AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Soune


Il y a des sujets dont on se passerait bien dans la vie. La maladie fait sans conteste partie de cette catégorie. Alors lire des livres traitant de la maladie, sans façon… Cependant, même si Balzac dit que « la maladie n'est pas dans les livres, elle est dans le malade», c'est un sujet que je fuis souvent… Comme si la maladie était contagieuse et se transmettait de livres à lecteurs …

Pourtant la maladie rode partout. Que celui ou celle qui n'a jamais été malade au moins une fois dans sa vie lève la main. La maladie fait partie de l'homme. Henry Miller va même jusqu'à dire dans Tropique du Cancer que le monde entier est malade : « le monde autour de moi se dissout, laissant çà et là des îlots de temps. le monde est un cancer qui se dévore lui-même ».

Mais parfois, des rencontres inopinées nous poussent à réévaluer nos priorités et à dépasser nos peurs. Nous nous retrouvons contre toute attente à lire des livres sur la maladie, à les encenser, à les lire plusieurs fois Il faut avouer que la littérature traitant de ce sujet est de plus en plus présente, la maladie étant visiblement un sujet de moins en moins tabou. Citons le Malade Imaginaire de Molière encensé par l'Education Nationale française, L'Ecume des Jours de Boris Vian, maintenant adapté au cinéma ou La maladie de Sachs de Martin Winckler pour n'en citer que quelques-uns.

La littérature a cela de formidable qu'elle permet de toucher des sujets qu'on craint d'aborder dans la vie, avec plus de facilité. Elle permet souvent une autre approche de la maladie, une approche moins directe et plus douce permettant au malade d'exprimer son mal être et à ses proches de mieux l'appréhender.

Il devient donc de plus en plus difficile de fuir ce sujet.

C'est ainsi que j'ai croisé la route de Jess.

Lorsque je l'ai entendue parler de ce livre, j'ai dû m'arrêter de respirer quelques minutes. Tant d'émotions transparaissaient dans sa voix que mon coeur d'artichaut a eu besoin lui aussi de se poser avant de fondre. Quelque chose dans sa voix dépassait la tristesse du sujet et transcendait la souffrance. Sans même connaître le livre, j'étais touchée. Sans même connaître cette lectrice, je me suis sentie proche d'elle.

Lorsqu'un livre fait passer de telles émotions, cela donne une histoire hors du commun. Ce livre est un cadeau… Difficile à décrire.

Merci à Jess pour cette heureuse découverte!



Résumé de la quatrième de couverture :

Hazel, 16 ans, est atteinte d'un cancer. Son dernier traitement semble avoir arrêté l'évolution de la maladie, mais elle se sait condamnée. Bien qu'elle s'y ennuie passablement, elle intègre un groupe de soutien, fréquenté par d'autres jeunes malades. C'est là qu'elle rencontre Augustus, un garçon en rémission, qui partage son humour et son goût de la littérature. Entre les deux adolescents, l'attirance est immédiate. Et malgré les réticences d'Hazel, qui a peur de s'impliquer dans une relation dont le temps est compté, leur histoire d'amour commence… Les entraînant vite dans un projet un peu fou, ambitieux, drôle et surtout plein de vie.



Mon avis :

Lorsqu'une histoire traite d'une jeune fille en phase terminale du cancer, on se dit logiquement que cette histoire n'a pas d'intérêt car forcément déprimante. Cependant lorsque cette histoire qui décrit une jeune femme atteinte d'un cancer en phase terminale tombe amoureuse, on se trouve tout simplement en présence d'une love story… Et c'est exactement ce que décrit Nos Etoiles contraires.

Rappelez-vous, le film de 1970, Love Story….


Ici, deux adolescents atteints du cancer se rencontrent.

