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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
L'originalité de ce roman tient au fait que les narrateurs omniscients sont ici des esprits (exemple : les ogbanje), habitants de l'âme d'Ada, l'héroïne. Des esprits rarement bienveillants, souvent mal intentionnés, à qui la jeune fille sert d'enveloppe corporelle, de vaisseau qu'ils empruntent avec indifférence, n'ayant d'autre intérêt que de satisfaire leurs pulsions. Ici l'attirance pour le féminin, qui pousse Ada dans les bras d'une autre femme. Là, une soif de sang inextinguible qui mène Ada à la scarification. Ces esprits manipulateurs font d'Ada une marionnette, un zombie mal dans sa peau martyrisée, jouet des forces qui se disputent sa conscience. Pour apprécier ce roman à sa juste mesure, il faut être sensible à cette culture des ancêtres, à l'incarnation ou à l'animisme. Ce n'est pas mon cas. Je suis trop attachée au libre arbitre pour ne pas m'agacer de la passivité de cette jeune femme, de son fatalisme, d'une soumission qui ne la rend responsable d'aucun de ses actes. En lisant ce roman, on comprend mieux le sens du mot possession : Ada a été expropriée de sa personne, car les esprits en sont devenus les maîtres.
En définitive, ce que j'ai préféré, c'est la confrontation avec « nos croyances » occidentales, telles que la psychanalyse ou cette religion fondée sur un homme cloué sur une croix. le choc des cultures est alors à son comble, il met en évidence leur possible ingérence.
L'eau douce est un premier roman inspiré, impressionnant de maîtrise, mais difficile d'accès.
Bilan : 🌹

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Quel roman surprenant que L'eau douce'.
Akwaeke Emezi a choisi d'aborder la folie et les troubles de la personnalité d'une manière originale. Elle donne la parole aux esprits qui sont entrés en possession d'Ada, une jeune fille nigériane. Ces esprits maléfiques la guident dans les choix qu'elle fait dans la vie.
Rien n'est expliqué clairement, mais ce n'est pas difficile d'imaginer ce qui se passe.
Je peux dire que le livre se lit sans difficulté (pour moi en tout cas) dès qu'on s'habitue avec l'idée que ce sont les esprits qui parlent. Il faut cependant s'y trouver parmi leurs différents noms et fonctions qu'ils exercent.
A la fois fascinant, dérangeant et puissant, ce finaliste du National Book Award en 2019, ne laissera personne indifférent. Il faut pour cela oser s'y aventurer.

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Ce premier roman de l'écrivaine nigériano-tamoule, présenté comme « profondément autobiographique », se prête à de multiples lectures. Pour ma part, étant un grand admirateur de l'ethnopsychiatrie de Tobie Nathan, j'y ai trouvé une excellente expression romanesque de ses explications des pathologies psychiatriques des migrants de différentes origines africaines qui évoluent dans une cosmologie selon laquelle les humains sont possédés par des esprits.
La naissance et la jeunesse de l'héroïne du roman, Ada, ont pour narrateur principal un « nous », les ogbanje, des divinités qui la dominent, pour le pire beaucoup plus souvent que pour le meilleur. À partir de l'accession à la sexualité, vécue par Ada de façon traumatique, l'une de ces obganje, dénommée Asughara par elle-même, prend le dessus sur les autres. Asughara est caractérisée par un goût immodéré pour la luxure, la cruauté et la perfidie, qui s'exerce autant à l'encontre d'Ada que de ses partenaires, des garçons eux-mêmes choisis de préférence parmi les plus maléfiques et violents. le récit conté par Asughara, qui forme la plus grande partie du roman, où très rarement la parole est laissée à la protagoniste, se compose donc majoritairement de scènes de stupres, de viols, de scarifications et autres tortures qu'Ada s'inflige, jusques et y compris une tentative de suicide opérée sous la domination de cet esprit malveillant. Les dialogues entre la Bête et la jeune fille révèlent l'ampleur de la manipulation dont cette dernière est la victime. La reconquête d'Ada par les autres obganje, suite à un véritable procès stalinien entre esprits dont un dénommé Saint Vincent, se solde par une mastectomie de la jeune femme qui s'inscrit dans ce qui ressemble à un début de transition vers le sexe masculin, laquelle laisse donc douter de la bienveillance de l'ensemble de l'aréopage des esprits... Cependant il faut noter que si cette cosmologie est uniquement paternelle-africaine, l'héritage religieux maternel existe aussi : il consiste dans une sorte de dévotion chrétienne – plutôt puritaine – conformément à laquelle le christ, alias Yshwa, fait également partie du conclave et assume un rôle d'antagoniste en particulier d'Asughara (cf. cit. 2 et 3).
La composante migrante de cette oeuvre se retrouve à la fois dans la biographie de l'autrice et dans le récit lui-même de multiples façons. En se limitant au roman, le personnage maternel, Saachi, originaire de Malaisie, « de l'autre côté de l'océan Indien », vit en continuelle migration : du Nigeria où elle quitte son époux (rencontré à Londres) et trois enfants, à l'Arabie saoudite, puis aux États-Unis où Ada grandit et où se déroule la plupart de l'action narrative. de plus, conformément à ce que l'on sait de l'ethnopsychiatrie, le début de la « guérison » d'Ada, son « Salut » dit « Nzoputa » (chap. XX-XXII), ou tout au moins sa quête spirituelle des racines de ses troubles (et des siennes propres) passe par un retour en Afrique : « Rentre à la maison, chantaient mes frèresoeurs. Rentre à la maison et nous ne te chercherons plus d'ennuis » (p. 251).
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Avant même sa naissance, Ada est une petite fille qui n'aura pas une vie comme les autres. Alors que les esprits igbo la façonnent dans le ventre de sa mère, les portes entre le monde des humains et le monde des esprits restent ouvertes et un certain nombre d'esprits restent bloqués dans le corps d'Ada. Sa vie va en prendre un coup, surtout quand les frèresoeurs de l'autre côté veulent s'en mêler...
Plus tard, alors qu'elle habite aux Etats-Unis pour étudier, elle va subir un viol par son petit-ami, et suite à cet événement traumatique un esprit va dominer tous les autres, un esprit qui a le goût pour la destruction et l'auto-destruction...

