Moi les hommes, je ne les déteste pas. Je déteste la virilité qu’ils incarnent, je déteste les étiquettes et les standards qu’ils imposent. Mais les hommes, pris séparément dans leur individualité, je ne les déteste pas. N𠆞n déplaise aux partisan.e.s du « not all men », mon féminisme ne repose ni sur la haine, ni sur le mépris. Si lolition du patriarcat est au cœur de ma lutte, il n𠆞n demeure pas moins que je ne la fonde pas sur une discrimination à l𠆞ncontre de la gent masculine, mais sur l’éducation de celle-ci. Comment peut-on détester les hommes pour leurs privilèges alors même qu’ils n𠆞n sont pas conscients ? Comment éradiquer leurs prérogatives archaïques en les excluant du combat ? Cela me semble à la fois injuste et profondément utopiste.
Il m𠆚ura fallu deux lectures consécutives pour passer outre mes préjugés et saisir l’intérêt de l𠆞ssai de
Pauline Harmange ; enfin pour réaliser que le fossé qui semblait me séparer de ses propos n𠆞st pas si profond que ça et que, derrière son pamphlet exempt de toute nuance, se cache une colère commune à bien des femmes. L𠆚utrice clame sa haine des hommes en refusant les accusations de sexisme : la misandrie n𠆞xiste en effet qu𠆞n réaction à la misogynie. Harmange démonte l’oppression masculine au quotidien en posant les jalons de sa misandrie, masquée derrière une plume cinglante et souvent drôle. Plus qu’un ramassis haineux, ce court essai est une ode à la sororité, aux femmes qui peuvent – doivent – exister sans les hommes, dans un espace-temps qui n𠆚ppartient qu’à elles, où elles ne seraient ni opprimées ni violentées, là où enfin elles pourraient « former une belle et grande sarabande », se révéler à elles-mêmes, libres de toute injonction.
L’ouvrage, qui fut menacé de censure lors de sa publication, continue de faire scandale : sur les réseaux (où l𠆚utrice subit un harcèlement systématique nauséeux, exercé par les mêmes hommes qu𠆞lle vomit, qui ne font finalement que corroborer son propos), dans la presse ou dans les foyers. Cet essai ne peut être qu’une invitation au débat et à l’éducation ; à la déconstruction. Et quand bien même ce serait là son seul intérêt, il est déjà fondamental.