Je ne t'ai demandé de gérer mon argent que pour m'assurer ta présence à mes côtés, tu le sais bien, Vincent, non ? - puis, une main posée sur mon épaule, me secouant à sa façon amicale, agressive et ironique : j'ai besoin de toi à mes côtés, Vincent. Je ne sais jamais quoi penser de mon travail jusqu'à ce que tu me demandes ce que ça peut bien vouloir dire.
Il fut visiblement satisfait de cette déclaration. Il me vit rire, autant de sa suffisance que de la phrase elle-même, et me fit un grand sourire.
- Vas-y, Vincent. Note-la.
Bien sûr, on s'amusait dans ces soirées . C'était amusant , sans aucun doute , de sentir ce petit papillon dans le ventre , comme à bord d'un ascenseur qui s'élève , à mesure que les fêtes auxquelles nous assistions montaient d'un cran sur l'échelle des mondanités.
[...) le passage à l'an 2000, que tout le monde - pas seulement nous mais tout le monde - pensa comme un nouveau départ . Evidemment, il n'en fut rien .Ce ne fut pas un nouveau départ. Ce fut la fin d'une époque .
Le second regard, en art, est toujours superflu.
L'art, on en est l'auteur ou l'acheteur. Tout le reste est englobé dans ces deux choses, ou est hors sujet.
Le langage du corps exprime la critique d'art aussi bien que celui des mots.
Au tournant du siècle, il y avait tout un tas de gens comme moi : de riches rejetons de Thatcher et de Blair aux idées bien arrêtées, vautrés comme des porcs dans la fange, sous une pluie d'or au bout de l'arc en ciel du crédit , mais doués d'une culture suffisante pour discuter de Randall et de son travail et, de plus en plus, pour l'acheter. P. 116
Tout n'est qu'un dérivé , me dit Randall un jour . La seule question est de savoir si quelqu'un d'autre a déjà plagié ce qu'on plagie.
"L'art conceptuel : un art qu'il n'est pas nécessaire de voir pour le comprendre ."
[..]
" L'art moderne : un art qu'il n'est pas nécessaire d'apprécier pour l'acheter".
Comment un artiste peut-il reprendre la main sur son travail, une fois qu'il a été abandonné au marché ? On le vend, il disparaît. Voilà la vérité, telle qu'il la voyait : il n'existe pas d'oeuvre d'art en tant qu'entité autonome, en tant que Ding and sic. Tant qu'elle est dans l'atelier, elle fait encore partie de l'artiste. Quand elle est dans une galerie, c'est une marchandise, un chaudron bouillonnant de valeurs hypothétiques et pourtant indifférenciées, comme la chat dans la couveuse. Quand elle est accrochée au mur chez quelqu'un, ou dans un musée, elle devient une pièce de collection. Nulle part elle n'existe par elle-même.