Oh oui, peut-être bien qu’il lui causera plus de soucis qu’à son tour. Mais des soucis pareils, des soucis à cause de quelqu’un qu’on aime, ce sont de bons soucis.
Pendant un moment, elle écoute en silence ces pleurs qui continuent encore et encore, sans une plainte dans la nuit, comme si la nuit elle-même était affligée de tous les chagrins du monde.
Les gens ne peuvent pas s’empêcher de penser. Ils croient toujours qu’ils iront plus loin en pensant.
Les idiots font des idioties, et les malins font souvent des idioties encore plus grandes.
Des flocons d’images neigent dans son cerveau, qui fondent aussitôt, avant même qu’elle ait pu les distinguer.
Peut-être que, une fois seule avec elle-même, elle deviendra aussi quelque chose.
Son monde est tout cassé, son monde ne pourra jamais se relever. Pourquoi est-ce qu’on a vécu dans ce monde, pourquoi est-ce qu’on a donné la vie à des enfants, qu’on s’est réchauffé à leurs sourires, à leurs jeux, si c’est pour qu’ils deviennent des bêtes sauvages ?
Connais-tu quelqu'un qui veuille mourir ? Tout le monde veut vivre, sans exception. Même le plus misérable vermisseau aspire à la vie. Moi aussi, je veux vivre. Mais peut-être est-il bon, en pleine vie tranquille, de penser à une mort difficile et de s'y préparer. De savoir qu'on aura décemment, sans cri ni lamentation.
Ils n'avaient pas encore compris que cette Allemagne en guerre ne tolérait plus la moindre vie privée. Il fallait que chaque allemand partageât le sort de son pays ; de même que, de plus en plus nombreuses, les bombes tombaient aussi bien sur les juste que sur les méchants.
Le Dr Reichhardt avoua que, souvent, il ne tournait les pages de son livre que machinalement : il ne voyait pas sous ses yeux les caractères noirs imprimés, mais une cour de prison en ciment gris, une potence avec une corde qui se balançait doucement dans le vent, et qui transformait en trois à cinq minutes un homme solide et plein de santé en un répugnant morceau de cadavre crevé.