Soyons clairs d'emblée, chers amis , je ne serai absolument pas objectif et je vais vous dire pourquoi : je viens de tourner la dernière page d'un roman exceptionnel , voilà . C'est tout bête et si vous me dites mais , "y'a pas un petit détail qui ...." , ma réponse sera cinglante , " NON ! ", j'ai passé un trop bon moment pour ergoter sur des détails qui ont vite été chassés de mon esprit et n'ont jamais altéré l'immense plaisir que j'ai eu à accompagner un bonhomme de 84 ans qui , à sa façon , va rendre hommage aux personnes qui ont illuminé sa vie .Ils sont 5 ces personnages que Maurice Hannigan va faire vivre ou revivre sous nos yeux .Il y a son " dieu", son grand frère Tony , son premier enfant , la si désirée petite Molly , sa belle soeur Noreen ,son brillant fils Kevin, journaliste aux Etats Unis et son épouse Sadie , disparue deux ans plus tôt...
Cinq personnages , cinq parties , cinq merveilleuses tranches de vie , dures , tendres , amusantes , tragiques.......La vie de Maurice , en Irlande , il n'y a pas si longtemps, dans une bourgade du Comté de Meath..
Aujourd'hui , Maurice est seul , trop seul face au vide , seul avec la stout et le whisky ,ses affreux compagnons de détresse .Et il se raconte Maurice et il raconte , il nous embarque ,il nous guide , il nous recouvre d' images d'une vie qui pourrait être la nôtre.
Ce livre , et j'adore ça, se vit plus qu'il ne se lit , c'est un feu d'artifice émotionnel . De l'émotion , oui , mais sans pathos , avec lucidité , honneur , haine , violence ou douceur infinie, amour tendre et bougon....C'est magnifique , magique au point d'accaparer votre attention et de ne vous accorder aucun répit , du début à la fin...
J'ai été sincère , je vous ai prévenu(e)s , je ne suis pas objectif peut - être , mais j'assume la séduction que m'a procurée cette lecture . Un bijou ciselé dans l'or fin..
J'y ai retrouvé , toutes proportions gardées, bien sûr, des émotions telles que celles ressenties récemment dans " Changer l'eau des fleurs " avec , en prime ce " je ne sais quoi de bourru " propre aux Irlandais qui me fait placer ce roman à un rang légèrement supérieur mais , allez , victoire après " photo - finish ". Deux belles réussites .
L'auteure est talentueuse , elle écrit remarquablement bien , observe des " petites choses " du quotidien et les dissémine de ci , de là , sans avoir l'air d'y toucher et même le whisky , irlandais , " of course " , dégage un arôme qui vient titiller vos papilles et dont la couleur ambrée....sublime de justesse ... la forêt en automne .
Je lui trouve surtout un talent fou pour la traduction des émotions, pour faire " vibrer notre corps , pour enflammer tous nos sens" . Et puis quelle belle idée que cette construction avec ...un fil rouge dont je ne vous parlerai pas mais qui devrait vous intriguer et ...vous fasciner.Bon là , les amis ,je vous sens , comment dire , " titillés " au plus haut point .... Nous sommes samedi , le soleil revient , un p'tit tour en ville , la librairie ...et ce soir , vers minuit vous saurez tout . Forcément parce que si vous commencez ...Ah , vous sortez , vous avez un rendez- vous ,un ami à voir , une amie ? Et ben dommage et tant pis pour vous car moi , je n'ai plus rien à dire , pas question .A vous de voir mais , vraiment , réfléchissez bien .Moi , j'dis ça....
" Toute une vie en un soir " , ce n'est pas votre vie , mais c'est peut- être votre soir ? Je me comprends .Et qu'on ne me parle pas de " feel- good " , ce serait une atroce comparaison ...
Un soir , cinq toasts et toute une vie......Lisez ... et.... dites- moi.
Dernier point , ce roman m'a été offert par ma fille adorée pour la fête des pères...Elle le connait bien son père....qui , sans elle , serait sans doute passé à côté d'un très beau roman...
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Je remercie Babelio et sa Masse critique privilégiée et les Editions Delcourt de m'avoir offert ce livre.