J'ai adoré ce roman, du début à la fin !
Tout au long du livre, vous serez du point de vue des esprits, ce qui peut amener une certaine distance avec Ada le personnage principal, mais quand l'esprit dominant va ressortir, j'ai vraiment vu la différence avec le groupe, il a vraiment une position plus maternelle et protectrice et je me suis plus attaché à Ada. J'adore les points de vue omniscient dans les romans, donc cette distance avec Ada ne m'a vraiment pas dérangé.

Attention, on y traite de scarification, de viol et de suicide. Les passages qui les abordent ne sont pas écrits en détail, mais l'auteur fait comprendre ce qu'il se passe. L'auteur a voulu utiliser les esprits igbo pour "personnifier" la maladie mentale, les voix dans la tête, et Ada tombe dans l'auto-destruction un moment dans le récit. Mais si ça peut vous rassurer, elle remontera la pente.

Je recommande vivement ce livre, il est brillant.
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Eau douce d'Akaeke Emezi est dans ma pile à lire depuis un bout de temps. Ce récit m'intéressait car l'auteur est non-binaire, mais aussi car la thématique de la santé mentale semblait être traitée d'un point de vue unique, avec de nombreuses influences. Je me suis donc lancée dans ce court roman nigérian avec appréhension et hâte.

Ada est une jeune femme compliquée. Habitée par des dieux igbo depuis très jeune, elle semble rarement totalement elle-même. C'est représenté par une narration par le « nous ». En effet, il est rare qu'Ada prenne la parole. Ce sont les dieux qui s'expriment le plus, montrant leur contrôle sur elle, la place qu'ils prennent dans chaque décision, chaque émotion. Lorsqu'ils parlent d'elle, c'est toujours comme d'un hôte, notamment au début. Ils l'appellent l'Ada, comme quelque chose d'objectivé, sans conscience propre, un jouet entre leurs mains. Ada est donc en elle-même un mystère, le lecteur est cependant plongé dans son « système », car c'est ainsi que l'on nomme la structure des troubles dissociatifs de l'identité, ce dont semble souffrir la jeune femme.

C'est un élément très intéressant, car l'auteur maitrise très bien son sujet. Ada peut discuter avec chacune des incarnations qui l'habitent. Elles ont par ailleurs chacune un rôle précis pour protéger l'hôte à leur façon. D'où l'apparition d'une personnalité puissante suite au traumatisme de trop. On voit ainsi une différence de points de vue entre la vision occidentale de la maladie, avec de la thérapie et des médicaments, et la vision animiste et divine des pays orientaux. Il est ainsi difficile de bien comprendre tous les aspects des esprits, méprisants des humains. La question n'est pas tant de savoir laquelle est la meilleure, mais de voir le cheminement d'Ada entre des cultures différentes, vers la guérison ou l'acceptation. Car sa vie est ponctuée de profondes souffrances.