Hazel Grace a 16 ans et se bat depuis ses 13 ans contre le cancer qui la prive d'oxygène, la forçant à trainer avec elle, où qu'elle aille et quoi qu'elle fasse, une bombonne d'oxygène. Augustus Waters a 17 ans. Ancienne star du basketball, il se retrouve avec une jambe en moins suite à la déclaration d'un ostéosarcome, une tumeur osseuse. Les deux adolescents se rencontrent au groupe de soutien des malades du cancer des jeunes. Ils sont instantanément attirés l'un par l'autre. Une jambe en moins, une bombonne en oxygène, une jeune femme maigrichonne et l'amour naît au premier coup d'oeil. Leur histoire d'amour était écrite dans leur maladie.

Ecrire sur des enfants atteints de cancer est une invitation spéciale à la sensiblerie, au pathos, et au ridicule lorsque l'écriture est mal maitrisée. Avec ce livre, John Green réussit à traiter d'un sujet difficile en respectant la beauté de la vie, sans se laisser aller au misérabilisme. Il évite parfaitement de tels pièges. Pourtant, il parle de vie, d'amour et de mort mais toujours avec sensibilité, intelligence, honnêteté et intégrité. Tout un florilège d'émotions se fait jour, destiné, peut être, comme il l'écrit dans ce roman « à être un réveil. Un cri de ralliement. Une perfusion de morphine ».


C'est l'histoire d'une fille avec une canule dans le nez, histoire de pouvoir respirer ce que ses poumons ne peuvent plus lui offrir, d'un type unijambiste et de leur ami aveugle. Pathétique ? Si seulement… Cela rendrait moins difficile le fait d'en parler aujourd'hui avec vous. Cette histoire réussit à célébrer la vie malgré la maladie. La maladie révèle les gens peut être, allez savoir…

Cette histoire me fait penser au premier vol du papillon, lorsque celui-ci se découvre des ailes et avec elles, la liberté.
Selon l'espèce à laquelle il appartient, la durée de vie d'un papillon peut varier de quelques heures à plusieurs mois. Et pourtant, il en verra des choses le papillon.

Hazel embrasse Augustus pour la première fois et elle a l'impression aussitôt d'être différente :
« Et c'est là qu'on s'est embrassé (...) L'espace autour de nous s'est évaporé et, pendant un instant, j'ai vraiment aimé mon corps, ce corps détruit par le cancer que j'avais passé des années à trimballer partout me semblait soudain valoir la peine que je me batte pour lui, valoir la peine que je supporte les tubes dans ma poitrine, les cathéters et les trahisons incessantes des tumeurs ».

Le papillon vient de découvrir qu'il avait des ailes et qu'il pouvait s'en servir.

Hazel est tombée sous le charme d'un roman qui parle d'une malade qui n'a pas survécu. le livre s'arrête brutalement sur une phrase non achevée, comme si l'héroïne était morte ou trop faible pour continuer son journal. Depuis, Hazel est obsédée par ce récit. Elle aimerait rencontrer l'écrivain pour que ce dernier lui raconte ce qui se passe ensuite pour ceux qui restent. Augustus va lire ce livre et tomber sous le charme du livre et, simultanément, d'Hazel. Il fera tout pour l'aider à réaliser ce souhait, malgré les faiblesses de leurs corps, coûte que coûte.

« Je me suis demandée si ce qu'on dirait de moi après ma mort se résumerait aussi à mon combat héroïque, comme si je n'avais rien fait d'autre de ma vie que d'avoir le cancer » se demande Hazel au début du livre.
Malgré la peur de l'oubli qui se fait plus présente à mesure que la maladie fait des siennes, Hazel commence à déployer ses ailes. Malgré la maladie qui gagne à nouveau Augustus Waters, lui aussi va découvrir qu'il a des ailes. Ils vont déployer leurs ailes en même temps et ensemble. Et tant pis s'ils sont tous deux « une grenade dégoupillée », prêts à exploser à tout moment. L'amour se vit.


« Tu vas vivre aujourd'hui le meilleur de ta vie. C'est ta guerre désormais ».

