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Citations sur Le tambour (108)

Je le concède : je suis pensionnaire d'une maison de santé, mon infirmier m'observe, me tient à l’œil, car il y a dans la porte un judas, et l’œil de mon infirmier est de ce brun qui ne saurait percer à jour celui qui a les yeux bleus comme moi.
(Incipit)
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Soyez heureux avec le miel artificiel et les pierres à briquet, dis-je sans colère ni accusation, mon art à moi portera un autre nom, mon bonheur sera désormais inscrit sur des pierres tombales ou, plus professionnellement buriné dans des pierres tombales.
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«Monsieur Matzerath, voyons, me morigène-t-il, si vous continuez à tambouriner aussi fort, cela va s'entendre ailleurs, qu'on tambourine bien trop fort ici. Vous ne voulez pas faire une pause, ou tambouriner plus doucement ?»
Oui, Bruno, je vais essayer de dicter à mon fer-blans un nouveau chapitre, moins bruyant, bien que ce sujet là, précisément, réclame à grands cris un orchestre rugissant, affamé.

[Passage suivi du chapitre :] Foi espérance amour
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Maman pouvait être très gaie. Maman pouvait être très anxieuse. Maman pouvait oublier vite. Maman avait cependant bonne mémoire. Maman m'avait jeté mais étal avec moi dans l'eau du bain. Je perdais parfois Maman mais son découvreur la suivait. Quand je trucidais des vitres, Maman apportait le mastic. Elle se mettait souvent dans son tort en même temps que sur son trente et un. Même quand Maman se boutonnait jusqu'au col, elle m'ouvrait des pistes. Maman craignait le courant d'air et n'arrêtait pas de faire du vent. Elle vivait à crédit elle n'aimait pas payer d'impôts. J'étais le verso de sa carte supérieure. Quand Maman jouait le coup à cœur, elle gagnait toujours. Quand Maman mourut, les flammes rouges pâlirent un peu sur le cylindre de mon tambour mais la peinture blanche devint plus blanche encore, et si crue que même Oscar, aveuglé, devait parfois fermer l’œil.
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Jan avait déjà passé trois fois le conseil de révision, mais il avait été réformé à chaque conseil en raison de son état lamentable ; ce qui, en des temps où l'on envoyait à Verdun tout ce qui tenait à peu près debout afin de le mettre, sur la terre de France, à l'horizontale pour l'éternité, en disait long sur la constitution de Jan Bronski.
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Quand j’ai dit à Bruno : « Ah ! Bruno, voudrais-tu m’acheter cinq cents feuilles de papier vierge ? », Bruno a répondu, en regardant au plafond et en envoyant l’index – ce qui rendait une comparaison inévitable – dans la même direction : « Vous voulez dire du papier blanc, monsieur Oscar ? »
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On peut commencer une histoire par le milieu puis, d'une démarche hardie, embrouiller le début et la fin. On peut adopter le genre moderne, effacer les époques et les distances et proclamer ensuite, ou laisser proclamer qu'on a résolu enfin le problème de l'espace-temps. On peut aussi déclarer d’emblée que de nos jours il est impossible d’écrire un roman puis, à son propre insu si j’ose dire, en pondre un bien épais afin de se donner l’air d’être le dernier des romanciers possibles. Je me suis également laissé dire qu’il est bon et décent de postuler d’abord : il n’y a plus de héros de roman parce qu’il n’y a plus d’individualistes, parce que l’individualité se perd, parce que l’homme est seul, que tout homme est pareillement seul, privé de la solitude individuelle, et forme une masse solitaire anonyme et sans héros. Après tout, ce n’est pas impossible. Mais en ce qui nous concerne, moi Oscar et mon infirmier Bruno, je veux l’affirmer sans ambages : nous sommes tous deux des héros, des héros tout différents, lui derrière le judas, moi devant ; et quand il ouvre la porte, ça y est : malgré notre amitié et notre solitude, il ne reste plus de nous qu’une masse anonyme et sans héros.
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Après le baptême, on mangea. On avait poussé deux tables l'une contre l'autre. On commença par la soupe de tortue. Cuillère et bord de l'assiette. Ceux de la campagne lapaient. Greff écartait le petit doigt. Gretchen Scheffler mordait la soupe. Guste faisait un sourire large au-dessus de sa cuillère, Ehlers parlait par-dessus la sienne. Vincent visait en tremblotant à côté de la sienne. Seules vieilles femmes, la grand-mère Anna et la mère Truczinski étaient pleinement adonnées à leurs cuillères, pendant qu'Oscar tombait, pour ainsi dire, à côté de sa cuillère. Il s'en allait, tandis que les restants continuaient à enfourner, et il cherchait dans la chambre à coucher le berceau de son fils ; il voulait réfléchir à son fils, pendant que les autres, derrière leurs cuillères, se vidaient à mesure de leurs pensées et vidaient leurs assiettes à mesure qu'ils vidaient leurs cuillerées de soupe dans eux-mêmes.
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Mais on ne peut garder le malheur en cave. Il file par les égouts avec les eaux usées, il se communique aux conduites de gaz, il est fourni à tous les ménages et personne, en mettant son pot-au-feu sur les flammes bleuâtres, ne se doute que le malheur fait bouillir son frichti.
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Au cimetière à demi rural de Brenntau, avec ses deux cantons de part et d'autre de l'allée d'ormes, avec sa petite chapelle qui ressemblait à un carton collé pour une crèche, avec son puits, ses oiseaux vivaces, sur l'allée du cimetière proprement ratissée, en tête de la procession juste derrière Matzerath, je m'avisait pour la première fois que me plaisait la forme du cercueil. Plus tard j'ai eu souvent encore l'occasion de laisser glisser mes regards sur du bois noir, brunâtre, utilisé à des fins dernières. Le cercueil de ma pauvre maman était noir. Il allait se rétrécissant vers le pied avec une merveilleuse harmonie. Y a-t-il au monde une forme qui réponde mieux aux proportions de l'homme ?
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