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EAN : 9780809095087
103 pages
Hill & Wang (29/09/2009)
4.5/5   2 notes
Résumé :
Trotsky was a hero to some, a ruthless demon to others. To Stalin, he was such a threat that he warranted murder by pickax. This polarizing figure set up a world conflict that lasted through the twentieth century, and in Trotsky: A Graphic Biography, the renowned comic artist Rick Geary uses his distinct style to depict the stark reality of the man and his times. Trotsky's life becomes a guide to the creation of the Soviet Union, the horrors of World War I, and the ... >Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Ce tome constitue une biographie de Léon Trotsky, suffisante par elle-même, ne nécessitant pas de connaissances historiques préalables. Il est paru sans prépublication, pour la première fois en 2009. Rick Geary en est l'auteur, scénario et dessins. Il s'agit d'une bande dessinée en noir & blanc de 100 pages. Elle se termine avec bibliographie de 9 oeuvres sur la biographie de Trotsky et l'histoire de la Russie pendant cette période. Rick Geary est également l'auteur d'une biographie de J. Edgar Hoover parue en 2008.

En 1917, Léon Trotski fait son apparition sur la scène internationale comme le cerveau derrière la révolution russe. Il a présidé à la transformation complète de son pays, pas seulement un changement de gouvernement, mais une restructuration totale de la société à tous ses niveaux. Beaucoup le voient comme le Saint Georges héroïque terrassant le dragon de la répression capitaliste. Pour d'autres, il était le fournisseur impitoyable et satanique d'une rébellion sanguinaire, un théoricien froid et détaché, rendu saoul par le pouvoir. En réalité, il n'était ni l'un, ni l'autre : un écrivain, un penseur, un bâtisseur de nation (un peu malgré lui), avec des racines profondes dans la Russie campagnarde profonde. Il rêvait d'un monde libéré des injustices, des inégalités, des guerres, et c'était une obsession chez lui. de son point de vue, les idées de Karl Marx (1818-1883) indiquaient la bonne direction et il a mis la machine en marche pour atteindre cet objectif. Mais ce faisant, il a posé les bases d'un conflit mondial qui a perduré pendant tout le vingtième siècle. Au cours de sa vie, il a assisté à la trahison de son travail, de ses idéaux, pervertis par ceux qui se sont emparé du pouvoir après lui. Il a terminé sa vie, expulsé du gouvernement qu'il a avait participé à établir, et pourchassé dans son exil et sa mort.

En 1879, l'empire russe était vaste et s'étendait de l'Europe jusqu'à l'océan Pacifique, à travers toute l'Asie, sous la gouvernance de du tsar Alexandre II (1818-18881). La paysannerie fonctionne encore selon un système féodal qui n'a pas évolué depuis des siècles. Les ouvriers d'usine travaillent dans des centres urbains surpeuplés, subissant des privations accompagnant une industrialisation rapide. Dans cet environnement du blé et du mouton, la famille de Lev Davidovitch Bronstein vit dans une ferme aux murs de boue, et au toit de chaume. David Bronstein était un paysan propriétaire de ses terres, ni riche, ni prospère, mais bénéficiant d'une réelle stabilité, et d'une réelle sécurité. le jeune Lev se montrait doué pour la mécanique des machines agricoles. le soir, la mère lisait à ses enfants pendant les longs hivers. À 6 ans, Lev va à l'école élémentaire de Gromoklei, la ville voisine. À compter de 9 ans, ses parents l'envoient à Odessa pour continuer d'étudier, hébergé par la famille de son cousin. Il se révèle être un élève brillant, en particulier en sciences et en arithmétique. Il préfère les livres et les idées, aux gens et à la nature. Lorsqu'il revient à la ferme paternelle, Lev commence à prendre ses distances avec son père : il s'occupe de la comptabilité de la ferme, et il acquiert une vision claire des différences entre fermiers et propriétaires terriens.

Quelle gageure : raconter la vie de Léon Trotski en 100 pages de bande dessinée, c'est-à-dire passer en revue une période historique des plus chargées. Rick Geary n'en est pas à son coup d'essai puisqu'il a déjà fait de même avec la vie de J. Edgar Hoover (1895-1972), ayant traversé deux guerres mondiales, la guerre froide, la guerre du Vietnam, et 8 présidents successifs des États-Unis. le lecteur plonge dans une bande dessinée dense, dans laquelle l'auteur ne perd aucune place. Il déroule la vie de Léon Trotski d'abord par des cellules de texte brèves et compactes, dans chaque case. Il n'y a qu'une seule page contenant des phylactères de dialogue : page 63, dans un dessin en pleine page, Trotski et Lénine échangent quelques mots sur le gouvernement qu'ils vont créer le 12 novembre 1917. le lecteur découvre donc la chronologie de la vie de Trotski par le biais d'un texte factuel et concis, passant en revue de nombreux éléments complexes, en s'assurant qu'ils soient intelligibles pour un lecteur peu au fait de l'histoire de la Russie et du communisme. D'un point de vue narratif, les images viennent montrer ce dont il est question, sans suite de cases montrant différents moments d'une action, mais comme une suite d'illustrations, entièrement inféodées à la chronologie et aux événements évoqués dans le texte. Pour autant, il s'agit bien d'une bande dessinée, de par la forme de cases disposées en bande, mais aussi des personnages récurrents, de la manière dont certaines images peuvent se répondre (par exemple les vues éclatées du train de Trotski quand il est nommé commissaire aux affaires étrangères en 1917.

