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Critique de mesrives


J'ai retrouvé Tomas Espedal ou plutôt je l'ai découvert il y a peu. Pendant longtemps j'ai cru qu'il était espagnol, la consonance de son nom je suppose. J'imaginais le dénicher à Lanzarote mais c'est sur l'île d'Askoy en Norvège que je l'ai surpris. Je me suis invitée, la porte de la maison était ouverte, l'automne sentait l'été. A son bureau devant une fenêtre, un horizon aux couleurs des saisons. Un homme englué dans les méandres de l'écriture, penché sur un écritoire face à l'énigme de la création artistique.


Contre l'art (les carnets) un genre d'aveux, de confessions, le cri d'un homme surpris par la douleur du deuil, la perte d'un être cher, un esprit entré en confusion. Un homme en apnée, plongé en solitude malgré la présence de sa fille à présent orpheline.

Presque une transe hypnotique, l'auteur quitte son présent et habite le passé, il se dédouble, se multiplie pour trouver la clé, des réponses à ce qu'il est aujourd'hui, traquant les ressemblances possibles ou réelles avec les membres de sa famille et les similitudes de leur parcours. Seul dans le silence, il est le narrateur, un narrateur qui évolue dans des espaces temps déversés par le flux de ses pensées, les divagations de son esprit. On l'observe, on l'écoute, on le suit, on se rapproche de lui peu à peu, heureux d'être son complice, à travers l'écho de son histoire familiale et les nombreux auteurs qui l'ont accompagné, Doris Lessing, Thomas Hardy, Agnar Mykle et Jens Bjorneboe.

Contre l'art (les carnets), Tomas Espedal a bu la tasse, il revient à la surface, c'est le temps de la claire voyance, la tête hors de l'eau, il prend du recul, son récit s'éclaire. Des révélations sur son enfance, son adolescence, une déclaration d'amour à sa mère, de la reconnaissance pour ceux qui l'ont aimé et l'aimeront encore.

Un texte en deux parties l'automne, avec Septembre, le printemps avec Avril et dans son coeur des moments de pure poésie. Une écriture sensible, colorée et poétique pour évoquer au-delà de la souffrance et de l'absence la mort, ses morts, la maladie mais aussi la vieillesse et l'obsession de l'écriture.

Funambule des maux, boxeur de mots, travailleur de lettres, libérateur de l'être, le rideau noir est levé. Je laisse Tomas Espedal vidé, heureux, debout et vivant, boxeur autrefois mais poète toujours.
Un voyage émouvant dans les territoires de l'intime.

Après le succès de Marcher – ou l'art de mener une vie déréglée et poétique publié en France en 2012, Contre l'art en 2013 semble plus confidentiel, tous deux ont été nominés pour le Grand Prix de littérature du Conseil nordique. Je remercie Terje Sinding pour cette superbe traduction.

J'ai beaucoup aimé. Une lecture bonheur.

Ah j'oubliais, le livre de Tomas Espedal achevé, l'un des exergues choisis par l'auteur, celle de Kristian Lundberg (1966-2022) écrivain suédois prend tout son sens : « C'est aussi une tâche qui exige du courage : rester. »
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