AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782070414468
184 pages
Gallimard (16/05/2000)
3.85/5   17 notes
Résumé :
Cette parole métisse fait scandale. Elle prend à contre-pied ce qui a été nourri par les règles du standard, les illusions de la transparence. Pays rêvé, pays réel est un texte baroque, rythmé en huit séquences. Il chante l’Afrique d’où furent arrachés les esclaves qui remplacèrent les Antillais décimés par les premiers colons. Il chante le présent éparpillé d’un peuple assimilé par diverses dominations. Il est énergie contre les phénomènes d’usure : cyclone fracass... >Voir plus
Que lire après Pays rêvé, pays réel - Fastes - Les Grands ChaosVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Exotisme des lieux et exotisme des mots, qui surgissent d'un chaos tropical et se combinent pour dire un pays au loin de tout. La langue de Glissant naît de ce monde d'îles luxuriantes et mystérieuses qui est le sien. Nous sommes, montagnards cartésiens, surpris. Les espèces de plantes, d'animaux, de phrases qui frappent nos oreilles sont comme une musique sans repères, mélodie inchantable et parfois touchante, à réécouter pour mettre le pied dans un univers inconnu, à relire pour ne pas être, comme après ce survol trop rapide, balotté entre des sons au timbre d'ailleurs et un ici qui se refuse à quitter son douillet langage sédentaire.
Commenter  J’apprécie          90
Edouard Glissant est une lecture nécessaire à notre époque. Après le concept de Négritude érigé par Césaire, Senghor et Damas, c'est au tour de cette nouvelle génération d'écrivains francophones de s'interroger sur les notions d'identité et de culture. Chez Glissant, ce sont la « mondialité », «l'antillanité » qui façonnent son oeuvre.
Il serait facile de tomber dans l'exotisme bon marché en lisant "Pays rêvé, Pays réel". Ici, la poésie est une fusion d'images, un appel à la musicalité et aux jeux de mots. La nature semble reprendre ses droits, bouleverser l'ordre des choses et interpeller le lecteur.
Commenter  J’apprécie          30
Le poète martiniquais clame l'obscur des mots, serpente et écume entre Tout-monde et Caraïbes. On se perd dans ce courant insensé mais non insensible, on voudrait se raccrocher à notre rassurante raison, mais, inéluctablement, la langue ouvre failles, goufres et lézardes.
Commenter  J’apprécie          20

Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
L’œil dérobé
à Jean-Jacques Lebel,
nilotique


Extrait 7

  Le vent jaune a feulé sur les sables, le feu chavire :
   « Ton âme
   « devient soleil !... » Le feu
  chavire aux roseaux profanés. Un homme avoue

  pousser en nuit, corps après corps, sur cette mangle où il écrit,
  jusqu’à l’écart du cœur, comme une guêpe terrassée,
  quand la fleur rouge éclôt derrière la fatigue,
  - les herbes trébuchent dans cet éclat.

  Il dit être hélé de ces inconduites d’arbres
  semés - nus – dans l’avancée de sables,
  leurs voix épellent en soufrées : « Je tisse
   « la vérité à ta lumière de soleil… » L’arbre offensé
  lors avoue des marais, tant d’îles qui font brame, une
branche
  qui s’évente en feux déments et qui tremble.

  Ô pour cette fois l’œil a raisonné son espace

  le corps de terre en fièvre a roué sa cadence, il a hélé ses mains
en l’unité blessée, il échevelle toute étoile il a pris faille pour pensée
donne volcan pour fleur et fumaison d’épines pour sentier…
Commenter  J’apprécie          10
L’œil dérobé
à Jean-Jacques Lebel,
nilotique


Extrait 9

  Lors j’ai pris cette roche et je l’ai fait sonner

  La lumière des mots déposait nue sur la paix d’herbe
  le matin plaquait à la case un feu de feuilles loin-du-vent
  le jour barré descend la morne
  toutduvan, marchatouffe, mélasse à rêves, mélanésie,
  tous mots de crève et de midi
  aboyeurs de sang.

   « Mon corps aimé, voyez la gêne où nous a mis l‘été
   « en ce froid qui au ras du soleil tant nous hante ! » -
Le vent
  à la lune bleue conte un bel-passage.

  Ce pré se met en jungle, une source force à périr
  la nouvelle-en-créole à la fin a crépi son Nil…

  Sillac et acoma sonnent laghia nouveau
  sillac, sillage de la bête en son Avent
  acoma, vieille brousse en un seul fût montée
  laghia, jeune mêlée ennilée d’une éternité…

  le flamboyant, né d’orge rouge, de pudeur hautement
vanté
  s’avance, estime la Gorée où nos chemins ont mis leurs
ganses
  Il assemble, vieux corps levé au bleu du temps, les mots
d’eau et les mots de riz
  l’arbre encense, l’hibiscus à odeur d’anis darde un guêpier
de frèles ovaisons…
Commenter  J’apprécie          00
L’œil dérobé
à Jean-Jacques Lebel,
nilotique


