La dernière chasse

La plupart des gens pensent qu'ils seront "complets" ou deviendront enfin ce qu'ils sont quand ils auront réalisé leurs projets, mais ce sont au contraire ces promesses jamais tenues qui les constituent, qui les fondent en profondeur. Nous sommes tous des mutilés de nos rêves.

La slave détestait les flingues et Niémans en connaissait la raison.
Lui en revanche était passionné par les armes - de toute époque, de toute nature. A ses yeux, elles correspondaient à une expression très particulière de l'activité créatrice de l'homme. Et si cette activité débouchait, in fine, sur la mort, eh bien, confusément, cela ajoutait à leur beauté.

L'absence d'espoir, c'était la victoire suprême de l'espoir, celui de n'être jamais déçu, ni par la vie ni par les hommes.

Chaque nuit d’amour avait été gâchée par le désir de bien faire. Son érection était-elle impeccable ? Optait-il pour les bonnes caresses ? Il se sentait contraint de suivre un cahier des charges dont il ne connaissait même pas la teneur. {Niémans}

Niémans pila dans la cour de gravier et dérapa, toutes roues bloquées, sur plusieurs mètres. La Villa de Verre brillait dans la nuit comme un diamant sur un lit de velours. Ses lignes, ses angles, ses surfaces opposaient leur fixité à l’ondoiement nocturne de la nature–vagues souples des herbes, lente oscillation des sapins noirs, cortège solennel des nuages…
Mais Niémans n’était pas d’humeur poétique.

Le repas était délicieux. Des saucisses rutilantes, un coq mitonné, accompagnés de spätzle baignées dans une sauce au munster. A priori rien de très léger. Pourtant, tout ça s’avalait comme des petits nuages, dans un halo mordoré et un fumet doucereux.

Niémans ne pouvait s’empêcher de prendre un ton persifleur quand on lui parlait d’écologie et de ses défenseurs. Il savait pourtant qu’ils étaient du bon côté de l’avenir.

La revue de détails ne dura qu’un clin d’œil mais les femmes n’ont pas besoin de beaucoup plus pour évaluer les forces en présences. [Laura la comtesse et Ivana la fliquette]

Ivana fit presque une révérence. En cet instant elle se sentait à peu près aussi séduisante qu’une blatte sortant de sous un évier. [Ivana devant Paula]

La nuit prenait racine dans les bois et avec elle le froid –le froid sans pitié de la campagne, avec sa putain d’humidité qui vient vous chercher la moelle au fond des os.