Une partie fascinante du roman réside dans la capacité de l'autrice à nous faire tenir sur le fil aux côtés de la protagoniste. Nous entendons peu la voix d'Ada, mais elle nous parvient à travers un voile de souffrance et d'incompréhension. Asughara est le nom que se donne l'esprit qui apparait suite à un épisode traumatique d'Ada. On comprend qu'elle prend le pas sur le reste du système, voire qu'Ada est plus souvent Asughara qu'elle-même. Cet aspect d'Ada lui fait prendre des décisions dangereuses, que ce soit dans ses relations amoureuses ou dans sa tendance à l'auto-mutilation, ici décrit comme une forme de sacrifice pour les divinités. J'ai eu l'impression qu'Asughara avait pour but de donner à Ada une impression de contrôle.

Il y a des passages très touchants, mais aussi très difficiles à lire. Asughara est en effet une facette pour le moins cruelle et manipulatrice, bien que parfois attachante dans ses moments les plus protecteurs. On perçoit un coté très autobiographique dans certains moments. Une construction qui rend le récit plein de sincérité. Ainsi, Ada explore sa fluidité de genre, ses attirances pour les hommes et les femmes, notamment grâce à l'apparition d'un esprit représentant sa part masculine. Les relation d'Ada avec les autres sont complexes, mais le fort attachement qu'elle a avec ses semblables lui apportent une touche de vie, comme une flamme qui brûle d'autant plus fort qu'elle est éphémère.

Avec sa narration originale, Eau douce nous présente une jeune fragmentée, partagée entre les Dieux igbos et le Trouble dissociatif de l'identité. le roman semble décliner le principe de fluidité de toutes les nuances possibles. Fluidité dans la personnalité changeante d'Ada, fluidité dans le genre, les relations… Sans cesse partagée, jamais entière, toujours écartelée. La plume flamboyante de l'autrice met en exergue la souffrance d'une protagoniste qui se cherche, condamnée la majorité de sa vie à être un objet, un vaisseau pour les esprits, une conquêtes pour ses relations amoureuses… C'est aussi l'histoire d'une quête d'identité et d'acceptation.
Lien : https://lageekosophe.com/202..
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Eau douce.
Nigeria. On suit la jeune Ada. Enfant habitée par des esprits. Façonnée par différentes personnalités qui vont s'entrecroiser et se batailler le droit d'exister. Enfant, ils sont là avec elle. Protecteurs de cette enveloppe de chair qui leur a permis de quitter leur monde.

À travers Ada, c'est toute une mythologie qui se façonne. Celle des esprits. D'une culture igbo. le roman se construit sur une base ésotérique, peut-être aussi un peu fantastique. Les premières pages et premiers chapitres sont complexes. Il faut pouvoir s'immerger à cette cosmologie inconnue. Comprendre. Situer. Nommer les différents esprits. Ce sont eux qui racontent, qui prennent corps, sont les narrateurs d'une histoire à laquelle ils ont pris part sans nécessairement le vouloir. La complexité se forme via ce voile qui se pose sur Ada. Rarement le personnage principal expose ses émotions, celles-ci passent par le prisme des esprits, des autres personnalités qui galopent et étouffent Ada.

Un roman à deux strates se forme au fur et à mesure qu'on suit les péripéties de l'Ada. La première est d'y voir le récit fantaisiste d'une possession. D'un monde gorgé d'esprits. L'autre strate offre la vision d'une caboche nouée d'une maladie mentale.

L'auteure ne s'embarrasse pas d'incorporer des parcelles de bonheur et autres fantaisies pour atténuer la noirceur des propos. C'est cru. Parfois violent. Malsain. Mais la maladie n'est pas un terreau de tranquillité. C'est le duel constant. La bataille. le cataclysme mental. Une écriture ciselée, sans fard. Elles luttent les personnalités, elles croquent, elles dérangent, elles distillent doute. Elles.

Une pluralité d'envies, de caractères, de sexualités.

Une belle découverte.
Un roman fort, éprouvant.
Un récit duquel on s'extirpe difficilement tant la construction est dense.
Lien : https://hubrislibris.com/202..
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Un romain pour le moins déstabilisant.
Le lecteur est invité à suivre la vie d'une jeune fille, Ada, née au Nigéria puis partant étudiée aux Etats-Unis, alors qu'elle tente encore de maîtriser les esprits qui ont pris place dans sa tête. le lecteur découvre certaines croyances de cette culture, la difficulté d'être soi-même ainsi que de se reconstruire après un drame.
L'originalité tient dans le fait que l'histoire nous est racontée par ces-même esprits. Une aventure originale et complexe dont il peut parfois être difficile de rentrer dans cet univers. Néanmoins, je ne peux que vous inviter à oser ce voyage. Un livre qui, j'en suis sûr, ne peut laisser aucun lecteur indifférent.
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Je viens sur la pointe des pieds pour vous parler de ce roman terriblement énigmatique, une expérience plus qu'une lecture : Akwaede Emezi casse les codes du roman et nous propose un voyage dans la vie, et surtout dans la tête, d'Ada mais surtout des entités qui vivent en elle.