Nous sommes dans l'est de l'Irlande, précisément dans le comté de Meath, Comté Royal aux paysages sauvages grandioses et aux traditions culturelles intactes encore aujourd'hui. A quelle époque ? Je ne saurais le dire…Je ne me suis jamais posé la question. Cela n'a aucune importance au fond puisque rien n'a changé dans cette région, ni les paysages, ni le climat, ni l'ambiance, ni les sentiments.
Il s'agit bien là d'un roman d'amour. C'est tout. Celui dont on n'ose pas parler, parce qu'il est si fort qu'il pourrait rendre encore plus maladroit, parce qu'il est tellement pur que les mots de tous les jours, ceux que l'on connait, ne suffiraient pas à lui rendre sa superbe, parce qu'il est tellement profond que la pudeur s'en est emparé définitivement.
Il est beau ce roman dont le personnage principal, Maurice Hannigan, un vieux fermier bourru, malhabile va, au crépuscule de sa vie, se souvenir des événements marquants qui ont jalonnés son existence. Des bas, des hauts, la misère, l'opulence, la soumission et la revanche, les coups durs et les coups bas, la vengeance, les séparations dont on ne se relève pas et les années qui défilent laissant sur son passage des relents de regrets, de remords, d'amertume.
Il est beau ce roman où M. Hannigan, dyslexique et peu instruit trouve les mots justes, percutants, essentiels, poignants parfois et porte successivement un toast à tous ceux qui ont compté pour lui.
Un premier roman émouvant porté par une histoire simple mais tellement bien racontée. J'ai imaginé M. Hannigan rassembler ce qu'il lui restait de forces et, la voix mal assurée, tenter une ultime mise au point, ne voulant pas s'encombrer de doutes et de désordres juste avant de rejoindre enfin sa bien-aimée trop tôt disparue. Une fois près d'elle, que ce soit au paradis, dans les dunes irlandaises ou dans le souffle du vent, il est probable qu'il n'aura plus jamais l'audace ni la capacité de tout expliquer.
L'écriture d'Anne Griffin est subtile, sobre et forte à la fois. le roman est bien articulé et l'auteure nous invite à la suivre, la gorge serrée parfois, mais toujours d'un pas alerte parce que nous voulons tout connaitre de la vie de cet homme si sensible qui se cache derrière son armure.
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Il m'a fallu plus d'un soir pour lire toute la vie de Maurice Hannigan, vieux monsieur irlandais, de 84 printemps... Mais quelle vie !
Une vie résumée en un soir , passé dans un hôtel qui a une signification pour lui. Un hôtel où il a réservé une chambre avant de passer à autre chose. Pendant cette soirée, il portera cinq toasts, un pour chaque personne qui a compté dans sa vie. Son frère (trop tôt disparu), Sa fille ( enfant mort-née), sa belle-soeur ("complètement timbrée", grâce à qui , il a pu rentrer dans sa belle- famille),. son fils, journaliste au USA, à qui tout ce discours est dédié, et enfin... sa femme, partie deux ans plus tôt. Disparition, dont il ne se remet pas.
Une longue vie, réussie, sur le plan matériel, mais qui comporte des tragédies, une vie qui n'est pas sans remord, sur ce qu'il aurait pu ( dû) mieux faire.
Car il ne s'épargne pas sur la fin, le Maurice, il est franc, direct, mais attention : pudique aussi ... Et infiniment touchant...( Je n'avais pas rencontré dans la littérature de papy aussi touchant depuis le "papé" de Manon des sources. )
A travers la vie de Maurice Hannigan, c'est aussi un peu de l'histoire d'Irlande, que l'on touche : l'école, la domesticité, la vie d'un agriculteur,son rapport à l'argent, l'infertilité, le fils parti aux USA , la pudeur des anciens, leur impossibilité à communiquer leurs émotions...
Et pourtant, il y en a dans ce petit roman, de l'émotion ! On est ému, souvent, on sourit souvent aussi, devant ses réflexions par rapport au temps qui passe , par rapport à la vie de son fils aux USA...
Pour une fois, la quatrième de couverture reflète très bien ce qu'il y a à l'intérieur : "Un roman plein de pudeur et de grâce qui contient toute l'âme de l'Irlande."