Extrait 1
PRÉSENTATION

  Le Nil, fleuve du temps. Leçon du temple de Kom-Ombo, où
estime au mieux cette chirurgie calée dans la pierre, désignant
ses instruments et son rituel, qui servit à restituer au dieu Horus
son œil, non moins rituellement énucléé par un autre dieu. Images
de l’œil qui marche, ou qui verse un pleur en sillage. Le langage
de l’eau n’est perçu qu’en écho, dru comme feuille d’étain. Les
cartouches de pierre livrent leur matière secrète. Les relents des
mots, que le visiteur recueille ou profère, s’entassent en réels
lointains : C’est l’acoma, l’arbre de majesté de la forêt tropicale ;
ou c’est laghia, danse antillaise en forme de combat, qui révèle
l’accord et l’écart. Les deux langages s’évadent l’un de l’autre,
l’un deviné en cette navigation, l’autre qui naît à peine à l’ordre
du poème. Une écluse sans eau bloque à vif la dérive vers le Delta.
Mais dans l’assomption des nouvelles du monde, les deux paysages,
le nilotique et l’insulaire au loin, se touchent et se comprennent.
Ichneumon et Laoka s’accordent à nouveau, pour célébrer le
regard recomposé du dieu.


Les nouvelles de Lune n’ont pas enfreint les hypostyles
et la poussière de nos pieds à peine empreint le sable…
Commenter  J’apprécie          00
L’œil dérobé
à Jean-Jacques Lebel,
nilotique


Extrait 5

  Maintenant c’est la nuit, l’étape a posé sa ruche dans le silence.
Une étoile dessine à l’aquavive son vieux rêve.
  Des tessons brulent à demi.

  Repartons ! En route ! – ¡Vaya ! – Et tous ces parlers qui cordent
la poussière !

  L’œil dérobé nous a suivis, où l’eau dormait en son givre :
  l’ordre des mots ne distrait pas le monde.

  Il est un lieu ou flûte de pâtre ose sa transparence
   (la boue a fait chanfrein des cheveux, dépoli le souffle),
  Rien n’y lève aux dalles sacrées, hors ce qui est admis à
vénération
  poètes et conteurs y font exprès d’oblitérer la page ou de taire
l’acclamation,
  pour nous la palme y a décliné sa mâchoire, pour moi l’éternité
glauque.

  A gueules d’un palmier, haussé de sang, qui hampe de vent la
voûte
  le bourg élève son rempart qui nous dévoue salutation
  un homme avoue perdre ses dents, pourrir en sable, comme
le temps, une femme
  s’endort au fleuve puis se lève, Enceinte-de-la-supplique !…
Commenter  J’apprécie          00
L’œil dérobé
à Jean-Jacques Lebel,
nilotique


Extrait 11

  À flanc de l’écluse qui brûle, une inspirée a dévoué plus que ses
linges et ses voiles : Laoka ô Laoka ! Elle fait offrande au fleuve
d’un peu d’eau, puis lève à large vent son cœur en ablution,
  l’ombre des roseaux alentour éclabousse,

  sur la crête d’un âne, quand oblongue, s’est offusqué !

  Alors le conteur guette en son serment, jurant Isis qu’il redevient
son Ichneumon !...

  La proue de son cri lève sur la boue un lot de cimes violettes,

  son destin, qui soudain s’entête au bord d’un nuage, seul …

  Ils ont loué l’eau débordée de sang
  battent maison sur toute case
  ils crient – c’est l’arrimage – une aigle d’eau qui en haut vent
si longtemps déraisonne
  ils serrent aux cantines ce lot de fleuves :
  les paroles d’au-loin qui sur leurs mains suintent - sur le limon
du quai…


   Dans l’obscur qui feint les mots courent envers
   l’œil du dieu retrouvé au style gris des hypogées
Commenter  J’apprécie          00

Videos de Edouard Glissant (27) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Edouard Glissant
#EdouardGlissant #créolisation #CulturePrime
Avec son idée de la créolisation, le poète et philosophe Edouard Glissant en appelle à un "Tout-Monde" visionnaire, où nos identités dynamiques et ouvertes sont une clé pour penser notre futur. Réinterprétée, réappropriée aujourd'hui par divers courants de pensées, l'idée de créolisation théorisée par Edouard Glissant plonge ses racines - ses rhizomes - dans son expérience singulière des Antilles et de la langue créole.
Abonnez-vous pour retrouver toutes nos vidéos : https://www.youtube.com/channel/¤££¤13DKToXYTKAQ5¤££¤6khzewww2g/?sub_confirmation=1
Et retrouvez-nous sur... Facebook : https://fr-fr.facebook.com/franceculture Twitter : https://twitter.com/franceculture Instagram : https://www.instagram.com/franceculture
+ Lire la suite
autres livres classés : poésieVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (44) Voir plus



Quiz Voir plus

Testez vos connaissances en poésie ! (niveau difficile)

Dans quelle ville Verlaine tira-t-il sur Rimbaud, le blessant légèrement au poignet ?

Paris
Marseille
Bruxelles
Londres

10 questions
1222 lecteurs ont répondu
Thèmes : poésie , poèmes , poètesCréer un quiz sur ce livre

{* *}