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Critique de Alfaric


Je suis vraiment mitigé : le mélange entre espionnage et fantasy aurait du me plaire, et a fini par le faire dans les dernières pages du roman, mais je ne suis jamais vraiment rentré dedans. Mais il s'agit du 1er roman de l'auteure, donc nombre de maladresses peuvent être pardonnables...

Pourquoi "La Fortune des ombres" en VO est devenue "Les Maîtres de l'ombre" en VF ??? et le burb de Robin Hobb est mensonger, comme tout les burbs d'ailleurs :
Des héros mémorables ? On repassera.
Une intrigue captivante ? Dans les tomes suivants peut être ?
Des ennemis vraiment intimidants ? On les cherchera longtemps…
Mais qu'importe la critique du service marketing, il y a plus intéressant à dire.

Concernant les personnages :
On joue à fond la carte de la sympathie avec Seregil, le Chat de Rhimini, à mi chemin entre le Cary Grant de "La Main au Collet" et le Locke Lamora des "Salauds Gentilshommes" (donc du Souricier Gris), son vieux compère Micum, le mage Nysander, son nouvel apprenti Thero et toute la compagnie.
Comme dans tout roman initiatique, tout est construit autour du personnage d'Alec qui sans être imbuvable est pire qu'une midinette avec sa vraie fausse jalousie et sa timidité totalement artificielle genre il accepte tout sans broncher puis pète un câble pour un rien…
Bref ses atermoiements récurrents peuvent devenir déplaisants.
Et puis l'homme des bois analphabète qui devient un monte-en-l'air urbain lettré en quelques semaines, bonjour la suspension d'incrédulité.
Et puis le puceau qui se pâme à chaque femme rencontrée qui dort dans la même chambre voire le même lit qu'un libertin bisexuel sans se méfier un seul instant, bonjour la suspension d'incrédulité.
Et puis tous les personnages du roman considèrent Alec comme leur meilleur pote dès leur 1ère rencontre et se confient à lui comme s'il le connaissait depuis toujours en déballant toute leur vie. Cela sonnait tellement faux que je me suis dit que cela annonçait un super twist avec Alec comme agent double… Cela aurait été génial ! Et bien pas du tout en fait…
En fait à la fin du roman je me suis rendu compte qu'on aurait parfaitement pu se passer d'Alec pour raconter en mieux la même histoire : le duo Seregil / Micum aurait été beaucoup plus efficace et on gagnait 200 à 300 pages qui pour moi tiraient clairement le roman vers le bas.
Et je me suis abstenu de rager sur Nysander qui tease à mort sur l'artefact maudit et le Dieu Vide...



Concernant l'univers :
Lynn Flewelling se rappelle au bon souvenir de la Fantasy féminine et féministe des années 80 ! Skala est le leader du monde libre car la gent féminine y gouverne avec sagesse.
Tous les postes politiques et militaires importants sont tenus par des femmes et moult jeunes filles du royaume ne rêvent que d'intégrer l'armée pour aller pourfendre du méchant. Evidemment le royaume a connu sa libération sexuelle avec ses gays, lesbiennes et bi qui ont pignons sur rue et toutes ses dirigeantes qui collectionnent les princes consorts. Pas difficile de voir qu'on pioche largement dans une histoire fantasmée de l'Angleterre avec les sosies à peine déguisées de Bloody Mary et de la reine vierge Elisabeth. En face, l'Axe du mal des Plénimariens (dirigés par de vilains machos rétrogrades ?)
Cela aurait vite pu devenir très relou mais ouf on n'insiste pas trop sur ces aspects là.
Tout cela aurait été très sympa si cela avait été progressiste, mais comme l'auteure ne se prive pas de faire quelques remarques sur les oisifs feignasses qui pullulent dans les taudis de Rhimini ou les serviteurs qui ne savent pas rester à la place qui est la leur, on se dit que la bourgeoisie imbue d'elle-même n'aurait pas fait mieux au XIXe siècle…
Par contre son magicbuilding annonce celui de Brian Ruckley ("Un monde dans dieux"), au reprend des thèmes des années 1960/1970 : seuls les métisses stériles humains / elfes maîtrise la magie, à moins de recourir à une sombre nécromancie. Pour les Drysians guérisseurs et les centaures artistes, on verra peut-être dans les tomes suivants…
De manière générale ce monde médiéval fantastique ressemble de manière troublante à celui du Grand Siècle ou du Siècles des Lumières donc pour la cohérence de l'ensemble on repassera, comme souvent avec les auteurs américains...


