Nulle part
quelqu’un n’a pas posé sa main sur ma nuque
aussi le manque n’a-t-il pas de visage
il est là simplement comme un toucher froid
un rappel de la parfaite solitude
(Bernard Noël)
Quand la lumière s’efface…
Quand la lumière s’efface
presque complètement
quand les lumières respirent encore
quand les drapeaux s’inclinent
quand les hommes se taisent
quand l’esprit se meut lentement dans le silence
quand la mer et le soleil se conjuguent dans la nuit
à travers les ondes qui respirent
quand la lumière efface en toi
la dernière lueur du jour
et que tu entres dans le silence de la nuit
avec le soleil sous les eaux
dans le silence de la nuit.
(Antonio Ramos Rosa)
viens, viens, sorbier doux, marron d'averse
et vous glycines, clef de Fontfroide
je tends les mains : ne suis-je pas le
même j'attendrai que se renverse
la proue de brindilles puis d'étoiles
je guetterai sous les lilas pâles
(Jacques Roubaud - France)
Un oiseau danse au coeur du feu
une lune gît dans mes profondeurs et l'aigle dans le ciel du corps
est prémices de soleil, fenêtre sur le commencement du monde
lors de la séparation de la terre de l'eau de l'obscurité et de la stagnation.
(Mohammed Afifi Matar - Égypte)
Les morts sortent la nuit sur les routes à Arroub
Ils descendent des collines
Des vieux couloirs
Des vignes
Maculés de leur mort et de leur nostalgie
De la blancheur de leur sommeil
Et de l'appel à la prière du soir
(Ghassan Zaqtan - Palestine)
Pourquoi les oiseaux perdent-ils leurs plus belles plumes
Dans le climat des capitales ?
Et que fait l'étranger dans une ville qu'il connaît ?
(Walid Khaznadar - Palestine)
Mais qui pleure dans le monde
Qu'est-ce que j'entends, le bruit d'amers sanglots,
Pus aigu que le hurlement d'un chien, que le cri de la mouette,
Des sanglots au-dessus des toits des sanglots sous les routes
Personne ne parviendra plus à dormir désormais.
(Nurith Zarchi - Israël)
Sur le plateau pierreux aiguisé par le souffle, dans l'heure grave et les voix délivrées, dort un village accroupi dans sa feuille.
Là-bas, derrière la ride de la terre, il y a la mer immensément présente, que rien n'abrège, et ni même un oiseau.
Pays du nord parmi la figue et le raisin, je me souviendrai longuement de tes maisons de pierre froide, avec leur dos de treilles, --- comme un troupeau engourdi par le vent.
(Salah Stétié - Liban)
Blondoiement de l'horizon
dans la brume que disperse le matin
Vapeur traînant sur les champs
et seulement ma pupille hantée
imaginant l'escarpolette a embrassé la terre
s'est arrêté loin loin,
que celle qui s'est enfuie se mire
là-bas sur le quai ordonne sa chevelure
attend l'instant à venir
(Chawqi Baghdadi - Syrie)
Allongée de tout mon long sur la steppe
Dans le bleu du ciel
Le monde, lui et moi, nous deux
Nous sommes très jeunes encore plus jeunes
Notre sourire
A un goût d'école buissonnière
(Gulten Akin - Turquie)