Citations sur Nouvelles de l'exil (17)
L’amour de la vie, vous savez, la joie de se réveiller, de marcher, de regarder. Toutes lumières éteintes, elle voit le feu, cette vie glorieuse, ce bijou sauvage, cet oiseau d’enfer et de paradis.
De toute façon je suis toujours seul, à hurler de rire tellement c’est gros et je pense, car je pense, que les hommes sont seuls, plus seuls même que les femmes, ces putes. Non, je ne veux pas dire du mal des femmes, j’ai pour elles de l’amour mais quelquefois elles me foutent en colère. Je regarde les racines des arbres sur le ciel rose et je sais que quelque part ça me fait de la joie, mais c’est une joie que je ne ressens pas. Nous vivons séparés.
L'homme pâle au fond du café, il regarde ans le vide. Peut-être il prie. Peut-être il est désespéré, il est dans les cendres. Peut-être il pense à un tilleul qu'il a connu et qui remuait doucement dans le vent d'été. Quand il était heureux. Enfin, presque. Peut-être il pense à une femme. Qu'il a aimée, aimée. Qui a disparu de sa vie.
Elle attend depuis longtemps une renaissance qui ne viendra peut-être jamais. La mer la laisse froide. Elle est comme un vieillard désespéré. Comme une ville morte. Les maisons, les immeubles serrés les uns contre les autres. Aucune place pour une surprise. Il n’y a pas de prince qui va surgir du fond d’elle-même, ni de ce chemin sur la corniche en dehors de la ville.
Le soleil s’est lové dans tous les creux de pierre. La nuit, allée se faire voir ailleurs. Le monde, dans les douleurs de l’enfantement, mais en silence. Un faible espoir crépite au loin dans les herbes, près de la gare. La gaieté est morte de faim. Nous n’irons plus au bois. Et toujours ce désir morne et fou de cigarettes. Je suis très malheureuse. Pourtant j’aime l’ivresse du soleil, pourtant j’aime des gens. Ma vie est sale.
— Mourir ? Je vais mourir ? C’est quoi mourir Arsinoë en vrai ?
— C’est ne plus exister comme tu es. Tu deviens du soleil, du vent, une étoile.
Un jour viendrait sûrement où le cheval, une voiture ou un hélicoptère apporterait un nouvel homme et Hugo serait un peu déchiré, un peu souriant, il l’aimerait elle encore davantage pour compenser, il la battrait un peu, elle serait fière et un peu vieille déjà mais ça n’avait pas d’importance, il resterait là avec les autres et elle l’aimerait toujours, ils vivraient tous ensemble dans cette joie troublante, jusqu’à l’arrivée de la grande Séparatrice des Amis et des Amants.
Il voyait le vert strident de l’herbe au-dehors et il avait envie de peindre. Il avait une confiance folle en lui-même et c’était si nouveau qu’il se sentait naître.
Comment vit-on ? Elle regarde la mer, les ombres sur les murs. Elle ne sait pas comment on vit. Des salves de pensées sombres l’assaillent. Elle gît. Je gis, dit-elle, et c’est tout. Comment travaille-t-on ? Comment aime-t-on ? Les rêves eux-mêmes l’ont abandonnée.
On voudrait lui dire que nous sommes tous frères, qu’il ne faut pas qu’il soit malheureux et même, que Dieu est grand, n’importe quoi pour que son visage s’éclaire un peu, qu’il ne soit plus dans ce désert. On n’ose pas. Il y a une telle distance partout, une telle crainte. Ses mains jouent lentement avec son verre de cognac. Il ne doit pas savoir s’il va partir, ou rester là, il ne doit pas du tout savoir quoi faire, il n’y a rien à faire, sa vie est comme ça.