La quatrième de couverture n'a pas le mérite de bien présenter l'ouvrage puisqu'il range dans une « boîte » des faits alors qu'en réalité, l'histoire est très nébuleuse et difficilement palpable. Ne vous y fiez donc pas aveuglement, vous risquez d'être étonné.es

Si Ada est le personnage principal, c'est elle que l'on croise le moins : la narration pourra surprendre dès le départ par ce « nous » et ce récit très entrecoupé entre le monde réel et le monde des esprits. Les va-et-vient incessants entre ces deux mondes va générer une instabilité de la narration poussant à s'accrocher aux branches pour suivre le récit : on adhère (comme moi) ou pas, mais l'originalité de l'écriture est bien là. J'ai été emportée par ces esprits qui nous racontent Ada, qui cassent les frontières et permettent de transcender la représentation qu'on a d'un être humain pour nous proposer une autre réalité, des possibilités infinies. J'ai aimé que l'histoire ne soit pas racontée par celle qui est occupée mais par ceux qui occupent.

J'ai adoré découvrir des mythes et légendes d'un autre pays et les sujets traités : le trouble dissociatif de l'identité, les pulsions négatives et la raison de leur apparition, l'attirance à la souffrance, la perte de soi, le dépassement des limites… C'est un livre volcanique, certains passages prennent à la gorge et ce sont ceux qui restent en mémoire malgré quelques les petites accalmies (qui permettent de se reposer pour mieux tomber).

La fin poétique (et ouverte) s'inscrit dans cette nébuleuse qui auréole le roman, et clôture à merveille ce roman unique.
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Je sais même pas comment tourner mes phrases pour pas salir le projet d'Akwaeke Emezi dans ce roman.

C'est tellement violent, sombre et beau que j'ai lu/écouté tout comme si j'avais cinq ans et qu'on me racontait une histoire vieille de mille ans.

J'ai jamais pris le temps de m'intéresser à la culture nigérienne, encore moins à sa mythologie. Je peux vous dire que malgré l'embrouille du début à comprendre quoi foutre où et qui était qui c'était pas évident.

J'avais tellement envie de poursuivre que c'est devenu une évidence, un déclic. le truc qui poppe dans ton corps comme si les narrateurs faisaient finalement parti des voix intérieures qui viennent cogner de temps en temps, bien à l'abri, sous ton crâne.

L'Ada est une femme, née femme en tous cas on en est certain. Elle est aussi le réceptacle de plusieurs divinités aux facettes multiples qui se disputent ses émotions, ses peurs, ses angoisses, ses pulsions. Toutes ces personnalités frèresoeurs tentent de faire ce qu'ielles peuvent avec l'Ada qu'on pourrait croire marionnette mais pas tant que ça au final.

Akwaeke Emezi met des mots sur des choses que j'avais jamais lu avant, mais tout génie soit-elle, elle te révèle. Je te jure qu'elle te révèle. Faut s'accrocher, ça parle de viol, d'inceste, de ruptures amoureuses, de suicide, de rejet de la société en tant que minorité et pourtant je te jure que ça fait écho.

Qu'elle soit homme ou femme, peu importe le moment l'Ada te transperce, te retourne, t'éblouis, te bouscule, te fait te sentir honteux. Super honteux.

Putain. Quitte à enfoncer des portes ouvertes et dire les choses avec plus de maladresses que certains savent faire (j'en ai rien à secouer tkt) ; c'est pas évident de percer le spectre mainstream de la littérature.

On te sort ton bouquin suivant son potentiel aura, saisonnalité à l'appui, avec un budget com qui diffère suivant la qualité de ton roman ou de qui t'es et si tu rapportes assez de thunes.

Eau Douce est sorti début février 2020, autant te dire qu'on croyait en lui autant qu'une pub pour mycoses des pieds, diffusée à 3h30 du mat' « pour lui donner sa chance ».

Heureusement qu'avant les libraires certains représ te parlent de ces potentielles pépites, et qui ont le talent pour t'en parler, assez en tout cas pour diffuser l'envie. Des représ qui font bien leur taf et un réseau de consoeurs (oui pardon y'a aucun mec qui m'a parlé de ce livre, ce qui est une putain de honte), consoeurs curieuses de voir évoluer ce spectre, cette possibilité d'être le plus inclusif possible.

Je viens de finir ce roman et j'ai la chiale de tristesse/beauté. T'es cap ou pas ?
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