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Critique de PG35


PG35
24 février 2022
Curieux bouquin. Franz-Olivier Giesbert nous livre un survol des débuts de la Ve république, de l'accession au pouvoir du Général de Gaulle en 1958 jusqu'à son départ en 1969. Comme de nombreux ouvrages ont déjà été consacrés à cette période – à commencer par la monumentale Histoire de la république gaullienne de Pierre Viansson-Ponté - Giesbert emprunte des chemins de traverse tortueux afin de faire preuve d'originalité à tout prix. On sent néanmoins qu'il n'est pas très à l'aise avec son sujet : il se triture la plume pour éviter l'hagiographie, mais il finit par donner raison à De Gaulle sur tous les sujets.
Il commence par tenter d'écorner les vertus parfois attribuées au Général, rappelant que celui-ci fut un consommateur de comtesses polonaises avant son mariage, puis alléguant qu'il fut un mari volage. Ainsi lui prête-t-il une liaison en 1940 avec sa secrétaire Elisabeth de Miribel et évoque-t-il de douteuses rumeurs de paternité concernant Pierre Lefranc. Ceci n'est ni convaincant, ni intéressant.
Giesbert intitule son deuxième chapitre « Il a du sang sur les mains ». Ah bon ? Il s'agit de l'assassinat de l'amiral Darlan par Fernand Bonnier de la Chapelle, dont Giesbert prétend qu'il fut commandité par De Gaulle – une théorie parmi d'autres. Darlan était une vieille baderne pétainiste, antisémite et incompétente et personne n'a pleuré sa mort. Son exécution a facilité la réorganisation de l'autorité française en Afrique du Nord et l'entrée de l'armée d'Afrique dans la guerre aux côtés des Alliés. À cette occasion Giesbert se plante dans ses repères chronologiques, affirmant que le conflit de Gaulle-Giraud est antérieur à l'assassinat, alors qu'il lui est largement postérieur.
Après ces débuts tâtonnants, plusieurs chapitres sont évidemment consacrés à l'Algérie. Giesbert évoque interminablement les « mensonges » et la « duplicité » de de Gaulle, critique des détails de son action tout en lui donnant raison sur l'inéluctable indépendance. À cette occasion, il a l'aplomb de rapprocher le Général de François Mitterrand : ceux-ci auraient en commun selon lui « la pratique cynique du pouvoir » dès lors qu'il s'agit « d'oeuvrer pour le bien commun ». Giesbert a-t-il oublié que Mitterrand n'oeuvrait que pour son bien personnel ?
Passée la guerre d'Algérie, le livre se complaît dans une sorte de « langueur monotone » où l'on sent chez l'auteur un intérêt morbide pour les ravages de la vieillesse. Élection présidentielle de 1965, tragi-comédie de mai 68, référendum-suicide, départ et mort. Giesbert ne nous apprend pas grand-chose. Il conclut sur plusieurs pages de nostalgie, constatant que depuis le départ du Général, la France n'est plus gouvernée sur quasiment tous les plans, de l'économie à l'immigration.
Franz-Olivier Giesbert a beaucoup lu sur son sujet, à commencer par Alain Peyrefitte et Jacques Foccart. Il mentionne l'évolution de sa propre histoire familiale et personnelle au cours des années gaulliennes, ce qui n'est pas dénué d'intérêt. Dommage cependant qu'il use parfois de jugements saugrenus et péremptoires, notamment lorsqu'il traite de Gaulle de « pompier pyromane » ou de « politicien d'arrière-cour », ce qui ne le grandit pas ; de même n'est-il pas crédible quand il compare la France à une « république bananière ».
Il est également regrettable que son livre soit entaché de quelques menues erreurs factuelles, notamment sur l'anecdote concernant Tati (à qui le Général déclara « J'aime beaucoup votre neveu »), sur l'origine des « barbouzes » (dont le nom est issu de l'imagination fertile de Lucien Bodard et dont l'action ne dépassa pas trois mois), sur la participation effective de Bastien-Thiry à l'attentat du Petit-Clamart (c'est lui qui donna le signal de l'arrivée de la DS présidentielle) ou sur l'affaire Markovic (jamais les Pompidou ne jouèrent aux cartes avec Alain Delon dans la cuisine des Lazareff).
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