Ce que l’on appelle Mondialisation [globalisation ?], qui est donc uniformisation par le bas, le règne des multinationales, la standardisation, l’ultralibéralisme sauvage sur les marchés mondiaux (une Corporation déplace avantageusement ses usines dans un pays lointain, un malade n’a pas le droit d’acheter des médicaments à un meilleur rapport dans un pays voisin), et ainsi de suite, chacun peut s’en rendre compte, c’est la procession des lieux-communs râbachés par tous, et que nous nous répétons infiniment, mais c’est aussi, tout cela, le revers négatif d’une réalité prodigieuse que j’appelle Mondialité. Elle projette, cette mondialité, l’aventure sans précédent qu’il nous est donné à tous aujourd’hui de vivre, et dans un monde qui pour la première fois, et si réellement de manière tant immédiate, foudroyante, se conçoit à la fois multiple et un, et inextricable. Nécessité pour chacun de changer ses manières de concevoir, de vivre et de réagir, dans ce monde là.
Le président de la République de Chine visite Beijin à mains nues et sans masque. (L’épidémie risque d’être bientôt le mondiale).
[écrit en 2002]
Autre point échangé : nous nous habituons sans le vouloir à ce flot continu, de plus en plus placide, comme insensibilisés devant la répétition de ses champs de dévastation, de ces morts qu’on ne compte plus et qu’à la vérité on tâche de cacher, de ses cris impuissants. C’est comme si dans le monde il n’y avait plus que trois sortes de gens : ceux qui décident, ceux qui souffrent, ceux qui regardent et oublient.
La relation relie, relaie, relate. Elle ne rapporte pas ceci à cela, mais le tout au tout.
Hier, m’allant par des espaces dilatés, je méditais une querelle de la transparence et de la matière.
Nous travaillons, les mains vouées aux continents, aux archipels, aux fleuves et aux monts, et nous crions cette palpitation fragile, née du plus fond.
L’air est bouleversé de nouvelles qui n’en sont pas, chacun de nous les a devinées avant même qu’elles nous arrivent. Nous avons ainsi acquis une qualité de prescience, travaille dans la mécanique de l’« Information ». La relation des événements finit par précéder les faits eux-mêmes et c’est elle qui leur donne corps. Et comment distinguer dans ce flots ?
Regardons alentours. La terre tremble de partout, les volcans s’éventrent, les inondations rasent les pays, les tornades déracinent les bourgs, les épidémies sont inarrêtables, la température flambe, l’eau s’épuise et se pollue, mais une fois que les communautés sont en cours, les famines fauchent des commmunautés sans recours, et tout cela est le plus souvent la conséquence de l’œuvre des hommes. Résistons à la pensée de l’Apocalypse.
Je peux changer, en échangeant avec l’Autre, sans me perdre pourtant ni me dénaturer.
La pensée du tremblement s’accorde à l’errance du monde et à son inexprimable. Elle n’est ni crainte ni faiblesse, elle n’est pas irrésolution (« Agis dans ton Lieu, pense avec le Monde »), mais l’assurance qu’il est possible d’approcher ce chaos, de durer et de grandir dans cet imprévisible, d’aller contre ses certitudes encimentées dans leurs intolérances, de « palpiter du palpitement même du monde » qui est à découvrir enfin. Nous répéterons souvent cela, imitant aussi l’obstination du monde à se répliquer