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Citations sur Comment j'ai vidé la maison de mes parents, tome 2 : Le.. (9)

Ecrire une lettre, c'est se confier à un autre qui n'est pas là. L'espace de la lettre ouvre un espace intérieur, un moment de réflexion, de méditation, une ouverture vers l'inconnu de soi.
Il y a une immense liberté possible dans la rédaction d'une lettre.
On est avec soi tout en pensant à l'autre lorsqu'on l'écrit.
On est avec l'autre tout en étant seul lorsqu'on la reçoit.
Echanges différés dans le temps.
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Je voudrais meubler votre petite chambre de mes pensées affectueuses et vous, en retour, seriez assis au chevet de mon lit. Ne trouvez-vous pas merveilleux de pouvoir s'épauler ainsi l'un l'autre à distance ?
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Il me fallait du temps pour découvrir que l'absence des disparus, imperceptiblement moins aiguë, moins obsédante, se changerait, jour après jour, en une présence amie, emplie de tendresse et d'une mélancolie bienheureuse. La perte donnait naissance à un lien nouveau, inédit, unique, encapsulé, à l'abri de la réalité quotidienne. Il me semblait que mes parents disparus se fondaient en moi. Je les abritais, ils m'emplissaient.J'évoquais leurs manières d'êtres, leurs gestes, leurs paroles, je jouais avec l'idée que, s'ils étaient encore là, ils diraient ceci ou cela, réagiraient comme ci ou comme ça. Je dialoguais avec eux. je les faisais miens.
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Souvent j’ai regretté les frères et soeurs qui ne sont pas nés après moi, mais j’étais fière de savoir que j’avais été désirée. L’amour qu’on a reçu dans sa petite enfance ne disparaît pas, il nous donne une force au fond de soi qui ne peut jamais être vaincue. Malgré tous les reproches que je pouvais et pourrais encore faire à mes parents, je leur dois, à tous les deux, d’avoir été aimée. Même fort, même mal, mais aimée. Sur la partition de notre histoire ne s’effacent pas les étranges détours de l’inconscient de nos parents. Nous avons été modelés autant par ce qu’ils ont voulu nous transmettre que par ce qu’ils nous ont transmis à leur insu. Une généalogie inconsciente, sur plusieurs générations, nous traverse. Nous portons, souvent sans nous en douter, des blessures venues de nos ascendants, d’anciennes missions, de lourds secrets. Il ne nous est pas toujours donné d’en d’éclaircir les ombres, d’en dénouer les liens. Nous faisons notre vie cahin-caha, et à réfléchir à l’histoire de nos parents, de nos ancêtres, nous parvenons parfois à ne pas répéter leurs destins, mais à nous en échapper en partie. À faire un pas de côté. (p. 178-179)
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Je n’avais pas mis de point final à ma dernière phrase.
Mon chagrin était encore trop vif, la perte trop écrasante. Je ne pouvais pas imaginer que ma peine se ferait petit à petit moins violente, qu’elle deviendrait une compagne apaisée, assourdie, faite de souvenirs et d’évocations réconfortantes. Le deuil n’était pas clos. J’en étais encore prisonnière.
Il me fallait du temps pour découvrir que l’absence des disparus, imperceptiblement moins aiguë, moins obsédante, se changerait, jour après jour, en une présence amie, emplie de tendresse et d’une mélancolie bienheureuse. La perte donnait naissance à un lien nouveau, inédit, unique, encapsulé, à l’abri de la réalité quotidienne. Il me semblait que mes parents disparus se fondaient en moi. Je les abritais, ils m’emplissaient. J’évoquais leurs manières d’être, leurs gestes, leurs paroles, je jouais avec l’idée que s’ils avaient été encore là, ils diraient ceci ou cela, réagiraient comme ci ou comme ça. Je dialoguais avec eux. Je les faisais miens. Ils ne pouvaient plus démentir ce que je pensais d’eux. Une sorte d’aura idéalisée les entourait. Rien ne venait plus contredire mes sentiments à leur égard. Ils se coulaient en moi. Parmi toutes leurs facettes, je choisissais celles qui me convenaient, je les embellissais, j’immobilisais les meilleurs souvenirs, les moments les plus drôles, les plus affectueux, les plus riches d’émotions.
