Citations sur True lies (49)
Elle est jeune, moins de trente ans, c’est évident. Le menton relevé, les traits fins, un petit nez retroussé, de grands yeux sombres et un air de Maîtresse du monde. Elle porte une montre hors de prix, une bague en or au majeur et un bracelet d’où pend une breloque qui semble être en diamant. Tout ce que je déteste. J’ai en horreur ce genre de femmes, les filles à papa qui se croient tout permis, celles qui pensent que l’argent achète ou arrange tout, celles qui jugent les gens à leur fortune et non à leurs valeurs, ces femmes sans aucune morale, aucun principe, aucune pitié.
Qui est cette femme ? Que me veut-elle ? Une journaleuse qui viendrait remuer la merde ? Un procureur qui tenterait de me mettre une nouvelle affaire sordide sur le dos ? Vu ce qui m’est tombé dessus il y a cinq ans, je m’attends au pire.
Encore la même rengaine humiliante, cette comptine c’est mon train-train, mais pour tenir le coup dans ce sinistre endroit, la routine est nécessaire, vitale même. Réveil à la même heure, repas à la même heure, promenade, douche, extinction des feux… ne plus savoir quel jour on est permet de ne plus les compter, de ne rien attendre du lendemain.
Je me sais incapable de demeurer stoïque face à une telle injustice, un tel acharnement.
Voir ce gamin se faire passer à tabac pour une cigarette m’a mis hors de moi, mais c’est la dure loi de cette jungle, loi que nul n’est censé ignorer ici. Les matons auraient pu, dû intervenir plus tôt ; à croire qu’ils prennent plaisir à nous voir nous entretuer.
Dans nos manuels, tous les sujets sont abordés hormis les doutes, les inquiétudes. Et si je commettais une erreur en venant ici ? Si ce dossier n’était pas fait pour moi ? S’il refusait de me parler ? Et si je me mettais à bégayer ?
Mon anxiété s’accentue à mesure que les minutes s’égrènent.
Ressaisis-toi, Rayley, tu es la meilleure. Il faut que je me concentre sur un autre sujet pour reprendre le dessus.
Je ne me sens pas du tout à l’aise dans cet endroit austère, froid. L’idée qu’il y a tout un tas de prisonniers entre ces murs m’angoisse. Je frotte mes mains moites contre le tissu de ma jupe. Vivement que j’obtienne les réponses pour lesquelles je suis venue aujourd’hui.
Enquêter, interroger son entourage, approfondir les recherches. Je suis à la fois excitée par le fait de me lancer dans ma toute première affaire et terrifiée à l’idée des étapes par lesquelles je vais devoir passer en si peu de temps. Vais-je être à la hauteur ? Est-ce que j’arriverai à trouver une faille à ce dossier ?
Elle était convaincue de l’innocence de cet homme pour une raison que je ne m’explique pas. Je crois que c’est au moment où elle m’a dit « imagine s’il s’agissait de ton frère, que ferais-tu ? » que ma grand-mère a remporté la victoire. Je me presse de laver mes cheveux bruns bien trop longs à mon goût que je peine à sécher, et sors pour enfiler un pyjama douillet. Je suis déprimée quand j’inspecte mon reflet dans le miroir. Un teint bien trop blafard. Je malaxe mes pommettes et frotte le dessous de mes yeux pour effacer mes cernes, sans succès.
J’ai trop subi le jugement de mes proches, je les ai trop souvent vus estimer les gens à leur statut social et non à leurs valeurs. J’aurais aimé avoir les arguments pour leur répondre, pour me défendre, mais je me suis toujours tue et qui ne dit mot consent. La première fois que j’ai vu plaider Maître Ginsburg, je me suis dit : “c’est ça que je veux faire plus tard !” Plaider, convaincre les autres avec mon éloquence. Je sais les conséquences qu’ont les mots, je connais leur poids pour l’avoir subi sous mon propre toit. J’aurais voulu plaider ma cause, mais à défaut, je vais plaider celles des autres.