En fonction de sa sensibilité, le lecteur peut trouver que les images sont parfois un peu naïves, ou trop simplifiées dans leur dimension descriptive. Mais au fur et à mesure de son avancée dans l'ouvrage, il prend conscience qu'elles apportent énormément d'éléments d'information visuelle, qu'elles ne doublonnent jamais ce qui est dit dans les cellules de texte, qu'elles donnent à voir le monde dans lequel vit Trotski, qu'elles rendent concret son environnement. le dessinateur sait restituer l'apparence physique de cet homme politique, en le faisant évoluer avec les années. Il représente les individus comme de vrais êtres humains, sans exagération morphologique. Il a investi du temps de recherche pour réaliser une reconstitution historique satisfaisante, que ce soit pour les tenues vestimentaires d'époque, les monuments et les bâtiments célèbres, les modèles de voiture, etc. de page en page, le lecteur prend conscience du savoir-faire déployé pour réaliser une narration visuelle adaptée à l'exercice d'une biographie très contraint par le nombre de pages : dessin allégorique (Trotski chevauchant un destrier fougueux pour occire un dragon, tel Saint George), à intervalle régulier une carte pour situer une région, une ville, un front de guerre, une étape de voyage, personnages en train d'accomplir une action pour donner de la substance à une information (par exemple les pertes de conscience de Trotski), monuments célèbres (par exemple la Tour Eiffel quand Trotski séjourne à Paris), reproduction d'une illustration célèbre (par exemple le nationaliste serbe Gavrilo Princip assassinant l'archiduc François-Ferdinand et son épouse Sophie Chotek ou encore Lénine exposé dans son cercueil), etc.

L'auteur a structuré son ouvrage en 8 chapitres : Un jeune révolutionnaire, Prison et exile, L'année 1905, À nouveau prison et exile, l'année 1917, Une nouvelle nation, Expulsion du pouvoir, le dernier exile. Il doit effectivement aborder un nombre d'événements majeurs très important, tout en les rendant intelligibles, un exercice de vulgarisation particulièrement délicat, car il ne faut pas non plus que la simplification les dénature. Il présente ainsi l'engagement politique de Trotski, son premier exil, sa fonction de président du soviet de Saint-Pétersbourg en 1905, l'exil qui s'en est suivi, la première guerre mondiale, la révolution russe de 1917, la violence politique et le concept de révolution permanente, les relations avec Lénine (1870-1924, Vladimir Ilitch Oulianov), celles avec Joseph Staline (1878-1953), l'exil au Mexique, la relation avec Frida Kahlo (1907-1954), son apport à la création de la Quatrième Internationale Communiste, et son assassinat. le lecteur apprécie la division en chapitre, ce qui lui permet de souffler un peu et de prendre le temps d'assimiler une histoire aussi riche. Il sourit en voyant l'évocation du séjour de Trotski aux États-Unis, surtout s'il a lu l'ouvrage du même auteur sur J. Edgar Hoover. Dès le premier chapitre, il est frappé par l'absence de parti pris de l'auteur. Les craintes de découvrir une version américanisée (dans tous les mauvais sens du terme) s'envolent de suite : non seulement Rick Geary se tient à l'écart de tout jugement de valeur, mais en plus il a effectué de solides recherches, évitant le récit à charge bas du front. En fait, il préfère s'en tenir à des éléments dépassionnés.

Au sortir de ces 100 pages, le lecteur est encore un peu étourdi par le nombre d'événements historiques qui ont défilé sous ses yeux, par la vie hors norme de Léon Trotski, par le coût pour sa vie personnelle, sa liberté, les membres de sa famille. La lecture est très dense en informations et assez paradoxale, parce que le personnage principal n'est pas réduit à une simple marionnette rejouant les scènes de sa vie. Rick Geary ne donne pas l'impression de prendre parti : il ne condamne pas les choix de Trotski, il ne le porte pas aux nues. Il met en avant son engagement intellectuel, sa production écrite, son action de terrain. Une fois nommé commissaire aux affaires étrangères, il se rend sur plusieurs lieux de conflits, se montrant en première ligne. L'auteur ne porte pas de jugement sur la cause défendue, ni sur le nombre de morts. Il ne s'agit pas non plus d'une absence de point de vue, car il condamne de manière claire les purges staliniennes, et sa dictature. Par comparaison, sa description de Trotski donne la sensation qu'il est fortement impressionné par un homme qui a pu théoriser une alternative au capitalisme, qui a été l'un des architectes du communisme et du premier gouvernement communiste, qui n'a pas hésité à être sur les champs de bataille.

En découvrant cet ouvrage, le lecteur est perplexe : est-il vraiment possible de rendre compte de la vie de Léon Trotski en si peu de pages ? Au sortir, il est tout aussi impressionné de l'accomplissement de Rick Geary que celui-ci l'est des accomplissements de cette figure historique. Cette biographie est plus qu'un simple ouvrage de vulgarisation, et il n'est pas entaché de partis pris politiques. Une réussite épatante.
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