Aussi loin que je mne souvienne, je n'ai jamais douté Même les soirs où mon père battait ma mère qui poussait de petits cris étouffés pour ne pas réveiller ses enfants. Même quand les hivers n'en finissaient pas, dans notre ferme normande, et que nous vivions, des mois durant, dans une mer de boue, sous la brouillasse, rongés par la froidure jusque dans la moelle des os.
Enfant, j'allais souvent à l'église, non pour prier Dieu ou pour implorer sa consolation, mais plutôt pour lui dire ce que je pensais de son comportement, et le couvrir de reproches, parfois d'insultes.
J'exerce depuis longtemps un métier de mystificateur patenté, le journalisme, qui consiste à expliquer aux autres ce qu'on ne comprend pas soi-même.
Il faut se méfier des textes sacrés ou des manuels religieux. Ils ne restituent jamais la substantifique moelle de la religion qu'ils ont pour objet de célébrer. ils galègent, ils caricaturent. Parfois même ils défigurent. C'est vrai de la Bible comme du Coran ou du Tao-té-king, avec des pages qui, selon le cas, exsudent la haine ou la bêtise. Comme disait julien Green, "la pensée vole et les mots vont à pied".
A défaut du Seigneur, il nous reste des valeurs refuges, des fausses valeurs, sonnantes et trébuchantes, qui abusent les oies, les dindons, toutes les volailles des sociétés humaines : le pouvoir, la richesse, la gloire et l'ambition.
Coïncidence, résonnance, correspondance : l'histoire des religions tourne en boucle comme celle de la philosophie. les prophètes et les saints se nourrissent les uns les autres, au point que leurs itinéraires en viennent, parfois, à se confondre.
J'aime les livres que je considère comme des personnes. Des personnes qui inspirent toujours confiance parce qu'elles ne mentent pas et ne changent jamais (page 162).
François d'Assise est le saint qui m'encloue dans le christianisme parce qu'il incarne ce qu'il a de meilleur. Il ne croit pas pour comprendre, comme Saint Augustin ou Saint Anselme, il croit parce qu'il comprend (page 118).
En 20 siècles la métaphysique n'a rien produit de bon : alors que les sciences ont établi des vérités irréfutables et que la philosophie s'est épuisée à échafauder des théories creuses, avec une fausse rigueur conceptuelle, à partir de principes qu'elle s'est souvent gardée de confronter à l'épreuve de l'expérience (page 95).
... la culpabilité est simplement une habitude à prendre, et qui finit toujours par passer.
Le journalisme consiste à expliquer aux autres ce que l'on ne comprend pas soi même.