L'attention de Tobie Nathan est portée sur le sens des objets qui nous entourent au quotidien. Gourde, jean, pass sanitaire, tapis de yoga ou encore voiture sont passés au crible dans "Ethnomythologiques", paru chez Stock. Ce livre de chroniques entrelacent l'ethnologie, la mythologie et la psychanalyse pour expliquer les choses de nos vies.
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Il faut attacher la plus grande importance aux paroles des fous et des inconnus, à ces paroles qui surgissent de nulle part. Elles portent souvent les réponses aux questions que l'on ne se pose pas encore.
Les hommes remplacent si souvent la tristesse par la fureur.
Les deux enfants rivalisaient pour la mémoire des détails, ceux des règles religieuses, des interdits alimentaires ou des rites, et pouvaient réciter dans leur intégralité les prières quotidiennes. En lecture hébraïque Joe surpassait Zohar, lui qui quelques mois plus tôt ne déchiffrait pas une seule lettre. Alors que Zohar était meilleur en mémorisation, lui qui écoutait chaque jour des prières chantées par son père. Ils apprenaient en jouant, leur jeu était un apprentissage, leur apprentissage, un jeu. On aurait dit deux lionceaux s’initiant à la chasse et se mordillant les oreilles.
Lors d'un diner, Farouk lui avait glissé : "Méfiez-vous de votre mari, il a déjà fait disparaître deux épouses."
Elle avait éclaté de rire et avalé son verre d'un trait. "Ne vous en faites pas pour moi, Sire ! Une vraie femme est comme la terre. Elle survit à ceux qui la piétinent. "
Devant une personne terrorisée, on est terrorisé à son tour, et sans même savoir pourquoi. "Soigner" la terreur ne peut jamais consister à un partage de l'émotion. Les comptes-rendus des journalistes, les prises de position des politiques, qui faute de penser, paraphrasent indéfiniment l'émotion, se révèlent auxiliaires de l'action terroriste, contribuant à répandre la terreur.
Nous autres, Juifs d’Égypte, nous étions là avec les pharaons, puis avec les Perses, les Babyloniens, les Grecs, les Romains ; et lorsque les Arabes sont arrivés, nous étions encore là… et aussi avec les Turcs, les Ottomans… Nous sommes des autochtones, comme les ibis, comme les bufflons, comme les milans. Aujourd’hui, nous n’y sommes plus. Il n’en reste plus un seul.
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Cette fois, il ne lui restait plus rien, pas un centime. La vie pouvait recommencer de zéro ! Il ne savait pas, l’innocent, que lorsqu’on croit recommencer, on ne fait que répéter, et parfois, ce sont de très anciennes histoires.
Je pense que Magda Goebbels, dès la fin 1943, se rendait compte qu'une issue victorieuse était impossible.
Elle a fait, avec ses enfants, ce qu'on appelle un suicide mélancolique.
C'est un récit du début des temps, un temps avant le temps, avent le temps où on a commencé à compter le temps.
Je suis certain aujourd'hui que la radicalité des jeunes gens que j'ai rencontrés résulte de la difficulté grandissante de nos sociétés à intégrer la différence – non pas celle du « semblable » dont on nous rabat les oreilles, mais de l'autre, vraiment autre, radicalement autre. Si nous persistons à partager un monde de « semblables », il faut nous attendre à ces conflits sans fin.