Concernant l'intrigue :
Les 3 premiers chapitres sont mauvais :
- on introduit directement le héros adolescent orphelin donc bravo l'originalité !
- en 2 temps 3 mouvements un mentor sorti de nulle part le prend sous sa coupe donc OMG c'est forcé
- et ledit mentor le traite immédiatement comme un membre sa famille et/ou un vieil ami et se met à tout lui raconter sur sa vie, son métier et sur les tenants et aboutissants du vaste monde
C'est une des mises en place les plus artificielles que j'ai lues, d'autant plus qu'on présente un univers médiéval-fantastique 100% à l'américaine. Je ne vais pas rager ici, donc je développerai en fin de message.
Passé ce cap, le 1er tiers gagne clairement en qualité et en intérêt.
Seregil joue bien son rôle de mentor envers Alec à mi-chemin entre le Rémi d'Hector Malot et le Kim de Kipling, les scènes de roublards sont sympas, l'épisode du travestissement est amusant et après on a droit un passage à la Frodon et Sam de bonne facture. Arrivé là je me suis dit que la mise en place était terminée et que l'histoire allait démarrer.

Patatras le 2e tiers est soporifique à souhait :
200 pages de mini scènes d'apprentissage, de descriptions en veux-tu en voilà, de tonnes de dialogues creux et artificiels et quelques WTF concernant le héros adolescent orphelin. Tout cela est censé être la présentation de Rhimini mais c'était longuet et assez chiant.

Fort heureusement le dernier tiers est d'un autre tonneau, mais trop tard le mal était déjà fait. J'avais totalement décroché et du coup je suis passé à côté du complot Leran qui était pas mal. Car on suit le cahier des charges des aventures de 007 transposé au cape et d'épée :
On retrouve donc Sa Gracieuse Majesté Idrilain qui chapote M (Nysander), Q (Thero), James Bond (Seregil), Felix Leiter (Micum), le grand méchant que se la pète grave et Alec qui joue le rôle de la Jame's Bond Girl (et oui on marche sur les plates-bandes du yaoi !)…
L'auteur déclare elle que Serengil et Alec reprennent les rôles de Sherlock Homes et du Docteur Watson transposé dans un univers swashbuckling… Ouais, on peut le voir comme cela, mais je suis bien passé à côté sur le coup !


Bref pour moi un roman semi raté ou semi réussi, cela dépend des attentes et des exigences de chacun comme de l'humeur du moment, mais qui présente des éléments suffisamment intéressants avec son dénouement prometteur pour avoir envie de retenter l'expérience avec le tome 2 car la prose était assez fluide et le mélange action / intrigue / roublardise était vraiment séduisant sur le papier. Et puis comme il s'agit d'un 1er roman, on peut espérer que tout va s'améliorer par la suite aussi...


PS :
Je n'avais pas tilté jusqu'ici mais les worldbuidling américains sont souvent semblables en Fantasy :
- des colons WASP ou assimilés qui déboulent d'un vieux monde dont on ne saura rien
- des royaumes calqués sur la vieille Angleterre avec une monarchie tempérée, une honorable aristocratie, une honorable gentry, des classes laborieuses qui savent rester à leur place et des oisifs qui faut remettre à la leur !
- des natifs qui ont été boutée sur les confins : barbares, indigènes, non-humains divers et variés
Faites votre choix pour caster les victimes expiatoires qui remplaceront les Amérindiens !
Et puis le plaisir de compliquer avec un naming à base de trémas et accents circonflexes.
Citons quelques auteurs : Lynn Flewelling, Elisabeth Haydon, David Chandler, Tad Williams, G. R. R. Martin…
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