C'est l'histoire d'un mec...
Non pas celui-là, un autre mec.
Un mec en costume cravate, employé d'une grande entreprise et tout, qui un beau matin s'en va prendre la clé d'escampette... A moins que ce soit la poudre des champs ?
Pardon mais en lisant les élucubrations du père Gourio (pas celui
De Balzac hein, plutôt celui de Charlie
Charlie-Hebdo, du "Tribunal des flagrants délires" ou de "
Les Nuls, l'émission"), on se laisse doucement gagner par sa folie douce et on finit par tout mélanger.
Bref.
Toujours est-il que le mec là, le businessman encravaté, nous fait le coup de la bifurcation soudaine. La tour vitrée du quartier d'affaires, où il sévit depuis toujours, est sur la droite, et lui part à gauche. Comme ça, sur un coup de tête. École buissonnière, bouffée de liberté.
C'est le début d'une aventure rocambolesque, faite d'une succession de rencontres toutes plus farfelues les unes que les autres (citons au hasard un zoologue barbichu occupé devant une cage vide à l'étude d'un spécimen rare de "rien" en captivité, une bohémienne désireuse d'apprendre la langue des crapauds, un ambulancier convoyeur de pantoufles, un banquier coincé dans un costume de clown, j'en passe et des plus dingues encore).
À l'occasion de cette rafraichissante fugue en absurdie, notre narrateur bascule dans un étrange monde parallèle où les chiens miaulent, où il existe des accordeurs d'oiseaux de concours et de chauffeurs-livreurs-ornithologues qui déjeunent dans des relais routiers naturistes, où l'amour fou et l'art du hasard s'enseignent à l'école...
Tout ça n'a ni queue ni tête, c'est le contraire de ce que je lis d'habitude (le titre ne ment pas !) et pourtant j'ai marché !
Encore une bonne pioche pour moi lors de la dernière masse critique : merci à Babelio et aux éditions du Cherche midi pour cette douce divagation littéraire.
L'univers de
Jean-Marie Gourio m'a immédiatement fait penser à celui de l'excellent "Philémon", le héros de la fabuleuse BD signée Fred dont j'aime à retrouver régulièrement la poésie loufoque et l'esprit joyeusement décalé.
Quant aux dialogues toujours saugrenus dont nous régalent les personnages, ils auraient à coup sûr fait sourire le regretté grand
Raymond Devos, lui qui maîtrisait comme personne l'art du pas de côté...
Rien de tel pour voir le monde autrement !
Évidemment, le lecteur qui chercherait dans ces pages les réponses à ses plus grandes questions existentielles restera probablement sur sa faim (encore que ?).
Celui qui en revanche accepterait de se laisser porter par la plume simple et imaginative de l'auteur passera à n'en pas douter un agréable moment !
C'est tout le mal que je lui souhaite.
En guise de conclusion, prenons nos manuels à la page 79 et lisons :
" Peut-on revivre mieux ce que l'on croit avoir raté ? lui demanda-t-elle.
- Je l'espère de tout mon coeur, répondit l'homme.
- Vous êtes magicien !
- Si la magie ne le peut pas, la fantaisie le peut sûrement, affirma-t-il."
Abracadrabra.