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Comme je t'ai aimé, Maurice Hanningan! Comme j'ai aimé, au-delà de ton aspect bougon de vieux fermier irlandais, les vérités brutes , désarmantes et poignantes que tu adresses à ceux qui t'étaient chers!
Tu te battais, enfant, avec les mots, à l'école, te jugeant idiot. Mais ils sont si forts, si touchants, les mots de ta confession... Au Rainsford House Hotel , lieu symbolique entre tous, où tu égrènes tes souvenirs, tu portes cinq toasts aux cinq personnes qui ont compté dans ta vie... Tony, Molly, Noreen, Sadie et Kevin...
La stout, le whiskey sont là pour les saluer, les honorer. Ils font partie intégrante de ton projet.
Et c'est toute la campagne irlandaise, la vie quotidienne à la ferme qui déroulent sous nos yeux, depuis le milieu du 20 ème siècle. C'est surtout les non-dits douloureux, les regrets, les pertes cruelles...Mais aussi les joies amoureuses, les liens fraternels si puissants. Oh, comme j'ai aimé t'accompagner, Maurice, sur ce chemin du passé, riche en surprises et en révélations, semé d'orties tout autant que de roses... Trinquer, même si je n'aime ni la stout ni le whiskey ( désolée, Maurice, je préfère la bière belge et le champagne) .Rire et pleurer avec toi.
Vous l'aurez compris, ce premier roman très réussi m'a bouleversée. Merci à Babelio et aux éditions Delcourt de me l'avoir proposé. J'espère lire par la suite d'autres romans de cette auteure prometteuse. Elle a su si bien se mettre dans la peau de Maurice que j'ai l'impression de le connaître depuis toujours...
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J'ai lu ce livre (sur les conseils avisés de mes amis babeliotes) la gorge serrée et les mouchoirs à portée de mains. J'ai bien fait ! Quel texte merveilleux ! Et quelle vie ! Celle de Maurice, fermier irlandais fâché avec l'école mais pas avec les chiffres, racontée à travers 5 toasts dédiés à ceux qui ont comblé son existence : son frère Tony, sa fille Molly, sa belle soeur Noreen, son fils Kevin et sa femme Sadie. C'est toute une vie à la campagne dans l'Irlande de l'après Guerre (et son dur labeur) qui est narrée . Et comme la vie, c'est triste parfois, c'est plein de pudeur, c'est surtout plein d'amour et tout simplement magnifique ! J'ai l'impression en laissant Maurice de quitter un ami. A lire absolument.
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Une belle surprise que ce roman reçu par Masse Critique!
Il a 84 ans, veuf depuis deux ans exactement, et ne s'est pas remis du décès de sa tendre Sadie. Pour la dernière fois, Maurice Hannigan s'installe au bar du Rainsford House Hotel, une grande demeure dont la famille Dollard est propriétaire depuis des générations et à laquelle Maurice est intrinsèquement lié, malgré lui. Il porte un toast aux cinq personnes les plus précieuses de sa vie, l'occasion d'un retour sur ce qu'il a été et sur un événement qui a bouleversé plusieurs générations.
Le vieux Maurice n'est pas sans reproche: cupide, grincheux, pas très bavard surtout avec son fils Kevin, parti s'installer aux Etats-Unis. C'est pourtant à lui qu'il s'adresse tout au long de ce fameux jour où il évoque son grand frère décédé beaucoup trop tôt, sa petite fille morte à la naissance, sa belle-soeur, et bien sûr Sadie, qu'il a aimé et qu'il aime toujours comme au premier jour. Maurice est plein de regrets et d'amertume, c'est le moment de réparer tout ça, et ce sera aujourd'hui.
A travers la traduction, très réussie, on entend parfaitement le parler irlandais des petits vieux de là-bas, et je suis certaine que le lire directement en anglais aurait été encore plus touchant, mais la traductrice a su garder l'esprit.
Avec ce roman, on traverse le vingtième siècle dans une petite bourgade près de Dublin, la pauvreté des premières années, puis le Celtic Tiger, les jeunes partant en masse chercher du travail et un bel avenir aux Etats-Unis.
Le personnage de Maurice, tout en sincérité et pudeur - il n'a plus rien à perdre - est vraiment émouvant et attachant.
Pour un premier roman, c'est une belle réussite à encourager.
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