Citations sur Son excellence, Monsieur mon ami (10)
J'aime l'idée qu'en littérature, et pourvu qu'on laisse du temps au temps, la justice l'emporte -in fine- sur l'ingratitude. j'aime que les vivants en bonne santé s'activent à sauver de l'oubli les morts qui ont tant souffert. je crois même que, sans oser toujours l'avouer par crainte de laisser accroire que je négligerais mes contemporains, je n'ai aimé, depuis trente ans, exercer le métier de critique que pour ce bonheur inouï de travailler à faire à nouveau "entendre", comme dirait régis, la voix des insoumis, des réprouvés, des irréguliers, des tempétueux, des mélancoliques, des suicidés de la société, des résistants de l'ombre, des solitaires irréductibles dont, c'est un mystère au regard des privilèges que le destin a bien voulu m'octroyer, je me sens si proche. (p. 63)
Il m'avait dit, lorsque je devins à mon tour l'animateur du -Masque et la Plume- : " "Tu vas apprendre l'étrange métier de dompteur de cirque culturel" (p. 19)
Le plaisir de lire est impérieux, je ne m'en lasse toujours pas. Il suffit à justifier, avec l'irrépressible curiosité qui l'accompagne, et l'excitation de voir naître un talent neuf, et le besoin de connaître son époque à travers celles, et ceux qui la décrivent, qui l'impriment, mon obstination à persister dans cette charge dont j'ai fait, je ne m'en cache pas, un étrange art de vivre. Il ne m'empêche d'ailleurs pas de tenter d'écrire parfois sur mon théâtre intime et mon religieux manège, dans lequel piaffent des ombres voluptueuses. (p. 36)
J'ose dire que la paresse, conçue comme une ascèse, est productrice d'énergies que nous avons peine à imaginer. elle n'est rien d'autre qu'une façon particulière de découper le temps et de suspendre la frénésie routinière du labeur- (Eloge de la paresse de François-Régis Bastide)
S'il n'était pas un collectionneur vaniteux qui trop embrasse ou un pénitent inconsolé qui mal étreint ». Pourtant Gilles Jacob le dira « brillant avec les mots, brillant avec les femmes
J'aimais que notre amitié fondée sur des désaccords parfaits que rien jamais n'ébrécha ni n'assombrit. Il m'arrive de croire qu'il a été, à son insu, mon ange gardien
Il m'a toujours semblé que cet admirateur de Saint-Simon s'était trompé de siècle et qu'il était fait pour vivre au temps de la litote, de la prétérition, du clair-obscur et du baisemain... Maladroit en amour, gaffeur en société, querelleur avec ses amis, d'une grandiloquente timidité, bravache sans raison, préférant être amoureux qu'aimer, et caressant peut-être mieux les mots que les corps, mon ami, cela au moins lui sera-t-il accordé, était beau de langage
c'était un troublant mélange de jeune amant transi et de vieux critique râleur, de cabot et d'exégète qui donna
Il me donna rendez-vous après les caisses,a la cafétéria ou,d'ordinaire,il prenait le temps de lire Var Matin in extenso.
Car François-Régis Bastide,ministre plénipotentiaire,membre du jury Médicis,
auteur de Lettre de Bavière et de Flora d'Amsterdam,était un pilier de la cafétéria du Géant Casino.
'Je doutais plus, en revanche, de son élégance dans la vie réelle. Ce soir-là, il en convint. Le séducteur avait soixante-cinq ans, et commençait à faire ses comptes. La goujaterie l'avait souvent emportée sur la galanterie. Il avait même écrit certaines pages pour embellir ce qui était laid, dédommager ses victimes, s'excuser d'avoir été trop entreprenant et si peu attentionné. Hors la littérature, qui les enjolive, les tromperies amoureuses sentent en effet le rance, le mesquin, le furtif, le pourboire, l'hôtel miteux, la salade cuite, le théâtre amateur, la série télé, et il n'aimait pas s'en souvenir, lui qui demandait au bobard de s'élever à la hauteur de l'illusion et à la passion d'être exaucée par Schiller, Goethe ou Albert Cohen.' Pages 28-29