Le journal de Claire Cassidy

Ella est morte. Je n’y ai pas cru quand Rick me l’a dit. Et comme je commençais à saisir pleinement la portée de ses paroles, j’ai pensé : un accident de voiture ou d’autre chose, une overdose même. Mais quand Rick a ajouté « assassinée », ce fut comme s’il me parlait dans une langue étrangère.
« Assassinée, ai-je répété bêtement.
— La police a dit que quelqu’un était entré chez elle de force la nuit dernière, expliqua Rick. Ils sont venus sonner à la maison ce matin, Daisy a cru que j’allais être arrêté. »

Sondez votre cœur, et écrivez.

J’allais enseigner la littérature anglaise pendant la journée et le soir, inspirée par mon environnement, j’écrirais sur Holland, sur sa vie de reclus, la mort mystérieuse de sa femme, sa fille disparue.

Ce sont les vacances de mi-trimestre et, en l’absence des élèves, tandis que je passe mon temps dans le vieux bâtiment, il ne m’est pas difficile d’imaginer que j’enseigne dans une vénérable institution. Certaines parties d’Holland House ressemblent à un université d’Oxford, si on ne fait pas attention à la présence du nouveau bâtiment et à l’odeur du gymnase. J’aime ce moment de liberté.

Les participants à l’atelier d’écriture sont toujours très excités d’apprendre que l’auteur de L’Inconnu a vécu dans cette maison. Il n’en est même pratiquement jamais sorti. C’était un de ces vieux ermites d’autrefois, qui vivait entouré de son intendante et de ses domestiques.

La vieille bibliothèque aussi est là, elle n’est plus fréquentée que par les professeurs car les élèves ont à leur disposition une version plus moderne dans le nouveau bâtiment, avec des ordinateurs, des fauteuils et des livres de poche dans des présentoirs tournants. Le dernier étage, dont l’accès est interdit aux élèves, abrite le bureau de R.M. Holland qui est encore exactement tel qu’il l’a laissé.

’imagine bien les élèves de sixième disparaissant par la cheminée comme des petits ramoneurs du siècle dernier. La plupart des activités éducatives à Talgarth High se déroulent dans le nouveau bâtiment, une monstruosité des années soixante-dix, toute en verre et en briques de couleur. Le bâtiment dans lequel je me trouve, le vieux bâtiment qui autrefois s’appelait Holland House, n’est qu’une annexe. Il contient le réfectoire, les cuisines et la chapelle, ainsi que le bureau du directeur. Au premier étage, certaines pièces servent à l’occasion de salles de musique ou de théâtre.

Les élèves de l’atelier d’écriture descendent bruyamment l’escalier à la recherche de leur dose de caféine, tandis que je m’attarde un peu dans la classe. C’est une sensation étrange que de se retrouver dans cette partie de l’école. On n’enseigne qu’aux adultes, ici, les salles sont trop petites et trop mal agencées pour y donner des cours aux élèves du collège. Celle-ci dispose d’une cheminée et d’un tableau un peu inquiétant : un enfant qui tient une sorte de furet mort

« On peut se débarrasser des animaux, dis-je. Souvent, les auteurs les tuent pour créer une tension. Ce n’est pas aussi fort que lorsqu’on tue un être humain, mais ça peut être très troublant. »

« À vrai dire, c’est Ted qui a raison, Herbert, c’est son chien. Le compagnon animal est une présence récurrente dans les histoires fantastiques, parce qu’un animal peut percevoir des phénomènes au-delà de la compréhension humaine. Quoi de plus effrayant qu’un chien qui regarde fixement quelque chose qu’on ne voit pas ? Les chats sont particulièrement angoissants dans ce sens-là. Songez à Edgar Allan Poe. Et on a souvent considéré les animaux comme proches des sorcières et comme leurs assistants quand il s’agit de pratiquer la magie noire. Mais il y a une autre raison pour laquelle les animaux représentent des personnages utiles. Est-ce que quelqu’un peut me dire pourquoi ? »