Une fois les ailes déployées, ils se découvriront enfin, entiers :
« Je m'appelle Hazel. Augustus Waters était le grand amour de ma vie. Notre histoire d'amour fut épique et je doute de pouvoir en dire le moindre mot sans tomber en larmes. Gus savait, Gus sait que je ne raconterai pas notre histoire d'amour parce que, comme toutes les vraies histoires d'amour, elle mourra avec nous, comme il se doit. J'espérais qu'il écrirait mon éloge funèbre, parce que personne mieux que lui…
Je me suis mise à pleurer.

OK. C'est impossible de ne pas pleurer. Comment est-ce que … OK.OK.

J'ai respiré profondément et j'ai repris ma feuille.
Comme je ne peux pas parler de notre histoire d'amour, je vais parler de maths. Je ne suis pas très forte en maths, mais je sais une chose : il existe des nombres infinis entre 0 et 1. Il y a par exemple : 0,1 et 0 ,12 et 0,112 et toute une ribambelle d'autres nombres infinis. Evidemment, l'ensemble de nombres infinis compris entre 0 et 2 et 0 et 100 000 est beaucoup plus important que celui compris entre 0 et 1. Certains infinis sont plus vastes que d'autres, nous a appris un écrivain qu'on aimait bien, Augustus et moi. Il y a des jours, beaucoup de jours où j'enrage d'avoir un ensemble de nombres infinis aussi réduit. Je voudrais plus de nombres que je n'ai de chances d'en avoir et, pour Augustus Waters, j'aurai voulu tellement plus de nombres qu'il n'en a eus. Mais, Gus, mon amour je ne te dirai jamais assez combien je te suis reconnaissante de notre petite infinité. Je ne l'échangerais pas pour tout l'or du monde. Tu m'as offert une éternité dans un nombre de jours limités, et j'en suis heureuse ».


Voici un condensé de contraires qui mêle étroitement laideur et beauté. Ce livre est une belle romance. Toutefois cette histoire va bien plus loin qu'une simple histoire d'amour. Ce livre porte sur la vie, la mort, la maladie, l'héroïsme et j'en oublie certainement. Ce livre porte sur le cancer mais il n'est pas un livre sur le cancer. Il consume la vie d'Hazel et d'Augustus mais il ne les définit pas.

Ce livre est un condensé de contraires qui soulève tant de questions qu'on reste sur le sol, hébété par les coups assenés par l'auteur contre son lecteur. Délicatement subtil, on rit, on pleure, on sourit, on crie mais surtout on perd toutes notions d'espace, de temps et d'identité. Soudain, on se retrouve sur un sol, on ne sait où, et on n'arrive plus à déceler les coups des caresses de l'auteur. On rit alors que le sujet est difficile. On pleure alors que l'histoire est souvent très drôle. On sourit alors qu'il n'y a aucune raison apparente. On a plutôt l'air bêta, tout seul, dans notre coin, à sourire ainsi, presque sur commande. Alors, on essaie de se contrôler. On reste sage. On attend quelque chose de précis. Un autre évènement s'y substitue. Et puis soudain, sans crier gare, on a le souffle coupé, tant les mots se sont emparés de nous violemment. C'est rapide, c'est doux et violent. C'est à n'y rien comprendre. Et on est là, les yeux hagards enfouis dans des profondeurs qu'on ne sait déterminer (de la terre peut-être, de l'auteur lui-même ou de soi, ayant trouvé mystérieusement un chemin au plus profond de notre être. Peut être les trois. On ne sait plus). Va-t-on s'y noyer ou au contraire y vivre pour le restant de nos jours ? On ne sait pas et surtout on ne réfléchit plus. Les yeux hagards, on pleure, on rit et une main invisible nous sèche le visage tout en nous assénant des coups sur le cabochon. Puis le silence se fait. Curieuse sensation. La dernière page se ferme. On a la sensation d'avoir grandi plus rapidement en quelques pages qu'en plusieurs années.

Lien : http://aupetitbonheurlapage...
Commenter  J’apprécie          60



Ont apprécié cette critique (4)voir plus




{* *}