C’est un amour gratuit qu’elle lui offre. Un amour qui n’exige rien. Pas de sacrifice, pas d’adaptation, pas de compromis. S’ils vivaient ensemble, comme tout le monde, ils nourriraient des attentes l’un envers l’autre, des attentes qui seraient inévitablement déçues.
On peut ignorer un désir dérangeant, on peut s’occuper pour qu’il ne surgisse pas, on peut mettre des œillères, rester dans des ornières où l’on se croit à l’abri. Mais on n’est jamais à l’abri que des autres. On ne peut rien contre soi-même.
Embrasser, c’est naturel pour l’être humain. C’est s’en priver qui ne l’est pas.
Les hommes, en général, sont programmés pour prendre soin d’une famille.
J’aime mieux un homme généreux avec les femmes qu’un homme qui cherche à se faire vivre par les femmes.
Pense-t-il qu’il peut la séduire avec son argent ? L’âme d’Adélaïde se rebelle. Elle est féministe et fille de féministe, et elle n’a pas besoin qu’un homme paie pour elle. De plus, elle n’aime pas l’idée qu’on la croit sensible à la richesse.
C’est fou ce qu’on peut entretenir d’illusions sur son propre courage.
C’est pour dessiner le monde sans dessein.
La vie, la vraie, semble avoir atteint le fond de la grotte où Adélaïde s’était réfugiée depuis des années. La lumière a chassé l’ombre. Le goût du bonheur souffle fort depuis quelque temps, au point de repousser la peur, sa compagne de toujours. Ce soir, elle a l’impression de recommencer à vivre. Comment expliquer que la mort de quelqu’un puisse donner tout son prix à la vie d’un autre ?
Comme tous les auteurs, en donnant un sens au monde à travers une histoire inventée, c’est sa propre histoire qu’elle essaie de comprendre. La femme-corbeau, c’est sa vengeance contre les injustices de la vie. C’est son cri du cœur, un cri muet qu’elle pousse seule, soir après soir, dans le silence de la nuit, le corps penché au-dessus du papier, crayon à la main.