On ne pouvait pas refuser ça à Maman, on ne peut pas refuser à quelqu'un d'être libre. C'est la seule raison pour laquelle on y est allés, le reste, c'est du verbiage.
« C’est ce qu’elle a fait quand elle a décidé de mourir, elle a assumé sa liberté. Ce n’était pas un acte à la sauvette d’aller en Suisse, non, ce n’était pas un acte de désespoir, c’était le choix d’une femme forte. »
Il faut que tu restes fidèle à toi- même, que tu gardes ton âme. Je ne parlerai pas d'ange gardien, je déteste cette connotation reli- gieuse, je déteste les religions.
Incipit :
Audrey
La veille, j’étais de garde. Vers vingt-deux heures, on m’a appelée pour une urgence. Un accouchement compliqué. La mère avait fait une grosse hémorragie. On avait réussi à sauver le bébé et je venais de la transférer en réa dans un autre hôpital. J’étais encore totalement là-dedans, dans « Toi et ton bébé, je vous en supplie, vous restez en vie ». Il faut toujours un certain temps après pour redescendre. C’est très addictif les urgences gynécologiques, les urgences en général… on voudrait continuer à sauver le reste du monde, en mode superhéros, mais on reste là, les bras ballants : y’a plus personne à sauver. Alors je suis sortie me faire une clope sur le parking, ma garde venait de se terminer.
Là, j’en étais arrivé au moment où j’étais tellement dépassé que je ne faisais plus la part entre l’urgent et le non-urgent, alors qu’à ce moment là, l’urgence, bien sûr, c’était Maman.
Il y a des gens qui sont dépassés par la liberté que prennent les autres, ça les enrage, ça les rend dingues. Ils aimeraient que tout le monde reste englué exactement comme eux.
‶Être médecin, c’est surtout apprendre à connaitre le vivant. La mort entre dans la normalité du vivant au même titre que la vie. La mort c’est la vie. Il faut l’accepter pour mieux vivre.
Et si soigner, c’était aussi apprendre à mourir ? ″
Et la suite, elle disait, et la suite ? Anna a répondu du tac au tac, la suite, Maman, on va l'écrire nous mêmes.
Toutes ces personnes qui arrivent avec des histoires incroyables, et pourtant, c'est bien ce qui vit une grande partie de l'humanité aujourd'hui...Ma vie à moi, mes enfants, mon mari, ma maison, c'est plutôt l'exception...
Ce week-end là a quelque chose de festif, on célèbre un moment de vie.