tordre le dehors
l’écraser
le marteler
jusqu’à une bouillie de voir
colère
LAS 3 (14.06.99)
on touille un reste de mots
le juste nécessaire
on a fait le plus dur
bleu risible
on rouille on tousse
on finit par vieillir
c’est plus simple
on l’aura vue venir
l’usure
NON 3 (2.05. 99)
si on pouvait dans les mots
changer
ce qui est à voir
non
changer non c’est toujours devant
les mots
alors l’œil
si on pouvait bouger l’œil
non
de longs visages gris continuent
de revenir et de passer
très lents
si on tentait de se replier
sans mots
il n’y aurait peut-être plus
rien
si on pouvait là dans les mots
changer
ce qui est à voir
non
changer non c’est toujours devant
les mots
alors l’œil
si on pouvait bouger l’œil
non
de longs visages gris continuent
de revenir et de passer
très lents
si on tentait de se replier
sans mots
il n’y aurait peut-être plus
rien
SEUL 7 (16.00.00)
c’est assez simple tout ça en somme
comme une cuisine
de peurs et de chocs
dedans
les mots c’est après
bêtement mot à mot
on récupère de quoi
parler
mot à mot bleu à bleu
c’est très lent de
récupérer
assez
LAS 4 (14.09.99)
se sentir vieux d’un coup
trop
comme si tout le corps
refluait
quelle voix encore
dans la traîne des mots
coques coquilles coquillages
voilà ce qui
reste
pilé très fin
usé jusqu’à poussière
levée par le vent
sable
LÀ 4 (21.07.00)
Il faudrait un mot comme
vert mais
jaune
des feuilles d’acacia sans vent ou presque traversées plus que baignées par la lumière du soir d’été sans bouger ou même bougeant un peu comme si la lumière faisait bouger plus que l’air le soir
dans un jaune vert donc
un peu comme le triangle du toit
sur la haie des fusains l’autre jour
mais
l’acacia d’un vert moins lisse
pétale plutôt que feuille
SEUL 2
(30/05/99)
une peau morte
au mieux tendue dessous
encore
voilà
on continue sur ce qui reste
commun de quoi d'enfance comment
commune
ça va vite jusqu'à sans voir
si vite on se dit c'est pas grave
il en reste assez
et non
garder qui quelle mémoire
au fond dans ce qui bouge
arbres
si long pour monter
et puis coupés
net avec leur odeur partis
leurs écureuils rapides
d'un coup de scie l'enfance
on ne la retrouve plus
à quoi bon
depuis combien d'années déjà l'absence
des passe-crassanes
et pourtant non
bien sûr pour rien mais
quelque chose au moins comme
dire que résiste net sec clair
le goût de cette poire
ou l'odeur de cette résine sur des doigts sales
qui collent