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Citations sur La belle histoire d'une jeune femme qui avait le cano.. (14)

Je me dis qu’il faut toujours accompagner quelqu’un qui part avec de la joie, c’est cela qu’il doit recevoir, ni larmes ni cris, juste une passerelle faite de rires, d’épaules et de souvenirs sereins dispersés sur le dernier souffle.
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Pendant tout le début de ma vie je suis passée au travers des années, mais c’était tout juste, comme dans un couloir très étroit, mes épaules frôlaient les bords de l’existence et je devais forcer un peu pour passer. Juste à peine. J’ai vécu passable.
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Un soir j'étais chez moi, sur mon lit, assise en tailleur, ma couverture sur les épaules je mangeais un yaourt aux fruits, de la framboise, toute seule je regardais une émission à la télé, des gens parlaient, le sujet c'était: "Familles nombreuses, j'en veux encore." Une femme en avait six, l'autre sept, huit et neuf, elles étaient ravies et je ne crois pas qu'elles étaient au courant qu'on est sept milliards sur Terre, alors continuer à accoucher ce n'est peut-être pas la meilleure idée quand on a une vue globale de la situation.
p. 236
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Il m’a dit « on verra ça une autre fois » et a insisté pour que je lise « lis, la culture, c’est important ».
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Elle ne m’a jamais frappée, pas une seule fois, mais sa violence était plus grammaticale, ça a plus de style non, plus de classe, sans doute car elle me cognait à coups de phrases avec sa bouche magnifique pendant que moi je l’aimais.
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On partait avec Mme Munier qui rendait visite à des résidents et nous on restait à l'extérieur pour jouer, mais surtout pour voir la cour de la maison des fous, c'est comme ça que les gens l'appelaient et je les entendais dire "chez les tarés, chez les dingues". Martin et moi on utilisait trois mots: les gens cachés.
p.48
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JE VIENS D’UNE SORTIE DE ROUTE

Ma mère a crié, bien sûr, mais ce n’était pas la douleur d’accoucher, c’était juste qu’une gosse sortait d’elle pour l’enfermer. « J’ai failli mourir pour ça » c’était le refrain de sa colère et elle me pointait du doigt comme pour tirer sur une cible, bam dans le mille.

Ma mère est belle.

Moi je suis ça, une chose, et j’ai passé du temps à me rendre coupable de la misère de cette femme qui avait raté sa vie à cause de moi… avec le canon du fusil dans ma bouche, je suis sûre qu’elle n’a pas accouché, non, c’est moi qui ai fait tout le travail, qui suis sortie seule pour m’enfuir, des coups de tête molle pour écarter les lèvres de ma mère qui auraient voulu garder le silence.

Elle ne m’a jamais frappée, pas une seule fois, mais sa violence à elle était grammaticale, ça a plus de style non, plus de classe, sans doute car elle me cognait à coups de phrases avec sa bouche magnifique pendant que moi je l’aimais.

De temps en temps, en passant dans le couloir, je l’entendais, quand elle était furieuse contre sa vie, déprimée et révoltée contre sa misère, je l’entendais se parler à elle-même « je l’ai chiée cette gosse… je l’ai chiée ». Devant sa chambre à la porte entrouverte, je recevais ses mots comme des uppercuts, debout, les jambes serrées dans le couloir du premier étage.

Souvent je sortais de mon sommeil, terrifiée par un cauchemar où je voyais ma mère, le ventre énorme, hurler sur un lit rouge sang avec ma gueule diluée dans la couleur et sur son visage des rides de souffrance. Je me sentais coupable d’avoir gravé ces rayures sur sa peau si parfaite.

Je suis née avec un poids commun, rien d’anormal, et puis chaque année, lentement, je prenais des kilos alors que mes parents n’étaient pas gros. À chaque repas, dès que je fus en âge de comprendre, j’entendais la voix de ma mère me reprochant de me goinfrer mais putain merde je ne mangeais rien !

Mes parents ne voulaient pas d’enfant, ils me l’ont dit le jour de mes huit ans avec une espèce de perfection. Impeccable. Ah ! putain quand j’y pense, quel talent ! Je suis rentrée de l’école et ils s’engueulaient, mais ce soir-là, quand j’ai refermé la porte, j’ai appris la nouvelle « j’en voulais pas de cette gosse, merde… je t’avais dit de te retirer » elle me voit, s’interrompt et disparaît au fond d’un regard détourné. Je ne suis pas vraiment choquée, je le sais déjà que je suis un virage mal négocié. Je viens d’une sortie de route d’un sexe qui est pourtant resté dedans.

La laideur m’imite.

Petite j’étais boulotte, on va dire ça, bien en chair et sûrement contagieuse. Je me faisais toujours une couette, la raie au milieu, cheveux châtains, longs, gras, plaqués sur ma tête, et mes yeux étaient rapprochés, trop, comme s’ils se regroupaient pour s’observer l’un l’autre, juste pour voir si une laideur comme la mienne était vraiment possible. Mes sourcils étaient épais et mes dents trop grosses, encadrées par des lèvres larges qui me posaient toujours la même question « comment une femme si belle a pu me faire ? ».

« La nature fait bien les choses » est la seule phrase que j’ai retenue de mes cours de sciences de la vie, sortie de la bouche de ce professeur émerveillé devant le spectacle extraordinaire de la nature. « La nature fait bien les choses, les enfants » eh oui, c’est vrai, mais parfois elle rate son coup, ce coup dont je suis sortie, ce coup réussi et raté de mon père dans ma mère.

J’étais quelque chose qui tombe à la renverse. Je suis quelque chose…

Je voyais le monde avec mes yeux rapprochés qui, normal, ne le voyaient pas comme les autres, mais un peu déformé. Ma vie de travers était pour moi l’effet de mes yeux mal placés.
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Je suis laide, presque grosse, assise sur les chiottes de la gare du Nord, j’ai le canon d’un fusil dans la bouche. J’ai trente ans, le doigt sur la détente, le regard sur un poil par terre.

C’est le fusil de mon père, j’ai mis une cartouche dedans, je me suis assise et j’ai placé le trou noir dans ma bouche, la crosse fixée au sol je ne sens pas mon corps, une douleur dans le dos peut-être, à peine, mes doigts tremblent et j’entends tout, des mecs qui pissent à côté, des chasses… je vais mourir avec des jets de pisse qui donneront à ma mort la couleur jaunasse du lino de ma chambre de bonne. Il y a du boucan dehors « dépêche-toi le train va partir » une voix devant ma porte… plus loin « c’est pas propre » et des sons, plein de bruits et mes yeux toujours fixés sur ce poil. « Putain c’est pas vrai ! » la voix d’un homme « non non… mon portable est tombé dans l’trou », quel con, il va me gâcher mon départ… il marmonne et puis plus rien, il a dû le récupérer, plonger sa main dedans je n’en sais rien, je m’en fous je vais tirer… je ferme les yeux.
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Les habitants ici sont dingues, mais ça ne se voit pas, ils ont juste un neurone en plus qui leur permet de garder leur brutalité à l'intérieur, et si on leur enlevait ce petit neurone misérable ils chieraient leur violence partout pour se débarrasser de la frustration qui ronge leurs désirs perdus dans les ruelles humides et tranchantes.
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Pendant le tout début de ma vie je suis passée au travers des années, mais c’était tout juste, comme dans un couloir très étroit, mes épaules frôlaient les bords de l’existence et je devais forcer un peu pour avancer. J’ai vécu passable.
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