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Critique de kielosa


Le titre de l'ouvrage de Giuliano da Empoli est astucieux et par ailleurs rigoureusement correct : des mauvais génies, tels Steve Bannon aux États-Unis, Dominic Cummings au Royaume-Uni, Gianroberto Casaleggio et son fils Davide, en Italie, ont effectivement et allègrement contribué à créer un climat de malaise et d'angoisse, soi-disant pour le seul bénéfice des pauvres citoyens que nous sommes ! À ce trio, il convient d'ajouter Arthur Finkelstein (1945-2017), le génial conseiller de Viktor Orbán d'Hongrie et Benyamin Netanyahou d'Israël, et avant de Nixon, Reagan et Sharon. Cet homme avait parfaitement bien compris que la haine ou la colère est un excellent motif pour gagner les élections. Cyniquement, peu avant sa mort d'un cancer, à 72 ans, il a déclaré : Je voulais changer le monde. Je l'ai fait, je l'ai rendu pire ("worse" en Anglais) !

Sûrement que l'auteur s'est inspiré du terme "ingénieurs de l'âme" que le romancier russe, Iouri Olecha (1899-1960), a inventé et lancé lors d'une rencontre chez Maxime Gorki, en présence de Joseph Staline, qui a utilisé, à partir de 1932, cette expression pour désigner les écrivains russes, supposés contribuer (exclusivement) à l'édification et la victoire du communisme.
Il existe un très bon livre historique sur ce phénomène par Frank Westerman, que je compte chroniquer sous peu.

Notre amie, Bookycooky, a présenté, déjà le 16 avril dernier, une chronique du livre de da Empoli de telle qualité, qu'il serait présomptueux de ma part de vouloir essayer de la refaire. Je vous recommande donc vivement de lire cette critique. Je souscris à son approche et conclusions et je me bornerai ainsi à quelques remarques en marge et aux tous récents développements, notamment en ce qui concerne un de ces fameux ingénieurs du chaos, Dominic Cummings, et son chef Boris Johnson dans la comédie pénible du Brexit et en Italie, l'écartement du pouvoir central de la grosse "star" Matteo Salvini, provisoirement du moins.

Je crois que j'ai été le tout premier sur Babelio à brosser un portrait, d'ailleurs peu flatteur, de l'horrible Steve Bannon dans une critique de "Une conférence au Vatican", du 17/07/2017. Je ne vais donc pas répéter mon énorme admiration pour ce "gentleman" ici. Je tiens juste à signaler que son "master plan" pour une victoire électorale partout en Europe de l'extrême droite nationaliste, qu'il avait concocté dans son bureau près des bâtiments de l'Union Européenne à Bruxelles et qu'il avait précisé à Lille lors du congrès du Rassemblement National et dans la capitale belge lors d'une audition d'experts organisée par l'extrême droite flamande ("Vlaams Belang") où a brillé également Mme le Pen, n'a pas donné les résultats escomptés par ce triste sire et grand pote de Salvini. Mais j'avoue que, comme Européen convaincu, j'ai eu peur. S'il y a un étranger que l'on devrait expulser de notre continent, c'est bien Bannon.

Quoique le ras-de-marée européen d'extrême droite populiste ne se soit pas manifesté, sauf par-ci par-là un gain de quelques sièges dans les parlements nationaux, comme malheureusement en Flandre, avec le résultat que la formation d'un gouvernement fédéral belge risque de devenir une entreprise de très longue haleine !

En Italie, la grande vedette politique Salvini, qui a provoqué, début août 2019, la chute du gouvernement de Giuseppe Conte dans lequel il était ministre de l'intérieur, en vue d'organiser des élections anticipées et sa victoire aux urnes, s'est légèrement trompé dans ses calculs. L'accord intervenu entre le mouvement 5 Étoiles et le Parti démocrate (PD) a conduit au gouvernement Conte II, le 4 septembre dernier, sans Matteo Salvini. le pauvre peut continuer, sur les plages italiennes ou dans bars et restos, à se laisser prendre en selfies par n'importe qui de passage où lui se trouve par hasard. Comme le note l'auteur : "Le secret de Salvini réside dans le fait qu'il a réussi à catalyser une attention constante sur lui-même".(page 89). le showman italien se trouve donc pour le moment à l'écart, mais vu sa popularité colossale, il est sûr que la bête cherche à rebondir !

Outre-Manche, le mauvais vaudeville du Brexit a connu récemment une période de faste. Toutes les initiatives de Boris Johnson n'ont mené nulle part et à chaque fois il a été défait par un vote contraire du Parlement. C'était notamment le cas avec la motion du Brexit sans accord et les élections anticipées. Sans compter des abandons qui font mal, comme celui de son propre frère Jo Johnson. Logiquement, l'on pourrait s'attendre à un renvoi immédiat de son conseiller principal Dominic Cummings pour avis erronés, mais Bojo est Bojo et uniquement intéressé par Bojo et qui sait si ce cher collaborateur ne trouvera pas une nouvelle solution magique.

Même sans son Cummings, il n'a pas hésité à se féliciter des avances de ses négociations avec l'UE. Une information formellement contredite par plusieurs sources à Bruxelles. Mais dans cette histoire on n'en est plus à un mensonge près.

J'ai toujours eu beaucoup d'estime et de sympathie pour l'Angleterre, où le premier parlement de l'histoire a vu le jour. Actuellement pourtant, avec la farce absurde du Brexit, les shows futiles du Premier ministre, son conseiller sans foi ni loi, les dissonances de Nigel Farage et Milo Yiannopoulos, mon enthousiasme pour "Dear Old England" a pris un sérieux coup.

Le gouverneur de la province où j'habite, la Flandre-Occidentale, a indiqué les graves perturbations du trafic sur le réseau autoroutier avec la France qu'il faut craindre en cas d'un retrait britannique sans accord, le 31 octobre prochain. Entretemps, les autorités sur le continent cherchent à recruter des dizaines de douaniers et s'attendent à une multiplication d'encombres pour la circulation des voitures et de délais considérables pour l'acheminement des marchandises.

J'ai été favorablement impressionné par l'analyse implacable de Giuliano da Empoli des maux de notre temps et de l'impact colossal de ses "ingénieurs" qui sur la base d'algorithmes et à travers les réseaux sociaux jouent un tel rôle politique important, pour ne pas dire hélas déterminant.

À ce propos, je me suis souvenu d'une citation du regretté Philip Kerr que j'ai posté il y a 2 ans sur Babelio et extrait de son roman "La feinte de l'attaquant", disant : "Je ne suis pas trop fan des réseaux sociaux. Selon moi, nous nous porterions tous beaucoup mieux si chaque tweet était tarifé cinq pennys, ou si nous devions coller dessus un timbre-poste avant de l'envoyer. " (page 12).
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