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Critique de colimasson


Deux commentaires différents selon l'humeur :

Lire « L'amour et l'Occident » puis lire « L'âme insurgée », c'est le parcours de la contradiction.

Savoir qu'Armel a entretenu une correspondance avec Emil (Cioran), c'est l'échange de la complémentarité. Tandis que le premier s'étend dans la logorrhée dense et plombante, le second veilla à charger son lyrisme de légèreté ; tandis que le premier loue les merveilles de la poésie, le second apprend à ricaner de la mystification produite par la philosophie et le langage. Tous deux se rejoignent cependant en ceci qu'ils disent « non ! » aux évidences. Et cette exclamation définit le mieux le Romantisme selon Armel.

« le Romantisme, bien évidemment, n'a rien de commun avec la gentillette école littéraire qui fit florès en France sous ce nom ; rien de commun non plus avec la rhétorique douceâtre et la fadeur sentimentale, les rubans et les fanfreluches que l'on s'est plu souvent à attacher à ce mot. »

Hölderlin, Novalis, Kleist, Nerval, Melville et Stevenson constituent les sujets privilégiés d'Armel dans ces essais qui ne cherchent pas à expliquer l'oeuvre par l'auteur, mais l'accomplissement de l'oeuvre comme mission vouée à l'individu – celui-ci ne devenant auteur que s'il se met à l'écoute du message qui lui parvient de l'au-delà par l'exercice de sa solitude et de sa divination.

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Armel Guerne est un homme de convictions. Par exemple il pense que le Romantisme est davantage qu'une école littéraire - ce serait aussi une manière de dire non. Armel est aussi un homme d'action, et il agit bien. Par exemple il traduit des poètes réputés pour leur intraduisibilité. Hölderlin, pour en citer un. C'est un acharné, un passionné, capable d'écrire plusieurs essais différents sur le même poète sans jamais se répéter. Il fait même d'autres choses que de purs travaux littéraires, ce qui étonne toujours, on ne sait trop pourquoi. Par exemple, il fut membre d'un réseau de service secret britannique. Toutefois, nous pouvons nous en foutre car il n'en est fait mention dans ce bouquin, et je ne sais même plus où j'ai appris ça.

Pour une âme fatiguée comme la mienne, s'étant autrefois crue insurgée, ce recueil d'essais est une épreuve, une terrible confrontation de l'âme morte face à l'âme vive, un dégoût par excès de fougue – de cette fougue qu'on ne comprend plus dans les états d'abattement extrême. L'âme morte face à l'âme insurgée souffre de voir ce qu'elle était, ce qu'elle aurait pu devenir, ce qu'elle pourrait être de nouveau, peut-être, si elle avait assez de volonté. Mais où trouver cette volonté ? L'âme morte a envie de chier à la face de l'âme insurgée mais ce serait injuste. Peut-on haïr ce que l'on aimerait être si on le pouvait ?

Armel Guerne est un homme d'une autre époque. Par exemple, qui pense encore que la littérature ou la poésie pourraient encore soulever une âme ? Mon âme morte se plaît à penser qu'Armel n'aurait pu rester insurgé bien longtemps en notre époque de ridicule généralisé.
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