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Ma lecture m’a permis de passer du temps en leur compagnie. Ce fut un long voyage au pays de l’enfance et de ce qui l’a précédée, tout à la fois éprouvant et émerveillé. Je vis comme une grande chance d’avoir pu recueillir ces love letters que chacun s’attend peut-être à trouver en vidant la maison de ses parents. Par l’imagination, grâce à cette littérature « de grenier », j’ai pu assister à ce qui est arrivé avant ma naissance et l’a préparée. Une expérience unique, modeste et précieuse. (p. 232-233)
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Je commençai à lire cet été-là et ne m’arrêtai plus jamais. Je me jetais sur mon lit avec volupté, je lisais toute la journée, même tard le soir, sous mes couvertures, à la lumière d’une lampe de poche. L’été de mes 9 ans, je préférai lire au lit, un matin, plutôt que d’accompagner ma mère en ville, pour acheter un cache-pot. C’est ce jour d’août qu’elle eut son grave accident de voiture. Je me suis toujours demandé ce qui serait arrivé si j’avais été présente. Serais je morte ? Ma mère aurait-elle été moins blessée ? Je me sentis longtemps coupable de l’avoir laissée seule, comme si j’avais pu lui éviter son accident. L’idée ensuite me poursuivit que je pourrais, au même âge qu’elle, avoir, à mon tour, un accident grave. Je mis beaucoup de temps à me décider à conduire, mon père m’en dissuada autant qu’il put, arguant absurdement que c’était difficile de trouver une place de parking. Heureusement, lorsque j’eus vingt ans, un ami, à qui j’avais raconté cette histoire, m’offrit symboliquement un porte-clés. Il me le tendit en déclarant que l’on trouve toujours une place pour se garer puisqu’il y a pour chacun une place dans ce monde. (p. 182-183)
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Survivre éveillait un sentiment de culpabilité – culpabilité du survivant, disait-on, – un sentiment de victoire aussi, sur les nazis. Mes parents n’avaient pas partagé le sort des victimes, ils avaient échappé au génocide. Ils étaient meurtris mais vivants. Deux orphelins, deux survivants, s’épaulant mutuellement pour tracer un chemin de vie, c’est ainsi que se noua leur couple. Un couple fondé sur l’interdépendance, le rêve tout-puissant de vaincre la maladie et la mort. Ils s’arc-boutaient contre le monde. Ils voulaient me préserver. Le monde recelait trop de danger. Ils voulaient me les épargner. Ils n’avaient pas confiance dans les forces que l’on peut développer en soi. Leurs expériences leur avaient prouvé que Thanatos l’emporterait toujours sur Eros. (p. 81-82)
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Le traumatisme en héritage : l’agressivité inhibée, impossible de faire du mal, mes deux parents étaient trop fragiles. Seulement être sage et obéissante. Ne rien déranger. Rester immobile. Silencieuse, ramassée sur soi comme quelqu’un qui se cache, qui cherche à demeurer dissimulé. Faire le mort pour sauver sa peau. Ma mère disait qu’au camp elle s’était faite toute petite, invisible, pour se protéger, pour échapper au travail d’esclave, pour ne pas mourir. Tenir des heures dans le froid, à l’appel, au petit matin glacial de haute Silésie. Se cacher dans les latrines. Elle avait 23 ans. Comment vivre lorsqu’on est un enfant de survivants ? Comment oser vivre, rire, bouger, chanter, être heureuse ? Pourtant, ils voulaient que la vie l’emporte sur l’anéantissement. Ma naissance était un miracle à leurs yeux. La vie plus fort que toutes les morts. (p. 78-79)
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